Les aventures aventureuses d'une aventurière exploratrice
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Les aventures aventureuses d'une aventurière exploratrice
Liann
Il y a 2 mois et 3 semaines
Liann, la main-du-pot
La jeune mage bleue venait d'entreprendre sa première recherche pour approfondir sa magie.
La Magie Bleue est une magie d’imitation, d’assimilation des compétences et des caractéristiques d’un sujet étudié. Certains mages bleus avaient même la capacité innée d’apprendre et d'améliorer leurs techniques par des voies moins évidentes.
On imagine souvent que la seule façon d’apprendre est de voir son sujet utiliser la compétence ou le talent recherché en plein combat. Mais rapidement, Liann fut rassurée de voir qu’on pouvait tout aussi bien parier contre un Namazu pour qu’il nous enseigne. Elle s’était même surprise elle-même en réalisant que le contexte apportait toute une dimension différente. Elle ne maîtrisa pas le lancer de bombe gobeline avant d’avoir entamé son bestiaire, dont la première page traitait justement de ces derniers. Tout un contexte qui lui permettait de comprendre comment et pourquoi les gobelins avaient fait de cette bombe leur talent martial principal : des mineurs et artisans en conflit avec eux-mêmes.
Parfois, il était plus compliqué de chercher un contexte. Difficile de savoir pourquoi la chauve-souris aimait sucer le sang de sa victime, si ce n’est, comme la compétence le permet, pour voler son éther. Mais en quoi en avait-elle besoin ? Pour Liann, c’était une manière rapide, pour un si petit être, d’empêcher un prédateur de nuire ; à défaut de le blesser mortellement, elle le fatiguait "de l’intérieur". Ou bien, préférant la chair fraîche, elles avaient développé un moyen efficace d’immobiliser une proie en groupe pour la croquer encore vivante.
Chaque recherche contextuelle permettait de déclencher un déclic supplémentaire, et ça, elle avait fini par le comprendre. Elle qui avait commencé son apprentissage pour étudier les bêtes, fut agréablement surprise de réaliser qu’elle allait devoir s’intéresser aussi aux peuples concernés. Et cette fois-ci, elle voulait se prouver une autre théorie.
Sa journée commença par une simple question. Étant cousins des Gobelins, elle était persuadée que les Mobelins avaient développé, à l’image de la faune et de la flore en général, une capacité similaire à celle du lancer de bombe. Au départ, elle s’attendait à ce qu’on lui réponde tout simplement qu’ils maîtrisaient eux aussi la même compétence, mais un coup d'œil rapide révéla à l'œil aguerri de Liann que leur culture était différente. Peut-être que leur compétence martiale l’était tout autant ?
Lorsqu'elle s’approcha du chef du village et lui expliqua sa situation, il fut tout de suite intéressé par l’idée. Peut-être espérait-il exploiter la jeune mage bleue, mais sans trop réaliser à quel moment de la conversation elle accepta, elle se retrouva aussitôt contractuellement nommée main-du-pot. Et tout aussi subitement, elle se retrouva avec un seau et une pelle dans les mains.
La première tâche que Tarnotik lui assigna était relativement simple, mais cruciale pour la suite. Équipée de son seau en métal et de sa pelle usée, elle devait se rendre à la rivière pour identifier le meilleur filon d’argile. Sous un soleil écrasant, elle s’aventura dans le lit boueux de la rivière, cherchant du regard la teinte de l’argile de qualité, qu’elle ne savait pas encore reconnaître...
Elle passa de longues minutes à patauger dans la glaise, ses pieds s’enfonçant à chaque pas, tout en évitant les rares créatures sauvages qui s'approchaient pour s'abreuver. À chaque mouvement, elle sentait la fraîcheur de la boue glisser entre ses orteils, contrastant avec la chaleur du soleil levant. Parfois, elle s’arrêtait pour observer les poissons frétillants dans l’eau claire ou les oiseaux qui se posaient brièvement pour boire avant de s'envoler à nouveau.
Finalement, après avoir sondé plusieurs endroits et étudié la texture de la terre avec soin, elle trouva l’argile tant recherchée. Satisfaite, elle remplit son seau jusqu'au bord et retourna vers le village. Lorsqu’elle revint, les bras lourds et le souffle court, elle se dirigea directement vers Tarnotik, espérant au moins un encouragement. Cependant, sans même un mot de félicitation ni un regard de gratitude, il lui indiqua froidement sa prochaine étape, comme si ce qu’elle venait d’accomplir n’était qu’une banalité.
Déçue, mais déterminée à prouver sa valeur, elle se redressa, serra les dents, et se prépara à affronter le prochain défi.
La mission suivante que Liann reçut fut bien plus complexe et périlleuse. Cette fois, elle devait retrouver deux cristaux : un cristal de feu et un cristal de vent, cachés dans un recoin particulier de la rivière, connu pour ses courants traîtres et ses récifs, où des bateaux s'étaient souvent échoués.
Elle se prépara avec soin, rassemblant tout l’équipement nécessaire. Elle s’avança prudemment dans l’eau glacée, sentant le courant menacer de l'emporter. À mesure qu'elle s'enfonçait dans la rivière, le clapotis des vagues contre les épaves éparpillées résonnait dans le silence. Elle aperçut plusieurs carcasses de radeaux brisés, vestiges d’accidents passés, éparpillés çà et là. Les coques éventrées gisaient dans l'eau, abritant d'anciennes cargaisons oubliées.
Liann savait que ces cristaux étaient souvent utilisés pour leurs réactions variées. Et si le chef du village lui avait demandé de venir ici, ils devaient donc se trouver parmi les trésors engloutis. Contre toute raison donnée par sa claustrophobie, elle plongea sous l’eau, fouillant parmi les restes des navires naufragés. Des morceaux de bois flottaient autour d'elle, créant une atmosphère étrange et inquiétante. La lumière du soleil perçait faiblement la surface de l'eau, illuminant partiellement les profondeurs de la rive. Elle savait qu’elle n’avait pas envie de découvrir ce qu’il y avait au-delà des hauts-fonds.
Elle chercha pendant ce qui lui sembla être des heures, explorant chaque recoin sombre, chaque épave, et chaque ancien coffre éventré. Son cœur battait fort, partagé entre la peur et l'excitation de découvrir les cristaux. Puis, sous une planche de bois à moitié submergée, elle aperçut une lueur rougeoyante. Elle tendit la main et toucha un cristal de feu, dont la chaleur étrange se diffusait même à travers l’eau froide. Liann l’attrapa et le rangea précautionneusement dans son sac. Ensuite, elle chercha le cristal de vent, qui ne devait pas se trouver bien loin.
De retour au village, les cristaux en main, elle espérait cette fois recevoir un mot d’encouragement ou une reconnaissance pour ses efforts. Cependant, tout comme la fois précédente, le chef du village la regarda à peine avant de lui désigner sa prochaine tâche.
Avec l'argile et les cristaux désormais en sa possession, elle se vit confier une nouvelle mission : fabriquer sa propre bombe fumigène. Cette tâche nécessitait non seulement de la précision, mais aussi la connaissance des éléments et la maîtrise de plusieurs compétences artisanales.
Elle commença par allumer le four près de son espace de travail. Elle prit ensuite l’argile qu’elle avait collectée plus tôt et la pétrit longuement, sentant la texture douce et malléable entre ses doigts. Elle commençait déjà à faire le lien avec la formation d’une bombe en éther. Une fois l'argile bien travaillée, elle la modela en un petit pot, suffisamment solide pour contenir les ingrédients tout en étant fragile pour se briser facilement à l’impact.
Pendant que l’argile séchait, elle se concentra sur les cristaux. Elle s’assit à un établi et plaça le petit cristal de feu devant elle. Avec un pilon, elle commença à le broyer avec précaution. Chaque coup donnait naissance à une poudre fine et rougeâtre qui dégageait une légère chaleur. Ensuite, elle fit de même avec le cristal de vent, le réduisant en une poudre verte et légère.
Une fois les cristaux réduits en poudre, Liann les mélangea à des herbes sèches fournies par Tarnotik. Ces herbes, connues pour leurs propriétés volatiles, étaient essentielles à la création de la fumée. Ce qu’elle ignorait, c’est qu’elle venait d’éviter une session de plongée ; un aventurier les avait déjà récupérées… Elle prit soin de bien mélanger les poudres colorées aux herbes, créant un mélange chatoyant qui semblait presque vivant. Ce mélange dégageait une odeur unique, une combinaison de braise soufflée par le vent et de végétation séchée, lui rappelant un feu de bois après ses miqo’brochettes.
Ensuite, elle retourna à l’argile, qui avait séché juste assez pour être manipulée sans se déformer. Avec précaution, elle remplit la sphère d’argile du mélange de cristaux et d’herbes, puis scella l'ouverture avec un peu plus d'argile humide, veillant à ce que la bombe soit bien fermée. Elle la plaça ensuite dans le four. L’argile devait cuire juste assez pour durcir, mais pas au point de se fissurer, car les cristaux de feu commençaient à se charger, et à l’air libre, ce serait le début d’une catastrophe. Elle surveilla attentivement le four, ajustant la température en ajoutant ou en retirant des braises.
Après un certain temps, elle retira la bombe fumigène du four avec précaution et la déposa sur une pierre plate pour qu’elle refroidisse. L'argile avait pris une teinte plus sombre, signe qu'elle était bien cuite. Elle observa sa création avec satisfaction, oubliant complètement pourquoi elle l’avait fabriquée.
Avec sa bombe fumigène prête, elle retourna voir le chef du village, l’esprit empli d’appréhension mais aussi de fierté. Elle espérait que cette fois-ci, ses efforts seraient reconnus. Pourtant, comme toujours, le chef resta impassible…
Liann s’éloigna nerveusement vers la rivière, la bombe fumigène à la main. Alors qu'elle contemplait l'objet de son labeur, les enseignements de sa quête prirent soudainement tout leur sens.
Comprendre cette technique n'était pas seulement une question de reproduire les étapes de la fabrication, mais de saisir l'essence même du lancer de bombe. Ca, elle l’avait deviné la première fois: Les gobelins ne comptaient pas uniquement sur la puissance brute de leurs explosifs ; ils utilisaient également leur énergie, leur éther, pour amplifier l'effet de la bombe, exploitant ainsi le potentiel de chaque composant.
En fabriquant elle-même la bombe, elle avait compris que le véritable pouvoir résidait dans l'équilibre entre les éléments : la chaleur intense du cristal de feu et la légèreté imprévisible du cristal de vent, unissant leurs forces dans une explosion contrôlée. Ce n’était pas seulement la force physique ou la technique, mais l’art de l’éther qui rendait les gobelins si redoutables.
Inspirée, l'apprentie mage bleu se prépara à canaliser son éther pour recréer l’essence du lancer de bombe. Elle ferma les yeux, se concentrant sur le souvenir imaginé de la chaleur brûlante et de la brise tourbillonnante, imaginant la combinaison des éléments se fondre en une seule force puissante. Elle sentait l’énergie circuler en elle, se modelant à l’image de ce qu’elle avait appris, prête à jaillir de ses mains. Les petits cristaux bleus virevoltaient autour d’elle, comme un catalogue de sortilèges appris, elle les observait tournoyer, quand l’un d’entre eux lui sembla différent.
Elle sentit l'énergie crépiter dans l'air autour d'elle, lança sa main derrière elle, et une sphère noire se forma, tourbillonnant avec une lueur rougeâtre et blanche clignotante comme une explosion qui ne demandait qu’à sortir. En un instant, elle projeta la sphère devant elle, et celle-ci explosa en un nuage de fumée épaisse, exactement comme une bombe gobeline, mais différente.
Liann sourit, satisfaite.
Elle avait réussi non seulement à comprendre la technique, mais à l’adapter à sa propre magie.
Finalement, elle avait prouvé que la magie bleue ne se limitait pas à la simple imitation. Elle pouvait saisir l’essence d’une technique et l’intégrer à ses propres talents, créant quelque chose de nouveau sur une base existante. En se redressant, elle savait qu’elle avait franchi une nouvelle étape dans son apprentissage, prête à découvrir les secrets du monde et à enrichir encore plus son répertoire.
“Plume-Azure”, murmura-t-elle fièrement.