[Kikyo] I - Ainsi vint l'Aurore

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Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Elle avait couru jusqu'à la plage, prise de nausées. S'était-il seulement rendu compte, Hakanai, de cette plaie béante qu'il avait causé dans sa chair sans qu'elle ne comprenne la raison ? Ses genoux s'écrasèrent sur le sable, sa respiration devenait irrégulièrement, elle se tenait le ventre.
"J'ai envie de vomir..."
Comment un simple constat avait pu la mettre dans cet état ? Elle ne s'était jamais posée la question jusqu'à maintenant, c'est dire si cela ne l'avait jamais perturbé. C'était le genre de chose qu'on ne remarque jamais, jusqu'à ce qu'on ne voit plus que ça : elle n'avait jamais rêvé. Outre ces cauchemars sur le Loup Noir, son sommeil était vide. Rêver est pourtant humain, et Hakanai le lui avait fait comprendre ; pour lui c'est une chose naturelle, pourquoi ne pouvait-elle le faire ? Elle était humaine après tout. Mais elle s'était subitement sentie mal, comme si cette révélation avait éveillé un dégout en elle, comme si elle s'était retrouvée confrontée à quelque chose d'immonde, de contre-nature.
"Je suis une femme ordinaire, on ne peut plus ordinaire...!" se répétait-elle inlassablement. Il n'y avait rien à accepter, rien à admettre, pas de secret enfoui ou de passé surnaturel, elle était normale des pieds à la tête. Elle était humaine, elle n'avait aucun pouvoir, aucun don, elle n'était même pas magicienne.

A nouveau, elle fut prise de vertiges et dû se retenir d'une main pour ne pas tomber. L'autre main tenait toujours son ventre, au nouveau du nombril.
Au fond, qu'est ce que cela devrait changer que je rêve ou non ? Je suis toujours moi. Je suis une Kakita, une duelliste, je fais mon devoir, je n'ai à me plaindre de rien et je suis heureuse de remplir mon rôle. Je n'ai pas à être perturbée par cela. Je suis simplement quelqu'un de normal... quelqu'un qui ne rêve pas.
Elle eut un haut-le-cœur à cette dernière pensée et se mit à tousser, la respiration difficile. Il lui fallut plusieurs minutes et plusieurs grandes inspirations. Quiconque serait passé par là à cet instant aurait pu croire qu'elle avait une crise d'asthme.


"Tu vas enfin comprendre."



Un sifflement lui vrilla les tympans, comme un son atroce qu'elle était seule à entendre. Elle avait beau se couvrir les oreilles, rien n'y faisait. Cette obsession ne quittait plus son esprit. Rêver, ne pas rêver. Le Cauchemar, les Tenshi, la malédiction, Byakuya... non !


"Il est déjà trop tard, Fille des Songes."



Une voix qu'elle connaissait, qu'elle ne connaissait que trop bien. La peur, la souffrance... résiste, encore un peu, ne sombre pas !


"Tu m'auras donné du mal, tout de même."



Il se tenait debout devant elle, vêtu d'un kimono gris. Quand elle leva les yeux, son cœur cessa de battre. C'était impossible, pas lui...
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Pourquoi j'y repense soudainement ?
C'était il y a longtemps, dix ans au moins, la dernière fois qu'elle avait entendu ces paroles et cette berceuse qui parvenait autrefois à l'endormir. Elle avait longtemps passé ses nuits à-même le sol, dans un contexte bien différent de celui-ci. Elle n'y avais jamais repensé depuis qu'elle avait vu pour la dernière fois le visage froid et endormi de sa mère avant que les deux soldats ne ferment le cercueil pour la mettre en terre. Jusqu'au bout, Tenshi no Kagome avait donné jusqu'à son dernier souffle de vie sans regret, et sans cesser de sourire. Jamais elle n'avait versé une larme devant son enfant, jamais elle n'avait manqué une berceuse sur le plancher froid.
Quels étaient déjà les noms de ces soldats ? Elle l'avait oublié, elle n'avait retenu que leur gentillesse. Ils avaient bien voulu l'enterrer dans le sanctuaire et l'un d'eux avait tenu sa main tout le long du chemin. Elle avait très vite séché ses larmes, quand il lui avait saisi les épaules.
"Écoute petite, il n'y a que deux choix pour toi. Si tu restes ici toute seule, tu vas finir mendiante. Tu peux rejoindre notre armée, tu auras une éducation là-bas."
Oh bien sur, il ne devait pas imaginer quel traitement ses supérieurs lui infligeraient, il pensait sincèrement la sortir de la misère, ayant foi en sa patrie et ses convictions. Ainsi les enfants grandissent, les espoirs ont laissé place à la dure réalité de l'occupation. Mais cette nuit-là, ces mots et la douce voix de sa mère avaient tourné dans son esprit.

Peut-être était-ce dû à la danse des flammes et la dureté du plancher, malgré le tapis et la chaleur des bras d'Akira autour d'elle, si elle repensait à ces longues nuits sans rêves où elle trouvait un peu de réconfort dans les histoires et la poésie. Il n'y avait aucune raison pour que ces souvenirs lui reviennent, et avec eux le pincement au cœur que lui procurait ce souvenir. C'était comme une prière qu'elle avait répété jusque sur son lit de mort quand la fatigue et les privations avaient finalement eu raison de sa santé. Kikyo n'avait alors que treize ans.
Et ce soir, elle repensait à tout ça. La couverture chauffante du kotatsu la couvrait jusqu'à la taille, ils n'avaient pas bougé depuis des heures et elle ne pouvait fermer l’œil.

Tu as passé ta vie à me répéter ces mêmes vers, mais je n'ai jamais su ce que tu espérais. Tu m'as si souvent parlé de mon père, tu prenais grand soin de ce Mon qu'il t'avait laissé avant de partir mourir au combat. Tu l'as pleuré et tu m'as encouragé à suivre ses pas plutôt que les tiens. Que cherchais-tu, en me répétant sans cesse que tout irait bien, que je sortirais un jour de cet enfer ? Était-ce simplement l'espoir, ou savais-tu quelque chose ?"

Elle n'avait jamais souhaité être noble, ni reconnue du moment qu'elle avait l'affection de Sanjuro-nii-sama. Elle n'était pas prête à être une Hime, épouse de Daimyo, descendante des Tenshi... Tout s'était enchaîné si vite en l'espace de quelques lunes. Elle ne se retrouvait plus dans ce qui était si éloigné de ce qu'elle était. Elle voulait rester Kikyo, juste Kikyo. Pourquoi être "seulement Kikyo" était si difficile ?
"Tout était plus simple en ce temps là."
Ses lèvres commencèrent à mimer les mots, tels qu'elle s'en rappelait. Plutôt que de réveiller Akira, elle se redressa et fixa sur le kotatsu la lettre de Kusakari no Yuuka-hime. Son esprit était ailleurs, perdu dans ses souvenirs...



"D'où elle vient, ta chanson ?
- Une mère la chantait autrefois, pour son fils en exil.
- Un message pour quoi ?
- Dors ma chérie, il est tard



A la lueur des braises mourantes, Kikyo passa le reste de la nuit dans ses souvenirs. Elle continua de fredonner tout bas, le front contre les genoux, un message d'espoir datant de plusieurs siècles.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Plus ils avançaient et plus elle voyait se dessiner sous ses yeux un paysage de moins en moins accueillant. Les terres sauvages de l'Ouest, au fur et à mesure qu'ils approchaient de la frontière de la Brûlure, lui semblaient mortes, stériles, presque malades. Elle voyait autour d'elle que les autres faisaient de leur mieux pour ne pas se laisser affecter par ce qu'ils voyaient. Keiten marchait en tête, près de ses hommes avec qui il lui arrivait de parler à voix basse, Hiei et Haruka faisaient de même à l'arrière du groupe, certains s'éloignaient parfois pour vérifier les environs ou chercher de quoi manger. Elle se contentait d'avancer en silence aux côtés d'Akira sans décrocher un mot.
"Est ce que tu doutes ?"
Elle glissa un regard vers Akio. Elle entendait ses pensées comme il pouvait entendre les siennes, c'était leur façon de communiquer. Elle répondit, sans ouvrir la bouche :
"Non.
- Tu es tourmentée. D'ordinaire, c'est cet homme qui te fait perdre l'esprit.
- Je pense au rêve de ma mère."

Isarmaux avait découvert ce qui était arrivé au sanctuaire, ce qui avait servi de matière première pour Onigumo lorsqu'il avait créé l'Enchanteresse. Elle y avait pensé toute la nuit, toute la journée. Une partie d'elle réclamait vengeance, mais Byakuya la temporisait. Elle devait avoir l'esprit clair et lucide lorsque viendrait le moment des combats.
"Nous arrivons."
La voix de Natsumi et l'arrêt des six survivants du Clan du Crabe la fit sortir de sa conversation silencieuse avec le hanyo. Sortant du bois, ils étaient à présent à découvert face à un vallon marécageux qui portait encore les traces des années de bataille. Quelques machines impériales engluées dans la vase et rongées par l'eau, des armes rouillées flottant à la surface, parfois des restes humains... un brouillard fétide cachait en partie la chaîne de montages mais l'on pouvait distinguer à moins d'un jour de marche les contours de la Muraille, l'ancienne forteresse des Hida. Tous restèrent impassible devant ce paysage dévasté, tous sauf les anciens résidents qui serraient les poings. Était-ce de la colère ? de l'impatience devant la bataille qui s'annonçait ? Ils avaient attendu si longtemps de pouvoir reprendre leur foyer, le savoir occupé par ceux qu'ils haïssaient le plus ce monde devait les rendre fou de rage.
Kikyo regardait Natsumi, dont les cheveux roux flottant dans l'air lui rappelaient une scène similaire aux plaines d'or, lorsque Sarada-hime attendait son heure. D'instinct elle pensa "Ses ancêtres sont auprès d'elle."

"Nous devrions nous arrêter ici pour la nuit, déclara Natsumi. Nous serions trop exposés et le marais grouille de morts relevés par l'ennemi pour guetter les imprudents. Nous ferons le voyage d'une traite demain, et nous attaquerons de nuit."
Le plan proposé était simple mais risqué. Les Hida avaient une information d'importance concernant la Muraille : la Porte n'était pas la seule entrée. Il y avait d'autres passages connus seulement d'eux, au cas où, qui allaient maintenant servir. Pendant que la majeure partie des troupes attaquerait de front pour concentrer l'attention, deux groupes d'infiltration passeraient par ces tunnels. Le premier userait du "détecteur" de Keldan et A'lys pour trouver l'obsidienne et la détruire pendant que le reste des scorpions feraient ce qu'ils savaient faire le mieux : passer par derrière. Ils iraient fermer la porte côté Brûlure afin de débloquer le mécanisme de la porte de Yanxia, et empêcher toute fuite de l'ennemi alors que les alliés entreraient dans la Muraille. Si tout se passait bien, ils pourraient surprendre Onigumo et le tuer une fois pour toutes.

Après avoir monté la tente, Kikyo se laissa tomber, épuisée. Cinq jours qu'ils marchaient et que sa nervosité ne faisait que croître, elle avait pourtant connu plusieurs batailles mais une seule de ce côté-ci. Akio vint se coucher derrière elle, lui servant de dossier. Elle regardait Izayoi et Kiyoha allumer le feu de camp à l'abri d'un rocher de façon à ne pas être vu depuis la Muraille.
"Tu penses qu'elle va venir ?"
Byakuya s'était arrêté à côté d'elle, portant un fagot de bois bort. Elle répondit :
"L'Enchanteresse ?
- Hm. Tu la crois ?
- Je ne sais pas. Pourquoi tu me demandes ça ?"

Le ton avait été un peu sec, plus qu'elle ne l'aurait voulu. Pensait-il que parce qu'ils savaient son origine, elle serait plus fragile ? Qu'elle pourrait se montrer moins inflexible ? Cette seule pensée l'énervait, mais Byakuya n'y était pour rien et elle le savait. Il lui demandait toujours conseil, la situation ne changeait rien. Ils la regardait avec douceur et compassion, comme à son habitude. Elle soupira.
"Pardonnes-moi. Je vais bien. Prends du repos toi aussi."
Elle laissa son ami et son cousin incrédule, disparaissant sous la tente, elle s'allongea et ferma les yeux. Elle ne mangerait pas ce soir.

Quelques heures plus tard, elle se réveilla pour faire face à la nuque d'Akira couché à côté d'elle. Il dormait. Demain, n'importe lequel d'entre eux pouvait mourir. Il se pouvait même qu'aucun ne survive. Elle ne voulait pas y penser, elle ne devait se focaliser que sur une seule chose, une seule pensée.


Peu importe comment cela devait se terminer.
Le dénouement approche.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Kikyo, récupérez votre katana, idiote !"

"Bya-kun ! attrappe !"


"Tu es une Kakita."



La terreur, la douleur, la violence. Ce loup noir n'était plus que l'ombre de lui-même, aveuglé par la rage et le chagrin. Il ne reconnaissait plus ni ses enfants ni sa propre soeur, il avait tué Okami. Elle s'était sacrifiée pour eux.Plus d'espoir, plus d'autre alternative, il avait totalement sombré. Elle savait la douleur de Haruka, puisqu'elle la ressentait en cet instant au plus profond d'elle. Voir sous ses yeux s'éffondrer la louve blanche, la voir gisant sur la berge de l'étang et ne pouvoir s'enquérir de ses dernières paroles... mais elle était une Kakita. La froideur, la concentration, le regard fixé sur son adversaire, non, elle ne faillirait pas. Elle demeurerait calme, elle continuerait de canaliser l'ether. Ses alliés lui faisaient confiance, ils concentraient toute leur énergie en elle, elle ne pouvait flancher maintenant. Ni maintenant, ni jamais.
Que le repos lui soit accordé. Que la souffrance du Kami noir disparaisse, que ses tourments prennent fin.

"TEN NO TSUME !"

Elle ne le tua pas. Elle le tua presque. Sa lame de diamant s'enfonça profondément dans l'abdomen de la bête, il agonisait, fou de rage. Elle avait raté, malgré tous les efforts de l'ensemble du groupe. La patte noire du loup la balaya avant qu'elle ne puisse réagir, son corps heurta la roche.
A demi consciente, elle entendit Kurokami hurler une dernière fois. Ils avaient réussi, ils l'avaient achevé. Quand ils se précipitèrent auprès d'elle, elle ne prêta guère attention aux soins qu'à la vague purificatrice qui émanait de Byakuya. Le sanctuaire était en train de guérir... Okami-sama était en train de mourir. Une boule se forma dans sa gorge. On n'entendait plus les loups. Elle ne cessait de murmurer "je vais bien" et d'inciter les autres à s'occuper de blessés plus graves, comme Gaito qui n'avait pas hésité à se jeter entre son père et Akira pour le dégager de là. Un lien d'opposition et d'attrait mutuel s'était tissé entre le hyurois et le hanyo.
"Debout."
Les mots fermes d'Akira la ramenèrent à la réalité. Comme toujours, il était dur et sans aucune compassion avec elle. Comme toujours, c'était ce qu'elle attendait. Elle se leva difficilement, douloureusement, mais elle se leva sur l'ordre de son seigneur.
" Ne quittez plus jamais votre lame, que cela vous serve de leçon. Par ma mort, vous auriez payé le prix fort. Allez lui faire vos adieux."
Il avait raison. Aussi dur soit-il, s'il était mort ce soir parce qu'elle n'avait pas eu sa lame en mains... elle ne voulait plus y penser, pas maintenant.

Elle ne pouvait marcher jusqu'à l'étang. Elle ne pouvait qu'observer de loin Haruka et Byakuya qui dansaient et les trois loups blancs la tête baissée face à leur mère dont le corps retournait peu à peu à l'ether. Levant les yeux, elle vit un groupe d'étoiles former une constellation au-dessus de Yume-dori. la Constellation du Loup. Elle murmura pour elle-même :
"Est-ce là un adieu, Okami-sama... Ou bien est-ce que les dieux vous ont accordé l'immortalité auprès des étoiles ?"
Elle serra longuement Akio dans ses bras lorsqu'il revint vers elle. Tout le monde était épuisé. Isarmaux partit le premier, Keiten en suivant. Rama, malgré son deuil et son amabilité douteuse, proposa de ramener les autres. Bara choisit de suivre Byakuya à Shirogane.
"Veux-tu rester ici, Akio ? demanda t-elle au loup blanc.
- Ton seigneur est en colère. Repartons avec lui, nous reviendrons... quand il sera temps de revenir."
Elle se hissa avec l'aide d'Itaru sur le dos de son ami et s'accrocha d'une main au harnais, l'autre bras la faisait trop souffrir. Un dernier regard croisé avec Gaito, elle laissa Haruka auprès de Hiei, il avait besoin d'endurer sans qu'on vienne l'étouffer. Elle s'en fut à la suite d'Akira et le rattrapa à la sortie du sanctuaire. Elle lui tendit la main pour l'inviter à monter. Il serait temps de parler plus tard.

Cette nuit-la, un vent tiède dissipa la brume qui s'était installée sur la forêt depuis des semaines. La lune éclairait le littoral à l'approche de l'été. Pour la première fois depuis bien longtemps, on n'entendit pas un seul loup hurler.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Elle commençait à croire que c'était une fatalité. Pour une fois, c'est elle qui avait perdu son calme et manqué de détruire le dojo à leur retour. Le seul mot qui hantait son esprit "Pourquoi ?". Elle le savait pourtant, dès le départ, que c'était une mauvaise idée. Se rendre au Ralliement, même par curiosité et dans une démarche pacifiste, ne pouvait que mal tourner. Mais bon, comme si cela n'était pas suffisant qu'il soit résigné, les kamis avaient décidé de constamment mettre sur leur route des individus qui se pensent au-dessus de tout.
Elle enrageait. Pourquoi, pourquoi ? Était-ce une épreuve de plus ?

Il avait voulu s'y rendre, par curiosité ou par ennui. Il avait souhaité écouté, sans interrompre. Il avait été invité à rejoindre le cercle, il s'était intéressé à leur culture lui qui pourtant avait tant de fois campé sur ses positions au sujet des xaelas. Il avait fait un pas vers les Steppes, qu'importe la raison qui l'y avait pousser. Il avait entrepris d'échanger à l'issue de cette veillée, avec l'une d'entre eux qu'il semblait connaître. Elle, ne la connaissait pas. Et voilà qu'une lalafelle intervient et que les remarques irrespectueuses fusent.
Qui était-elle ? D'où sortait-elle ? D'où se permettait-elle...?

"Kakita-san, rossez-la."

Comme elle l'aurait voulu. Mais l'impertinente se terrait à deux centimètres de la xaela en plus de son sourire arrogant. Intelligente, si Kikyo tentait de frapper, elle risquait de toucher aussi la xaela qui ne le méritait pas. Elle attendit, le regard dans le vague. Mais la loi du Ralliement mit un terme à ses intentions. On leur apprit que les Questir interdisaient les conflits ici, ils s'y plieraient donc et elle lâcha son tsuba. Mais comme toujours, on se permet d'utiliser les lois des autres pour se couvrir et provoquer sans avoir à assumer les conséquences. Il est si facile d'invoquer cette règle mais de profiter de ne voir aucun de ces gardiens à proximité pour continuer à provoquer.

"... Mais peut-être ai-je été trop prompt dans mon jugement. Dans ce cas veuillez m'excuser."

Avait-elle bien entendu ? Il s'excusait ? Elle avait envie de hurler. Elle l'aurait giflé, publiquement, et qu'importe les conséquences ou la punition. Depuis quand doit-on s'excuser d'avoir conversé avec une personne pour ensuite se faire railler par une lalafelle tout aussi étrangère que lui en ces lieux ? Que lui arrivait-il bon sang ? Depuis quand était-il devenu si... ordinaire.
Ce n'est pas possible, ce n'est pas lui...
Elle ouvrit la bouche pour parler, mais Alden la devança.

"Je commence à en avoir assez de voir des gens se montrer insultant devant mon ami pour ensuite venir lui reprocher d'avoir répondu. Franchement, ça commence à m'énerver."

Les mots du hyurgoth suffirent à la détendre juste assez pour lui rappeler sa place. Elle ne dit rien mais brûlait de l'intérieur. Son regard guettait chacune des réactions de son fiancé, sans comprendre. La discussion s'arrêta là, sur un simulacre de paix cordiale. Intelligente et sournoise lalafelle qui ne s'écarta pas de la xaela et ne donna aucun nom. Voilà bien le genre de personne dont les xaelas devraient se méfier au lieu de se chercher des ennemis ailleurs. Elle comprenait pourquoi Hiei semblait si inquiet à propos de la venue des étrangers. Mais lui parler de cela serait de l'ingérence, elle ne vaudrait pas mieux. Kurusu-dono était venu pour écouter, pas pour tisser le moindre lien.

"Je vois bien que tu es assis sur un nid de vipères."

Qu'avait-il osé dire ? toute la sympathie qu'elle avait pour Alden s'envola, un peu trop vite. Elle n'était plus objective, aveuglée par sa colère. Un homme qui ne savait rien de leur quotidien, rien de leurs batailles, rien de leurs alliances, qui se permettait ce genre de jugement sur des "j'ai entendu que", de quel droit ?
Pourquoi les hommes se permettent-ils ce genre de propos si ce n'est pour semer le chaos ? Surtout un qui se prétendrait son ami. La colère montait. Une colère qu'elle ne se connaissait pas, qu'elle ne contrôlait pas.

"Vous êtes insultant, Alden-san.
- Silence, Kakita-san."


Elle se tut, et s'éloigna avant de céder à nouveau à l'envie de le gifler. Encore cette résignation. Et elle devait se taire. Elle n'était pas son égal, quoi qu'il lui murmure dans l'intimité elle était publiquement sa lame, sa servante, elle n'avait même plus le droit de le défendre. Elle ne voulait plus entendre, elle n'écoutait plus.
Quand ils rentrèrent à Shirogane, elle le laissa seul et descendit au dojo. Jusqu'à ce qu'il la rejoigne, elle laissa éclater sa frustration en frappant le vide. Les vagues d'ether firent vibrer les murs. Il fallait que ça sorte.
Contrôle-toi. Respires, et redeviens la brise. Laisse tes émotions s'endormir, apaisée...
Elle se mit à genoux, tremblante. C'était la première fois qu'elle se mettait en colère au point de manquer de perdre pied. Tout cela pour rien, au final. L'affront n'était pas si important, les mots d'Alden n'avaient pas de mauvaises intentions. Ce n'était rien, il ne s'était rien passé.
Si, il était arrivé quelque chose... au Sanctuaire. Il n'était plus le même.

"Vous n'avez rien fait. Expliquez-vous."

Il avait fini par descendre. Elle avait fini par tout lui dire. Il avait soufflé du nez, amusé, et lui avait mit un pichenette sur la tempe. Pendant un instant, il sembla que tout était rentré dans l'ordre. Demain soir, ils fêteraient la victoire. Mais alors qu'il l'étreignait avec passion et que ses bras se refermaient sur elle, elle sentit une boule dans son ventre qui n'avait rien à voir avec le désir.
Akira-sama no baka...
Elle n'oublierait pas que ce soir il s'était résigné. Elle n'oublierait pas ceux qui ne disent rien devant lui pour le défendre alors qu'en son absence ils louent ses qualités comme s'ils avaient peur qu'il entende leur appréciation. Elle n'oublierait pas qu'il n'avait aucun ami, seulement des alliés et des hypocrites. Elle n'oublierait pas que le monde avait eu raison ce soir de son droit. Elle n'oublierait pas l'irrespect dont il n'avait pu se défendre. Elle n'oublierait pas qu'il n'avait qu'elle et sa solitude. Elle n'oublierait pas quel était le prix de la Paix.


Et qu'un jour, ils le payeront tous.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Kikyo ouvrit les yeux. Sa lame ramenée près de son corps, elle s'inclina face au vide avant de la rengainer dans son fourreau.
Voici plusieurs jours qu'elle avait repris l'entrainement et que tout allait pour le mieux. Ses cheveux à nouveau décolorés avaient repoussé, les jours paisibles succédaient aux troubles de l'affaire du Loup Noir et des nouvelles satisfaisantes venaient agrémenter le quotidien : la Muraille de nouveaux aux mains des Hida, Kutsuki en pleine reconstruction, et la visite de Takigawa-dono l'informant du retour de sa sœur ainsi que son frère. Le conflit entre les Kusakari et Kurusu-dono allait se désamorcer de la meilleur des façon, ils s'excuseraient, feraient certainement un geste symbolique comme le veut l'usage, et le tigre apaisé les écouterait. Elle était curieuse, un peu, de connaître l'histoire de cette rancune insoupçonnée. Il entendrait, ils parleraient, elle le savait. Ils se comprendraient, l'aube ne sera pas assombrie par la fierté. Elle avait confiance...

... Jusqu'à ce que l'ombre d'une silhouette s'étire sur la pelouse du jardin, jusqu'à elle, depuis le portail. Lorsqu'elle se tourna, son sang ne fit qu'un tour. Elle fut tentée de dégainer son arme lorsque son regard turquoise croisa les iris océan de cette femme rousse, grande, au front décoré d'un troisième œil. Son uniforme d'officier brillait des médailles qu'elle affichait avec arrogance.
"Kakita, bien le bonjour."
Sa main se crispa. Elle se souvenait de leur dernière rencontre, à Inu-dori, alors qu'on l'avait enchaîné à la tombe de sa mère pour attirer les loups. Comment osait-elle se présenter ici, profitant de la neutralité hingashienne pour s'afficher à la porte de Ten-no-Tsuki ?!
"Salieri sas Varisis.
- Vos camarades se font du souci pour vous, soldat. Tout comme pour votre camarade médicus.
- Fichez-moi le camp."

Les deux femmes se toisaient mutuellement, aucune ne semblait prête à céder à l'autre.
"Ne voulez-vous pas me suivre, Kakita ? Vous devez savoir que les négociations de paix avec Doma sont en cours, tout comme les échanges de prisonniers. Vous pouvez rentrer avec nous."
Rentrer ?! Elle ne se retenait que par respect de la loi hingashienne, et la préservation de la réputation de son fiancé.
"Vous osez venir me dire de vous suivre ? Garlemald n'est pas ma maison, je suis domienne, promise à un seigneur domien, qu'est ce qui vous donne le droit de...?
- Ah, oui, la rumeur a quelque peu accéléré notre action. Comprenez qu'il serait gênant de vous laisser faire, Kakita, bien qu'il s'agisse d'un brillant mariage c'est certain..."

La menace était à peine voilée, le regard de Kikyo se durcit encore plus. Qu'ils essayent seulement d'attenter à la vie de son seigneur. Sans attendre, elle avança le pied droit et posa sa main sur le tsuba de son katana en signe d'avertissement. Salieri demeura droite, une main sur sa hanche, un sourire nonchalant au coin des lèvres.
"Vous n'avez plus aucun droit sur moi, je n'appartient pas à votre nation.
- C'est là que vous faites erreur."

Elle lui tendit alors un document scellé, que la demi-raenne hésita à prendre. La curiosité l'emportant, elle s'en saisit sèchement et posa son regard dessus. Une poignée de longues secondes plus tard, ses yeux s'ouvrirent en grand et elle déchira les papiers avant de les jeter au visage de la garlemaldaise qui ne cachait pas un rictus de satisfaction. Au-dessus de leurs têtes, le ciel commençait à se couvrir.
"Vous n'avez aucune limite, comment pouvez-vous imaginer que je vais marcher dans cette combine ?! Ce document est un faux, vous n'avez fait qu'imiter ma signature !
- Évidemment, Kakita. Nous savons parfaitement que vous ne vous plierez pas face à un faux document. Néanmoins quel intérêt à ce que vous y croyiez ou non du moment que nous avons suffisamment de relations à Kugane pour en faire un contrat on ne peut plus légal, qui fait de vous une femme mariée, et garlemaldaise. Vous serez rapatriée avec les autres garlemaldais détenus par Doma, et rendue à votre époux."

C'en était trop. Cette fois la lame fendit l'air pour rencontrer le canon de bras de l'officier. Au même moment, un éclair fendit le ciel en deux et le tonnerre couvrit le son du métal s'encastrant dans l'armure. Ses yeux brûlaient d'une rage glaciale. Salieri ajouta dans un murmure :
"Ne troublez pas la paix hingashienne, Kakita. Je m'en voudrais que vous ayez des ennuis avec la justice et que cela trouble les échanges entre les différents partis. Vous allez avoir beaucoup à faire, je vais vous laisser."

La femme se détourna, après avoir dévié la lame. Elle tourna les talons et s'en retourna vers le Marché d'Akanegumo d'un pas militaire. Même de dos, on pouvait deviner son sourire triomphant.
Kikyo demeura immobile, même lorsque la pluie commença à tomber. Les poings serrés, elle fixait les morceaux de papiers s'imbiber d'eau jusqu'à devenir illisibles. Elle avait envie de les piétiner, de les brûler, de les leur faire avaler jusqu'à les étouffer dans leurs propres manigances. Méprisables impériaux qui n'avaient de cesse de vouloir briser tous ses efforts pour reconstruire sa vie. Ils voulaient maintenant empêcher son mariage...
Son regard se tourna vers la maison, et la fenêtre du premier étage. Elle avait espéré qu'il n'ai rien entendu par inadvertance, et de toute façon elle devrait le lui dire. Ce mariage n'avait pas encore eu lieu, et n'avait même pas encore de date, qu'il s'en trouvait menacé par des vents contraires.


L'aurore ne viendrait pas tout de suite...
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Ils étaient dans le temple, un peu à l'écart de la fête lorsque les coups de feu retentirent. Ils étaient en train de prier les ancêtres appelés à bénir leur union. Ils portaient chacun l'alliance qui symbolisait leur mariage, de simples anneaux, dans lesquels se reflétaient la lumière des braseros.Ils ne voyaient pas qui venait interrompre leur banquet de mariage, mais ils savaient le danger à venir.
Akira se leva, le plus calme possible, une main sur son katana. Kikyo fit de même, portant la main au daisho posé à son attention sur l'autel pendant la cérémonie. Elle ne pouvait le porter avec sa robe de mariée.
"Ils arrivent, Kikyo.
- Haî."

N'ayant qu'une brève pensée pour leurs invités déjà en train de se battre dans les jardins de la Grue, ils se tournèrent d'un même mouvement vers les ombres qui venaient d'entrer dans le temple.
Ils n'ont décidément aucun respect.



Après quelques minutes de combat, un cinquième assaillant tomba à terre aux pieds du Daimyo du Lotus Blanc dont la lame crépitait d'éclairs violacés éclairant la nuit sombre. Sur le perron du petit temple familial, la robe de mariée n'avait plus rien d'immaculé, tâchée de sang et de poussière au milieu des corps. On entendait toujours les coups de feu au loin, mais leurs alliés semblaient prendre le dessus non sans mal. Elle n'en attendait pas moins d'eux.
Une silhouette se dessina dans l'allée qui menait au cœur du jardin, alors que la plupart des lanternes avaient été éteintes. Kikyo se redressa, son regard se durcit. Enfin, il était venu. Tant de choses lui revinrent en mémoire, de douloureux souvenirs pas si lointain.



"Sors d'ici"

"Ennuyeuse, aussi froide que les glaces d'Ilsabard."




"Même pas fichue d'écarter les cuisses correctement."

"Chiens de domiens."





"T'es bonne qu'à une chose, et encore..."

"T'aurais dû finir en maison de passe."


"Voyez comme je suis charitable, j'en ai fait une femme au moins !"



Tibalt. Ce visage droit, ce sourire pincé, ce regard noisette, des images qui la hantaient toujours même dans les bras de son mari. Elle ne serait jamais toute à lui tant que ce monstre pourrait encore respirer. Pour elle, mais aussi pour toutes celles qui avaient souffert bien plus encore dans l'armée de réserve ; toutes celles de qui Lantis avait pris soin et qui ne s'en remettraient jamais vraiment.
Pitié ? Non, je ne le peux.
Relevant son katana, elle pointa l'homme de sa lame.
"Akira-sama. Laissez-moi celui-ci."
Il se contenta de hocher la tête. Savait-il seulement qui était cet homme ? Si elle ne l'avait pas dit clairement, il devait s'en douter. Peu d'hommes avaient la "prétention" de susciter autant d'émotions sur le visage de la Kakita, en l’occurrence une seule ici : la haine. Elle voulait s'en débarrasser, la faire disparaître avec lui. Il avait fait la dernière erreur de sa vie, celle de venir ici croyant sans doute que d'avoir eu Kikyo Kakita sous ses ordres dans une époque révolue lui attirerait un certain avantage tactique dans cet assaut.
La duelliste posa un genou à terre, en position tate hiza, et ferma les yeux. Une aura blanche se forma autour de son corps.
"Fais pas d'histoires Kikyo. Le commandant veut te rapatrier, alors tu vas gentiment nous suivre."
Quand elle ouvrit les yeux, il ne la vit pas s'élancer vers lui. Le fracas du métal résonna dans l'allée.



Quand les derniers renforts arrivèrent pour transmettre lordre de repli, Tibalt venait de poser un genou à terre après que Kikyo lui ai planté sa lame dans le ventre. Ils semblèrent horrifiés, sans doute leur avait-on fait avaler ces couleuvres sur cette prétendue union entre eux qui justifiait ce "sauvetage forcé". Akira s'apprêta à dégainer, de nouveau, mais deux coups de feu frappèrent les assaillants dans le dos et ils s'écroulèrent. Lantis apparut dans l'allée, pistolet à la main et rapière au côté dans son élégant manteau de couleur sombre pour se fondre dans la nuit. Tibalt se tourna vers lui, un sourire insolent sur les lèvres alors qu'il agonisait.
"C'est drôle, hein Lantis... toujours témoin, jamais acteur. tu peux pas la protéger. Ici elle est à ce sauvage, chez nous elle est ma femme. Tu leur dira quoi quand ils t'auront capturé ?
- Qu'elle était ta veuve."

Sans une once d'émotion, il lui tira dans le bas du dos. Le craquement de la colonne vertébrale précéda son affaissement sur le sol. Le médecin savait où viser, et il n'avait aucune pitié. Mais ce n'était pas à lui de l'achever. Il porta son regard sur Kikyo, puis sur Akira devant qui il s'inclina respectueusement.
"Pardonnez mon intrusion, j'ai jugé préférable de vous présenter mes félicitations à l'abri des regards mais il semble que vos ennemis ont eu la même idée que moi."
Puis il disparut. Kikyo fixait Tibalt, ses mots la firent trembler de rage. Comment osait-il ? Il n'y en avait qu'un, il n'y en aurait jamais qu'un seul à qui elle donnerait tout, à qui elle appartiendrait corps et âme ? Il n'était plus rien maintenant, rien qu'une loque à genoux devant elle comme il l'avait forcée à le faire jadis, croyant que son statut d'occupant et son grade lui donnaient tous les droits, et que la caserne des domiennes enrôlées de force était son terrain de jeux. Tant de soldats, même garlemaldais, avaient détourné les yeux. C'en était terminé. Elle entendit la voix ferme et impérieuse de son mari qui l'encourageait à sa manière.
"Brisez vos chaînes."
S'avançant vers lui elle prononça ces mots : "Tu n'existes pas."
Murasaki arriva la première pour voir la tête du sous-officier rouler sur le sol. Ce banquet de sang était achevé.



Cette nuit là, Kikyo se perdit dans les bras de son mari, enfin libérée de ses chaînes. Elle n'était pas une femme violente, ni sanglante, pourtant son propre mariage avait été souillé par le sang. Sa robe serait purifiée par le feu, afin d'écarter toute malédiction des kamis, et nul ne pourrait dire ouvertement qu'il s'agissait de garlmaldais à cause des négociations de paix en cours. Leurs assaillants s'étaient d'ailleurs bien gardé de porter un quelconque insigne impérial lors de leur infiltration. Pas de preuves, pas de plainte.
Remontant le drap sur eux, elle eut un frisson. Était-elle devenue un monstre elle aussi ? Un regard du tigre dissipa ses doutes. Elle ne saurait devenir sa femme dans le faste, la musique et tout ce cérémoniel. Elle était sa première lame, et c'est dans le sang de ses ennemis qu'elle deviendrait sa femme.


L'aurore est proche.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Nos histoires semblent proches, et à la fois inversées."
A la lumière des braseros, elle s'attarda sur le visage pâle de cette raenne qui dans son silence partageait tant. Écoutant ses confessions, elle se répétait cette question : pourquoi n'avons-nous jamais parlé jusque là ? Parce qu'elle sort peu, parce qu'elle quitte rarement le Nid, parce qu'elle-même était toujours accompagnée lorsqu'elles se sont croisées. Deux femmes aux histoires similaires, chacune se trouvait maintenant dans une position originellement destinée à l'autre. Là où l'héritière s'était retrouvée parias, la bâtarde avait épousé un seigneur, deux destinées qui se croisent sans pour autant se toucher.
Mais un regard suffisait pour cet échange, quelques mots parfois, et le silence contemplatif face à la mer d'émeraude sous le crépuscule.

Après avoir pris congé de Shinobu, Kikyo déambula longuement dans les rues désertes de Shirogane. La chaleur étouffante de ce début d'été avait conduit bon nombre de riverains à se réfugier dans les maisons y quérir un peu de fraîcheur. Le bon sens voudrait qu'elle rentre elle aussi à Ten no Tsuki retrouver foyer et mari. Elle n'était pas pressée, plongée dans ses songes. Elle pensait à Lantis, à Shinobu, à ce rêve...

Un plafond de verre que soutiennent quatre colonnes...

Elle passa devant la maison sans s'arrêter. Les lumières allumées, les servantes encore là. Elle pris la direction de la cascade d'un pas lent et mécanique. Akio, couché devant le portail pour guetter son retour, la vit arriver de loin et se leva pour la suivre. Il n'y avait pas un souffle d'air, pas un seul. La bruine rafraichissante à proximité de la chute d'eau lui arracha un soupir d'aise spontané. Elle se laissa tomber à genoux sur l'herbe, la nuque en sueur, par les Kamis que l'été pouvait être rude parfois.
"Je me demande ce que j'aurais choisi à sa place..."
Un mince sourire se dessina quelques secondes sur ses lèvres, songeant qu'Akira lui avait déjà posé la question. Aurait-elle choisi son devoir, ou Akira ? Question idiote, puisqu'elle ne l'avait jamais choisi. Il l'avait choisie, et elle l'avait aimé, tout fut si simple et savamment préparé. Shinobu-san avait-elle mal préparé, pas eu le choix, autre chose qui l'aurait empêché d'allier son rang à ses choix ? Tout n'est pas si simple, tout est codifié, tout n'est qu'honneur et devoir, même la vertu. Cette femme semblait pourtant avoir murement pensé ses choix, et préparé ses gestes. Elle avait pu voir dans ses manières une précision millimétrée qui devait se valoir autant en combat qu'en société. Une femme si bien éduquée et de si haute naissance dans un clan assez riche pour posséder son propre village... Elle aurait dû pouvoir suivre sa destinée. Tout comme elle-même aurait dû rester dans l'ombre du secret, et ne jamais paraître publiquement aux côtés de son demi-frère. Les kamis sont facétieux.
Seigneur, parias... que sont ces mots quand les actes parlent ? Quand les esprits suivent la morale ? Elles avaient si peu parlé et pourtant elle aurait pu rester des heures assiste à quelques pas de cette femme en toute confiance. Même sans mot dire.
"Tant de noblesse, tant de gens de valeurs qui se détournent les uns des autres pour une question de fierté."
Elle ferma les yeux, songeant à tous ces destins croisés.

La tête du loup blanc vint soulever son bras alors qu'il se couchait à ses côtés. Son visage comme le devant de son kimono étaient mouillés, le tissus collait à sa peau dans une agréable fraîcheur. Elle se sentait bien, en cet instant.




Il était minuit passé lorsqu'elle regagna le lit conjugal. La chaleur étouffante n'était plus une souffrance quand les bras du tigre se refermèrent sur elle, il était inutile de chercher le sommeil. Les heures passant, l'air frais finit par pénétrer la chambre et soulever les tentures entourant leurs draps.
Lorsqu'il s'endormit enfin, elle se redressa, ses boucles tombant devant son visage et ses épaules ; elle les écarta pour l'observer.

Je n'étais pas destinée à me trouver ici, mais vous n'en faites qu'à votre tête, watashi no tora.

Il ne lâchait pas sa taille, possessif et dominateur même dans son sommeil, ce visage impérieux et pourtant si doux. Cet homme à qui rien ne résiste, excepté ceux qui pensent avoir à lui tenir tête sans raison, à quoi pouvait-il bien rêver ?
A ce qu'il avait accompli, remporté, perdu, manqué, à son avenir, à elle peut-être ? Ou bien... à lui ?

Cet enfant debout face à la plaine de Yanxia, aux longs cheveux noir qui se tient près de lui. Elle l'avait vu en rêve, en était-ce un ? Le nœud du Destin qui se met en place, et qu'elle devra protéger.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Les kamis soient remerciés pour cette bénédiction."
Elle n'avait pu s'empêcher d'ouvrir en grand les portes du relai lorsqu'elle avait aperçu, au réveil depuis sa chambre, les rayons du soleil se refléter sur la Mer de Rothano. Après avoir enfilé son kimono, elle était sortie dans le jardin et assise sur le rebord de la fontaine. Si le sourire de Kurusu-tsubone n'apparaissait jamais sur ses lèvres, il se trouvait dans son regard serein.
Quel bel été.
Les affaires prospéraient, Doma en paix fêtant le retour des otages, ils pouvaient profiter de cette accalmie et comble de fierté cette douce saison s'accompagnait de l'annonce officielle concernant l'héritier à venir pour le Lotus Blanc.

"Madame, nous avons posé le lustre.
- Ah, excellent. Qu'en est-il de l'infirmerie ?
- Elle est opérationnelle madame, j'ai vu l'ingénieur tout à l'heure.
- Merci. Vous êtes ici depuis longtemps ?"

Le vitrier serrait sa casquette dans ses mains, déconcerté par la question. Avait-il baillé sans s'en rendre compte ? Avait-il des cernes ? Croisant le regard de la demi-raenne il répondit d'un sourire gêné :
"Cinq heures du matin madame. Je voulais terminer vos vitraux avant qu'il ne fasse trop chaud.
- Vous avez eu raison, rentrez donc chez vous profiter de votre journée. Nous avons terminé l'essentiel. Dites aux autres qu'ils peuvent s'en aller aussi."

Le hyur ne cacha pas sa joie, un large sourire éclaira son visage avant qu'il ne s'incline.
"Vous êtes bien bonne madame, soyez-en remerciée !"
Il fila sans plus de cérémonies, une minute plus tard des exclamations de joie s'échappèrent par la grande porte d'entrée. Kikyo resta assise au soleil, un souffle d'amusement sur les lèvres.
Il serait dommage de ne pas en profiter.

Akio aussi semblait vouloir profiter de l'air limséen, étendu sous un arbre la truffe au vent. Il tourna la tête lorsque tous les ouvriers quittèrent les lieux non, sans oublier de saluer la jeune femme assise sur le bord de la fontaine, et se leva pour trottiner vers elle. Kikyo entoura son encolure des ses bras afin de l'inviter à poser sa tête sur ses genoux.
"Nous n'avions jamais pensé vivre ainsi, n'est ce pas mon doux ami."
Il répondit d'un coup de langue sur le bout de ses doigts. En cet instant le hanyo aurait ressemblé à n'importe quel chien domestique affectueux et joueur s'il n'avait eu la taille d'un cheval. Kikyo enfouit son visage dans sa fourrure, soufflant un soupir apaisé.
"Tu penses que je devrais voir plus de monde ?"
Il pencha la tête, elle le regarda dans les yeux.
"cela fait trois fois que Akira-sama me demande si je ne suis pas trop seule, et si je sors assez. Je ne sais pas s'il s'inquiète pour moi ou si je devrais me montrer plus sociable pour l'image du clan."
La tête du loup blanc glissa de ses cuisses jusqu'au sol. Il s'allongea à ses pieds, les yeux levés vers elle avec une grande attention.
"J'aimerai... que notre enfant connaisse autre chose. Je veux qu'il connaisse d'autres amitiés que celles que la politique apporte. C'est pour ça que je ne fais pas diplomatie tu comprends ? Je me fiche que l'Alliance Emeraude soit notre seul appui politique. Je ne me sens pas d'aller à la rencontre des autres, je..."
Plus elle parlait, plus elle se rendait compte qu'elle se cherchait surtout un prétexte pour ne pas aller vers les gens. Elle soupira, déçue par sa propre personne.
"J'ai choisi cette vie. Je savais ce que je faisais lorsque je lui ai dit "oui" la première puis la seconde fois."
Le loup n'avait pas bougé, visiblement elle s'en sortait très bien toute seule pour réfléchir. Pour elle qui ne parlait à personne, converser seule avec son compagnon était sans doute le seul moyen d'avoir un échange constructif.
"... Donc toi aussi tu penses que je devrais voir plus de monde ?"
Akio se contenta d'un mouvement de tête, les pattes avant croisées devant lui. S'il n'avait été un loup on aurait pu croire qu'il souriait d'un air amusé.


"On dirait que je vais devoir apprendre cela aussi."
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Voici mes ordres."
Elle ouvrit les yeux, s'éveillant seule pour la première fois depuis longtemps. Le silence de ces grands appartements répondait aux pas des employés du relais qui s'activaient dans les couloirs. La soirée de la veille avait été un franc succès mais il fallait à présent tout nettoyer pour le réveil des clients restés dormir. Tout le monde s'activait, elle devait se lever aussi. Elle savait ce qu'elle avait à faire, mais ne savait pas encore comment.


"Tu sauras."



Akio, couché devant la porte, avait levé la tête pour croisé son regard. Kikyo fronça les sourcils et hocha la tête.
"Oui, je saurais."




"Madame, voici les rapports d'hier soir.
- Bien, mettez-les sur mon bureau."



"Kurusu-tsubone, un responsable des docks s'est présenté à Ten no Tsuki.
- Dites-lui que Kurusu-dono est absent cette semaine.
- Nous l'avons fais, mais c'est vous qu'il demande à voir. Il s'agirait d'une affaire urgente, un changement de transport pour la prochaine caravane...
- ... Très bien, dites-lui de passer cet après-midi.
- Hai."



"Je vous apporte l'ordre de mission de Byakuya. Il est partit ce matin avec son équipe pour Namai.
- Quand rentre t-il ?
- Il n'a pas donné de date, mais il a dit qu'il ne reviendrait pas sans la miqo'te.
- Dites à Arthurin de lui faire parvenir des vivres à Kugane."



"Où est Flare ?
- Elle est sortie, madame. Mais elle a dit que son équipe était quasiment formée.
- Excellent, prévenez-moi quand elle sera de retour."



"Votre médecin est arrivé.
- Faites-la monter."




Midi sonna enfin. Kikyo s'enfonça dans le dossier de sa chaise, les mains sur son visage. On n'entendait que le cliquetis de l'horloge dans le grand bureau. Elle ne cessait de repenser à la veille, les ordres de son époux revenant sans cesse à son esprit. Il lui faisait confiance, il le lui avait redit juste avant de partir pour le Nord. Elle avait une tâche importante à accomplir, et ce bien qu'elle se soit jurée... bien qu'elle déteste la politique.
Il avait fait ce choix, un choix précis et calculé soutenu par ses hommes... et par elle aussi après coup. Comme toujours, il agissait froidement comme si ce qu'il s'apprêtait à faire n'aurait aucun impact.
"... Il sait au contraire, l'impact que cela aura. C'est pour cela qu'il le fait justement."
Elle fronça les sourcils, croisant ses mains sur le bureau. Les souvenirs de son expérience dans les cavernes sous-marines avec Alden et ses compagnons pour récupérer le Byakuren lui revinrent à leur tour. Elle revit la tempête électrique, la violence... cette puissance indomptable. Sans parler des semaines qui avaient suivi où Akira-sama avait bien failli y laisser la vie en tentant de le dominer. Si cette arme s'éveillait en de mauvaises mains, cela pourrait provoquer de gros dégâts... mais cette arme dans des mains légitimes pourrait changer bien des choses à l'échelle de tout un clan. Elle revit les visages de Murasaki et de Haku, leur détermination, celle de son époux... elle souffla pour se détendre.
"Oui... ils n'ont pas besoin de ça, eux. Ils reviendront une fois leur mission accomplie, à moi de remplir la mienne."

Comme un signe du destin, devant elle se trouvait à présent une feuille de parchemin vierge. Elle poussa un long soupir.


Elle entendit le grand loup blanc se lever dans le couloir quelques instants avant qu'on ne frappe à la porte.
"Entrez."
Une hyuroise en tenue de majordome apparut dans l'encadrement de la cloison en papier, un plateau à la main.
"Madame, L'kihi est en train de faire les chambres. Elle m'a demandé de vous apporter votre repas.
- Merci, Marinche. Tenez, prenez ceci je vous prie."

Elle lui tendit une enveloppe scellée de son cachet personnel, une grue au cœur d'une fleur de lotus.



"Faites porter ceci au Nid du Serpent. Qu'il soit remit en mains propre à Hagane-dono."

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