[Kikyo] IV - Vers l'Infini et on Verra

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Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Depuis le premier jour, je vous ai aimé ! Sans condition, sans limite, un amour ardent ! mais vous êtiez déjà éprise d'un autre... ! "
Le coup violent du poing de Gualeb contre sa lance fit trembler le métal. En une dizaine de lunes, le hyur avait pris énormément de masse musculaire. Kikyo n'avait pas cillé bien qu'à cette déclaration, ses yeux s'ouvrirent un peu plus. Les souvenirs de ce jeune homme impétueux qui recherchait l'attention et la reconnaissance au travers d'actes insensés traversa son esprit. Elle n'avait jamais compris les sentiments qu'il éprouvait à son égard ; elle n'avait jamais vu que son véritable potentiel, ce dont il était capable s'il se sortait de ce gouffre de désespoir où il s'était plongé.
"J'ai essayé de gagner votre confiance, votre estime, votre respecte... mais là encore j'ai échoué !
- Je t'ai enseigné à voir par tes propres yeux au lieu de suivre le sens du vent, je t'ai enseigné l'ambition et la discipline, comment peux-tu dire que je n'ai eu aucune estime pour toi ?"

Il frappait toujours plus fort, ce combat n'avait rien d'un duel. Il vidait son coeur et son esprit, et elle lui rendait ses coups sans chercher à l'interrompre. Il s'était endurci, il avait changé de voie, de vie, d'entourage. Elle ne le connaissait plus. Plus il parlait, plus il frappait, et plus les souvenirs de cet autre garçon disparaissait de sa mémoire. Qui était cet homme ?
"Vous avez vu ce que vous vouliez voir !
- C'est parce que tu es mort que j'avais vu juste."

Le temps qui passe est immuable, mais sous sa main rien ne demeure intact.




"Trois ans déjà."
Combien de temps s'était écoulé depuis son retour du front, ils n'avaient pas pris de temps pour "eux" depuis des semaines, des lunes peut-être ; tant à penser et tant à préparer. Kimiko aurait trois ans cette année, et trois années qu'ils étaient mariés, le temps passe immuable et pourtant il semble que sur certaines choses il passe plus vite, quand l'attente est bien longue ailleurs.
"Mon désir n'a pas changé. Il y a quelque chose en vous femme, qui me fait perdre toute raison.
- Un instant qui se répète, devient l'éternité. Il est toujours le même ce soir que depuis le premier soir où nous sommes allé au onsen ensemble, il se répète chaque fois que vous passez la porte de notre chambre."

Le froid mordant du Coerthas donnait l'impression d'une eau plus chaude qu'elle ne l'était réellement. La neige tombait en continu au-dessus du quartier d'Azurée, et dans ce petit bassin ouvert à l'écart de la piscine principale où un couple d'orientaux avait fini par tourner son regard l'un vers l'autre.

Trois années, trois enfants, tant de choses depuis qu'elle s'était avancée dans l'allée principale du Palais de la Grue, traversant les jardins fleuris pour rejoindre son époux sous le regard de leurs ancêtres. Un mariage violent, sanglant, à l'image d'une grande partie de leur vie. La neige tâchée de sang lors des éxécutions au Monzen sous les yeux d'un enfant à qui on interdisait de détourner le regard afin de le préparer au monde qui l'attendait ; la neige de l'autre côté des barrières qu'une enfant contemplait, les pieds dans la terre battue d'un camp de prisonniers surpeuplé, elle s'imaginait alors libre d'aller s'y jeter. Ce soir la neige tombait sur eux, effacée avant de les atteindre par la chaleur et la vapeur d'eau.

Le temps avait marqué son corps de cicatrices, son oeil, chaque parcelle de son corps qu'elle avait vu meurtri par les combats. Elle n'était pas en reste bien qu'elle fasse de son mieux pour que sa féminité n'en soit pas affectée. Le temps marquait leur chair, leurs esprits aussi quand les horreurs en ce monde ne cessaient de s'accumuler, chaque fois plus difficile lorsqu'ils devaient la contempler sans faiblir. Le temps marquait ce monde, ne serait-ce qu'avec les années qui s'écoulent et l'âge qui les ratrapperait un jour puissent-ils vivrent assez longtemps pour le voir venir. Le temps, toujours vainqueur dans cette guerre car il passe qu'importe les barrières et les prières, venant à bout de tout et surtout de ceux qui se croient plus fort, le défiant chaque fois qu'ils emploient les mots "toujours" et "jamais". Des paroles puissantes mais presque jamais respectées. Des paroles qu'elle se gardait bien de prononcer, si ce n'est dans un instant comme celui-ci.

La faible lumière des flambeaux n'égalait celle qui habitait le regard du tigre silencieux face au glacier qui s'embrasait dans ses bras. Elle oubliait tout, pour la première fois depuis des semaines, elle ne pensait plus à rien. S'était-elle inquiété de ce qu'il prenne du repos quand elle-même ne s'accordait aucun répits.
La flamme vacilla sous un coup de vent, disparaissant quelques secondes lorsque leurs lèvres se touchèrent enfin. Les derniers ishgardais profitant des bains et du sauna n'y accordèrent qu'un regard détaché en quittant les lieux. En ce monde, qu'est ce qu'un baiser après tout ? On en donne aussi facilement que l'on distribue son amitié, on en reçoit sans l'avoir demandé, on l'use comme preuve ou comme outil, parfois comme argument, qu'est ce qu'un baiser finalement. Kikyo se souvenait pourtant de chacun d'eux, depuis le premier à peine caressé un soir de promesse, le second bien des jours après l'annonce de Sanjuro-nii-sama, et tous ceux qui suivirent et ne furent jamais partagés sans raison, sans passion, sans une histoire qui le définisse et chacune de ces petites histoires avaient construit la leur, celle qui n'appartenait qu'à eux. Le temps qui passe les avait forgé, avant et après qu'ils se soient trouvé, mais ils se retrouvaient toujours de la même façon, dans ce même regard, cette même flamme ravivée au moindre contact, un instant qui se répète et devient l'éternité, donnant un sens à cette promesse si souvent faite dans le vent mais qui pour eux avait réellement un sens.


Eien ni... Aishiteru yo.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Dans les couloirs de l'Escale de Llymlaen ce matin là, le personnel était en pleine effervescence. Il ne s'agissait plus de faire charger des caisses de vivres et de matériel à bord de l'Eternal, mais les premiers effets personnels des membres de la compagnie qui allaient aujourd'hui retourner à Keanu où le campement "longue durée" prenait corps. Devant la porte des quartiers du capitaine et de sa famille, près de la malle habituelle de cette dernière, une malle plus petite et mal fermée débordait de peluches. Quentin la saisit avec précaution, le jeune homme savait ô combien ce chargement-ci était précieux. Dans le couloir il croisa L'kihi qui montait à petites foulées.
"Ils sont debout ? Demanda-t-elle pleine d'espoir.
- Je ne crois pas, un problème ?
- Du courrier, urgent. Il faut que je lui remette avant qu'ils partent."

Quentin se mordit la lèvre avec amusement, voyant sa collègue se tenir debout devant la porte, hésitant à frapper. Ils étaient encore rentrés tard la nuit dernière et des quelques bribes perçues pendant qu'elle passait le balais, monsieur Kurusu avait encore provoqué l'émoi en fin de soirée dans une auberge. Et s'ils s'étaient encore disputés ? Le courrant d'air silencieux d'un Ivanhault passant simplement dans son dos pour descendre rejoindre la table du petit déjeuner la fit se tendre un peu plus. Mais une domestique digne de ce nom ne se laisse pas arrêter par de petites angoisses matinales, ça non. Prenant son courage à deux mains, la miqo'te leva le poing et donna trois petits coups secs sur la porte.
"Qui est-ce ? répondit une voix masculine impérieuse.
- L'kihi, monsieur. Du courrier urgent pour le capitaine."
S'ensuivit un silence que la miqo'te perçut comme mauvais signe, avant d'entendre un bruit de pas et une première porte s'ouvrir de l'autre côté de celle-ci. Quelqu'un venait de sortir des appartements privés pour traverser le bureau et se diriger vers elle. Le verrou fut débloqué et la porte s'ouvrit d'abord sur un rayon de soleil matinal qui l'éblouit un instant avant qu'apparaisse la silhouette d'une Kikyo encore un peu ensomeillée, tenant fermé d'une main le yukata gris qu'elle avait sans doute pris pour le sien au lever.
"Montrez-moi." Dit-elle, le plus impassiblement du monde.
L'kihi lui tendit la lettre cachetée dont Kikyo reconnut instantanément l'emblème de Sharlayan.
"Qu'est ce que... Merci L'kihi. Le chargement de nos effets personnels a t-il commencé ?
- Il est presque terminé madame, il n'est pas loin de dix heures du matin."

Il y eut un nouveau silence, Kikyo se redressa semblant prendre conscience de l'heure avancée de la matinée. L'kihi allait parler de nouveau mais l'ombre d'Akira Kurusu se dressa dans l'embrasure de la porte. Son regard sévère paraissait aujourd'hui moins sévère, chose inhabituelle il entoura d'un bras la taille de son épouse dont le yukata trop grand lui tombait à présent sur les épaules, dévoilant sur sa nuque les premières courbes colorées d'un tatouage récent. Il s'adressa à la domestique.
"Nous descendons sous peu."
La porte se ferma presque aussitôt, laissant L'kihi interdite jusqu'à ce que Quentin passe à nouveau dans le couloir chercher l'autre malle.
"Alors, comment c'était ?
- Rah je t'en pose des questions ?!"




De l'autre côté de la porte, Kikyo retourna près de son bureau le courrier en main, laissant au passage tomber le yukata de son mari sur le sol, le tenir en place n'était plus sa priorité. Akira eut tout le loisir d'apprécier à nouveau, sous sa chevelure relevée par une épingle en bois, l'élégante carpe koï aux reflets d'argent remonter le long de son dos le courant d'une rivière parsemée de quelques nénuphars et fleurs de lotus, dont la courbe s'alignait à celle de ses hanches. Comme pour narguer son regard, le tatouage ne finissait pas au creux de ses reins mais sur son flanc droit jusqu'à la naissance de sa cuisse, à la fois frustrant et aguicheur. Ainsi, lui seul serait en droit de contempler le tableau dans son entièreté, une manoeuvre digne de son épouse.
L'enveloppe eut tôt fait d'être ouverte, Kikyo s'intéressait moins à l'appétit du tigre qu'à ce courrier, en tout cas pour l'instant. Ses yeux d'azur parcourrurent les quelques lignes écrites sur un papier de qualité.
"Incroyable...
- Qu'est-ce ?
- Valentinault Dandelion, le fils de Mac Coff. C'est un des jeunes prodiges de l'académie de musique de Sharlayan. Apparemment, Nashasha est parvenue à lui remettre ce qu'il pense être les derniers mots de son père."

Elle continua de lire, marchant à travers la pièce. La lumière colorée des vitraux donnait l'impression que la carpe dans son dos changeait elle aussi de couleur. Un léger sourire, de ceux qu'elle gardait pour les meilleurs souvenirs, se dessina sur ses lèvres.
"Nous avons un soutient de plus dans la cité.
- Un musicien ?
- D'une famille connu et d'une certaine influence. Quoi qu'il en soit, un soutient est un soutient, chose rare quand il s'agit des sharlayanais. Rapporter le livre nous vaudra un plus grand intérêt, sans parler de tous les efforts conjoints d'Ivanhault et Silius qui multiplient les rapports sur nous."

Akira ne répondit rien, se contentant de croiser les bras. L'intérêt que portait sa femme pour cette lointaine cité fermée aux étrangers le dépassait, bien que la détermination dont elle pouvait faire preuve dans cette entreprise ambitieuse n'était pas déplaisante.

Elle glissa la lettre dans l'enveloppe avec précaution avant de retourner dans leur chambre. Le temps d'enfiler une chemise et un pantalon, elle entendit bouger du côté de la pièce d'à côté reconvertie en chambre pour les enfants. Contre toute attente, ce n'était pas Akihiko qui appelait mais Kiyoko.
"Maman, on trouve pas Kotoko." Précisa d'ailleurs Kimiko, déjà debout hors de son lit, en pointant sa petite soeur au bord des larmes.
- Kotoko ? Oh, ta poupée ma chérie. Ne t'inquiète pas, elle est dans ton sac. Kimiko, tu peux choisir une peluche pour le voyage."
L'ainée ne se le fit pas dire deux fois, resserant ses petits bras autour du cou du tigre blanc en peluche que Lantis lui avait offert à la naissance. Akihiko ne tarda pas lui aussi à tendre les bras vers sa mère et réclamer son attention.
"Bien, nous allons partir dans quelques heures. Il faut vous habiller."
Les vêtements préparés et repassés la veille étaient encore sagement alignés sur le porte-kimono. Tandis qu'elle passait devant la porte pour les récupérer, elle croisa le regard de son époux à nouveau sérieux, posé sur elle puis sur les enfants. Elle revint vers lui, les habits sur le bras, baissant d'un ton.
"Je sais que vous aimeriez me voir plus... traditionnelle dans mon rôle de mère. Mais c'est pour eux que je le fais, faites-moi confiance vous aussi, vous savez qu'ils passent avant tout."
Un simple baiser au coin des lèvres et elle le laissa à ses réflexions. Déjà dans leurs berceaux, les jumeaux semblaient impatients de reprendre la mer et de retourner sur cette île paradisiaque où leur mère disait qu'ils seraient en sécurité. Akihiko était peut-être le moins enthousiaste, tant qu'il pouvait suivre sa mère il se fichait de l'endroit où il allait mais Kiyoko avait développé là-bas un attrait social, elle ne cachait pas son envie d'aller jouer avec les petites filles lalafell et leurs poupées, "Kotoko" n'était devenue indispensable que depuis cette rencontre. Kimiko avait la réserve et l'assurance de son père, mais la curiosité et l'attrait pour l'inconnu de sa mère, elle avait beau apprécier la solitude, et craindre encore les monstres du placard, elle voulait elle aussi explorer le monde depuis toujours, depuis que debout sur ses deux jambes elle avait imaginé les premiers plans d'évasion de son berceau pour explorer sa chambre. Plus elle grandissait, plus son monde devait trop étroit.

En les habillant, Kikyo jetait parfois un regard par-dessus son épaule, se demandant à quoi le tigre pouvait bien songer dans son silence soutenu. Il ne viendrait avec eux cette fois, bien qu'il ai apprecié son dernier voyage passé à pêcher sur les bords du lagon. Une part de lui était encore à Doma, tout comme elle mais elle avait les enfants et une ses ambitions pour tenir le coup. Lui, depuis son retour du front et dans l'attente interminable de cette fin du monde annoncée, il manquait d'action.


Si l'équipage ne se trompait pas sur l'issue de cette aventure,
il ne tarderait pas à en avoir pour sa patience.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Ah, voici donc la capitaine dont on m'a tant parlé !"
Le baron était grand, aussi grand que son chevalier lige, mais il ne sembla avoir aucune difficulté à baisser son visage au niveau de celui de la demi-raenne lorsqu'il s'inclina devant elle afin de saisir sa main gantée pour l’effleurer d'un baisemain protocolaire et mesuré. Il souriait face au visage de marbre d'une Kikyo à la fois curieuse et analytique. Elle observait tout : l'homme, sa posture, sa tenue, sa suite. Il était accompagné d'un autre chevalier et d'un majordome aussi aimables que lui mais beaucoup moins enjoués. Le baron serait-il un de ces excentriques ? Non, le sire Fauchet l'avait informée de son caractère insolite mais pas d'une folle extravagance. Elle inclina la tête, le saluant à son tour.
"Sire Fauchet n'a pas manqué de me faire l'éloge de votre personne, monsieur.
- C'est une surprise de vous voir avant l'heure, qu'est ce qui vous a donc amené à Ishgard ?
- Le sire Fauchet, une fois de plus. Il m'a recommandé un couturier de la Sainte-Cité en vue de ce qui devait être notre rencontre prochaine."

Le templier lui adressa un sourire satisfait et amusé, de ceux qui s'apprécient après un travail bien fait. Regard qu'elle lui rendit sans sourire lorsque Monsieur Delacroix se redressa.
"Me voilà pris de court et enchanté.
- La mise en scène était pourtant parfaite. L'esplanade sous le vent et votre suite, la neige, et votre lige qui vient me cueillir une rue plus haut... vous l'auriez préparé que vous n'auriez que difficilement mieux fait."

Il se mit à rire, sous le regard de ses vassaux qui dans leur silence s'en amusèrent aussi sans le cacher. Deux d'entre eux prirent congé, les laissant tous les trois au bout de l'esplanade sous le vent, il faisait froid, mais l'homme se montrait si chaleureux que le soleil absent s'en trouvait remplacé par sa chevelure dorée. Sa conversation était énergique, empereinte de toutes les sortes d'émotions qui pouvaient lui traverser l'esprit. Lucien, lui, demeurait droit et silencieux à ses côtés. Kikyo et lui échangeaient par moment un regard sans qu'elle ne détache son attention du maître de la maisonnée.

Cela faisait un petit temps maintenant que leurs chemins s'étaient croisés, et la facilité avec laquelle cet individu lui parlait avait manqué de la destabiliser. Avec elle l'on se montrait toujours distant, mesuré, parfois craintif devant sa froideur et sa dureté ; Lucien Fauchet n'en avait été que plus aimable et même compréhensif. Il serait mentir que de prétendre qu'elle ne s'était pas méfiée, la dernière personne à l'avoir si facilement approché était Shinme et le souvenir de ses multiples déceptions avait de quoi réveiller le glacier. Mais Lucien Fauchet ne l'idolâtrait pas comme le faisait jadis son ex-suivante, il était déjà loyal à un autre et ne cachait pas son statut de diplomate et le langage qui l'accompagnait. Au gré des rencontres, elle avait su différencier l'homme de l'ambassadeur, il devenait difficile de ne pas l'apprécier.

"Je dois admettre que je suis curieux de votre pays, et de votre culture, capitaine."
La voix du baron la tira de ces pensées fugages.
"Comme je le suis de votre maison, monsieur Delacroix. Le sire Fauchet m'en a vanté la demeure mais il a su conserver le mystère sur votre ligne directrice et surtout vos ambitions.
- Nous nous reverrons dans ce cas, et je me ferais un plaisir de vous parler de ma famille, vous en vanter les mérites.
- J'y compte bien. A notre prochaine rencontre."

Elle inclina la tête de nouveau, les mains jointes devant elle pour les garder au chaud et elle tourna les talons, laissant les deux hommes face aux montagnes.

Cette mise en bouche avait attisé son intérêt pour la Maison Delacroix et l'éventualité d'un partenariat. Au-delà des plaisanteries que cela suscitait au sein de l'équipage quant à sa manie de fréquenter toujours plus d'elezens -un parfait hasard mais tout de même- l'homme autant que son serviteur manifestait tant dans ses questions que ses anecdotes, une attirance palpable pour l'inconnu. Il n'avait pas parlé de son prochain voyage en orient comme d'une visite diplomatique ou commerciale, mais d'un réel intérêt pour la culture de son peuple et le désir d'en comprendre le sens.
Un fugace sourire éclaira son visage dès lors qu'elle se retrouva seule en chemin vers l'ethérite, songant au sérieux dont avait fait preuve le sire Fauchet lorsqu'elle lui avait montré comment servir le saké et la fierté dans son regard un instant plus tôt lorsqu'il lui montrait comment il avait appris à s'incliner à la manière des orientaux. Ce n'était pas sans lui rappeler un autre.
"... Baka."
Le murmure mourrut sur ses lèvres, son sourire disparut et son regard s'assombrit. Ce n'était ni la faute du baron, ni de Fauchet si cette fois son coeur se serrait. Ce n'était pas non plus Shinme dont elle avait finit par accepter la fatalité. Les souvenirs remontaient de bien plus loin.


"Regarde, j'ai même appris à m'incliner comme toi !
- Lantissu-no-baka !"


Kikyo se couvrit la bouche d'une main, se tenant au mur près de l'escalier qui descendait vers l'Arc des Valeureux. Elle venait de comprendre, frappée de plein fouet par les souvenirs surgissant du coffre où elle les avait enfermés à double tour ; cela qui lui fit perdre l'équilibre.
Il ressemblait au Lantis d'autrefois. Sérieux, militaire, assidu... et optimiste.
Kikyo sentit les larmes lui monter aux yeux, elle se l'interdit. Elle écarta sa main de ses lèvres et se redressa, compta jusqu'à dix chaque respiration et suivit du regard la buée sortant de sa bouche. Immobile pendant quelques secondes, elle se ressaisit. Elle devait encore passer chez le couturier, et décider de la tenue qu'elle et son mari porteraient lors du dîner chez les Riverhood. Il fallait aussi se préparer à accueillir le jeune Valentinault Dandelion qui allait arriver de Sharlayan, rester concentrée sur ses objectifs.
"Tout se met en place, je ne dois pas me laisser distraire."


Kikyo Kurusu n'avait plus aucun ami.
Et elle n'en voulait pas.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Êtes-vous bien certain de savoir ce dans quoi vous vous impliquez, monsieur Dandelion, et ce que vous risquez ?"
L'elezen ne marqua pas la moindre hésitation lorsqu'il hocha la tête pour la énième fois. Le calme et le sérieux de ce jeune homme n'était pas sans lui rappeler le tempérament de son second juste avant de se lancer dans l'une de ses folles entreprises chaotiques. Il avait les yeux de son père et selon l'angle sous lequel on contemplait son visage, la candeur tranchait avec la dureté, ou l'inverse.
"Le temps s'accélère, capitaine Kurusu. Il se passe des choses par-delà les mers et je ne pardonnerais jamais de n'avoir rien fait si le pire était à envisager.
- Il l'est, même si nous souhaitons le meilleur. Je ne vous demanderais pas de rompre votre serment et de me révéler ce que vous savez et que même mon second et mon ingénieur en chef semblent ignorer...
- Tous ceux qui ont un pied dehors sont tenus à l'écart avec beaucoup de soin. C'est mon premier voyage en dehors de la Vieille Sharlayan, ma famille est plutôt conservatrice.
- ... mais soyez franc avec moi. Dois-je mettre nos familles en sécurité.
- ... Oui, vous devriez."

Sa voix était grave, son regard fuyant. Kikyo se leva du bureau et se dirigea vers la fenêtre, les mains dans le dos. Un silence pesant s'installa dans le bureau, silence que l'invité n'osait interrompre. Il se contenta de suivre du regard les expressions et le moindre geste de son hôte en pleine réflexion.

Si le temps s'accélère, alors il faudra peut-être annuler le voyage à Golmorre... non, hors de question. Nul ne sait quand ce qui doit arriver arrivera, mais la prudence passe un cran au-dessus. Elle devait prévenir Akira-sama, et lui proposer de les accompagner avec les enfants. Ils seraient en sécurité à bord de l'Eternal, et lui plus près de Yanxia au cas où il se passerait quelque chose durant l'expédition ; il pourrait plus facilement rejoindre le seigneur Hien, et elle pourrait ensuite amener les enfants au refuge, sans oublier ceux qu'ils devaient protéger. Tout ceci bien sur dans le pire des scénarios ou quelque chose se produirait pendant le voyage.
"Que pense votre mère de ce projet ?
- Elle me soutient, je n'en dirais pas autant de mes oncles mais ils savent respecter mes décisions."

Ses doigts s'agitèrent légèrement, signe de contrariété, mais elle n'en pipa mot.
"Croyez bien que j'aimerais pouvoir faire plus, malheureusement mes relations ne vont pas jusqu'au Forum même si certains de ses membres assistent régulièrement aux concerts de l'académie.
- Qu'importe, vous m'apportez de précieuses informations et votre appui. Il ne reste plus qu'à résoudre le dernier détail du... comment avez-vous dit, déjà ?
- Une excuse, c'est le terme qu'a employé votre second hier soir. J'aimerais dire cela autrement mais le terme est exact, la faction des bibliothécaires est dominante et farouchement opposée à la venue d'étrangers. Même si on parle de vous de plus en plus, j'ai bien peur que cela ne suffise pas à leur fournir un prétexte.
- Que vous faut-il ?
- Un acte retentissant, quelque chose qui ferait que leur décision de vous accorder le droit d'entrée ne leur fera pas perdre la face vis à vis de leurs convictions. Quelque chose de plus conséquent qu'une relique perdue ou un grimoire volé.
- L'Eternal lui-même ne suffirait-il pas ? Il est plus qu'une simple relique de l'ère de la magie, il est un héritage, peut-être unique si nous ne retrouvons pas les autres.
- C'est à l'Eternal que je pense justement, il leur faudrait un évènement, une démonstration de son potentiel..."

Le capitaine fit volte-face, les sourcils froncés comme s'il venait de l'insulter personnellement.
"Me prenez-vous pour un chien de foire, qui fait le beau pour avoir un sucre ? Suis-je donc un cobaye pour vos archons ?!"
Valentinault cligna des yeux, prenant conscience de la maladresse de ses propos.
"Ne le prenez pas ainsi, capitaine. Il s'agit de trouver un prétexte.
- Je n'ai pas l'intention de jouer au singe savant pour le bon plaisir de Sharlayan. Il me semble avoir largement démontré de mes capacités, comme de mon ambition."

L'elezen soupira. L'orgueil de la domienne pourrait être un obstacle tout aussi grand que l'obstination des conservateurs. Il lui fallait pourtant la convaincre de jouer le jeu des archons une dernière fois afin d'obtenir le précieux sésame. L'inconnu n'avait pas que de bons côtés, mais avait-elle seulement le choix ?




Ajustant ses gants, Kikyo jeta un oeil sur la robe ishgardaise qu'elle portait encore quelques jours plus tôt et qui ornait maintenant le manequin près de sa coiffeuse. Tout s'était déroulé selon son souhait, la Maison Delacroix avait signé l'accord sans hésiter et chacun avait à y gagner dans cette histoire, et dans moins d'une heure l'Eternal lèverait l'ancre avec à son bord son premier invité de la mesnie : le sire Fauchet, pour son plus grand plaisir.
"Cette alliance nous sera bénéfique, à tous." Assura-t-elle pour son propre compte, tout en laçant son corset.
Sans sa suivante, l'opération était certes plus complexe, mais elle avait retrouvé l'assurance d'une femme seule, qui n'avait jamais requis l'aide de qui que ce soit pour s'habiller. En compagnie du baron elle avait retrouvé certains mécanismes de son expérience comme aristocrate, elle se prêtait au jeu avec amusement et sans hypocrisie comme le soir du dîner chez les Riverhood, plaisante soirée. Prendre le thé avec Sebastien Delacroix, c'était comme prendre le thé avec Shinme à l'exception que le baron ne lui vouaiti aucune adoration, il n'était pas là pour la servir mais pour se servir lui-même. Elle adorait cela. Pas de faux semblant, pas d'objectif dissimulé, pas de tentative pour minimiser ses intérêts bien qu'il la couvre de compliments. Sebastien Delacroix, cet homme ambitieux et sans masque, ils étaient faits pour s'entendre dira-t-on.
"Je vous ouvre les portes du monde extérieur, vous m'ouvrez les portes d'Ishgard", l'Eternal avait désormais un allié de poids dans l'aristocratie de la Sainte-Cité, assez pour obtenir les accréditations nécessaire lors de futures expéditions, des facilités d'accès à certains milieux, certaines personnes, certaines commerces... Ce n'était pas Sharlayan, mais c'était un début. Et qui sait ? Face à des sharlayanais fermés face aux étrangers, les conseils d'un habitant d'une autre cité autrefois hermétique pourraient se montrer avisés, en tout cas plus qu'elle ne l'était elle-même. Kikyo Kurusu n'était pas connue pour être une brillante diplomate.

Son regard dévia sur son époux encore endormi de l'autre côté du lit, dans la pénombre de la chambre aux rideaux encore tirés de son côté. Le drap glissa sur son dos, laissant entrevoir le tigre bougeant au gré de sa respiration, comme s'il dormait lui aussi.
Il fallait qu'elle lui parle de tout cela. Akira avait toujours été de bons conseils même s'il n'avait aucun intérêt pour Sharlayan, elle devrait aussi lui parler de l'invitation du baron au Manoir Delacroix puisqu'ils souhaitaient recevoir le couple Kurusu. Elle devait lui parler de Golmorre, lui demander quand il comptait relancer le tournois du Lotus Blanc, tant à faire, et le temps s'accélère. Dehors les nuages s'étirent, les feuilles des palmiers noscéens commencent à jaunir, et plus loin dans la baie elle pouvait voir l'Eternal à travers la vitre. Le vent jouait dans la houle comme chaque matin, comme un "bonjour" qui lui serait adressé sachant qu'elle peut le voir.
Elle sourit, brièvement, avant de quitter la pièce. Dehors, le personnel la salua dans les couloirs, dans les escaliers, en bas les dernières caisses de matériel pour Keanu cotoyaient les premières pour le voyage vers Dalmasca commençaient à arriver, certaines en surplus, en prévision d'un tout autre voyage.

Elle avait attendu, patiente, elle avait joué le jeu. Elle avait attiré l'attention, conclu des alliances, trouvé un refuge. Une année durant, elle s'était attelée à cet objectif, elle n'avait rien lâché, rien concédé si ce n'est sa reconnaissance envers Isaudorel et Ivanhault. Elle avait travaillé dur, ses hommes qui la suivaient avec loyauté avaient travaillé dur eux aussi. Maintenant, l'heure était venue, il n'y avait plus qu'un pas à faire, qu'une main à tendre au bon moment.


Elle était prête à récolter les fruits de sa propre ambitions.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Seule. Quand le dernier de ses officiers passa la porte du bureau et que celle-ci se referma derrière lui, Kikyo poussa un long soupir de soulagement. Elle avait tenu le plus longtemps possible pour honorer ses responsabilités, maintenant elle pouvait s'effondrer. Il n"y eut pas de tasse brisée ou de main frappée contre le bois cette fois, juste un long soupir, appuyée sur le rebord du vitrail renvoyant le reflet de visage fatigué. Encore une fois, alors qu'elle était sur le point de tout avoir, de tout réussir... tout lui échappait. Un détail, un hasard, une malchance qui se répétait sans relâche à un moment précis : celui où elle pouvait enfin faire la preuve devant sa famille de ce qu'elle apportait.

"Mama ?"
Ce fut encore la voix de Kimiko qui la tira de ses pensées. La petite se tenait dans l'embrasure de la porte, les yeux ensommeillés.
"Petit lotus, Kimiko que fais-tu encore debout il est tard.
- Papa s'est en'domi."

Les mains de Kikyo se décollèrent de la fenêtre pour venir prendre la taille de l'enfant en yukata qui tendait les bras vers elle. Dans la chambre, il n'y avait rien, le lit n'était même pas défait. Elle avança jusque devant l'autre porte ouverte derrière la coiffeuse, celle de la chambre des enfants. Kiyoko et Akihiko dormaient l'un contre l'autre dans leur lit commun, paisibles. Akira était là, à demi-couché sur le lit de leur fille aînée la tête reposant contre le mur, endormi d'épuisement.
"Vous êtes encor' disputés. Maugréa Kimiko accrochée au cou de sa mère.
- Non ma chérie, ce n'est pas si simple."

Elle la porta jusque sur le grand lit pour s'asseoir. Cette fois les yeux de l'enfant étaient grand ouverts et elle avait retrouvé son air sérieux ; la princesse Kurusu attendait des explications.
"Ton père et moi nous ne sommes pas d'accord sur certaines choses, mais il a fait beaucoup de sacrifices ces dernières lunes pour vous les enfants, pour rester près de vous tant que son pays n'a pas besoin de lui sur le champ de bataille.
- Papa veut rentrer ?
- C'est ce que nous voulons tous.
- Pour ça que tu e'triste ?"

Kikyo soupira une fois de plus, attirant sa fille sur ses genoux pour la bercer.
"Le devoir d'une épouse est de soutenir son mari. Bien sur que notre maison et notre pays me manquent mais contrairement à votre père, j'avais une mission à remplir tu te souviens ? Le refuge dans les îles."
Un sourire éclaira le visage de Kimiko au souvenir de ce qu'elle avait vécu comme une aventure fantastique digne des héros de ces livres pour enfants qu'on lui lisait le soir. Elle écouta pourtant la suite avec attention.
"Mais votre père n'a rien à faire, il s'ennuie et il est loin de chez nous, de notre peuple et de notre roi. C'est pour vous qu'il est là.
- Et pas pour toi ?"

La question lui déchira la poitrine de l'intérieur avant qu'elle ne réponde, un sourire coupable sur les lèvres.
"Parce que je lui ai demandé."
Kimiko hocha la tête mais se mit à froncer les sourcils très fort, affichant une moue contrariée et les joues gonflées comme lorsqu'elle réfléchit très fort. Du haut de ses presque trois ans, la petite fille n'était pas encore en âge de comprendre toutes ces choses. Kikyo se contenta de l'allonger sur le lit à sa place et de la couvrir.
"Est ce que tu veux entendre une histoire pour t'endormir ma chérie ?
- Oui, mama."

La main de la demi-raenne carressa tendrement les cheveux de sa fille, de plus en plus longs.
"Une histoire de capitaine com' toi. ajouta l'enfant avant de bailler.
- D'accord. Eh bien, c'est l'histoire d'une femme mariée et d'une maman qui vivait sur le bord de la mer avec sa famille qu'elle aimait plus que tout..."

Kimiko s'installa confortablement contre l'oreiller deux fois plus large qu'elle, la couverture remontée jusqu'au cou, seules ses petites mains blanches dépassaient de chaque côté de sa tête.

"Elle était l'épouse d'un homme fort, un chef de guerre, un marchand, un politicien... il savait faire beaucoup de choses et défendait leur pays avec loyauté. Il était reconnu pour cela, respecté, et il voulait que sa femme soit son égale, qu'elle soit aussi forte que lui. Mais elle ne pouvait l'égaler en jouant sur le même terrain.
- Parce qu'iyétait tro' fort ?
- Oui, et parce que cela n'aurait rien apporté de plus à la famille d'être deux à faire la même chose. Alors elle décida que puisqu'il était déjà le maître des affaires intérieures, elle tournerait son regard vers l'extérieur et briserait tous les murs qui bloquaient l'horizon devant son peuple, devant sa famille et ses enfants. Elle pensait à leur avenir, qu'ils ne connaissent aucune frontières, aucun barreaux. Elle était persuadée qu'ainsi elle servirait les intérêts des siens efficacement. Alors elle monta un groupe d'explorateurs pour conquérir le monde autrement que par les armes.
- Avec un second comme Ivan'ho et une Meleth aussi ? Et les miqo'tes ?
- Oui, tout ça. Au début ce fut difficile parce qu'ils faisaient des efforts mais la discipline et la hiérarchie mettent plus de temps qu'à l'armée à s'installer. Ils ont voyagé ensemble et petit à petit tout se mettait en place. Mais le mari resté au pays n'était pas convaincu. Même si sa femme ne partait jamais trop longtemps, ce n'était pas bien vu et elle manquait aux enfants. Il ne voyait pas encore ce que son travail apportait. Alors la femme redoubla d'efforts pour lui montrer ce qu'elle pouvait faire. Il y avait d'abord les histoires et puis les rencontres, le commerce, les matières premières...
- Moi j'aime les histoires."

Kikyo sourit un peu, elle ne put s'empêcher de déposer un baiser sur la joue de sa fille à cette déclaration.
"Mais plus elle passait de temps à travailler, même si elle passait beaucoup à la maison, le mari la trouvait changée. Pour lui elle devenait comme ces étrangers chaotiques et indisciplinés. Elle voulut lui prouver le contraire, et à l'occasion de lui présenter ses hommes, leur hiérarchie, leurs talents.
- Et il les a aimé ?
- Il a eu du mal, mais oui il a commencé à les apprécier. Petit à petit, elle lui parlait de leur travail et même s'il était très têtu elle savait comment s'y prendre. Sauf... que parfois ça ne marchait pas. Parfois ses hommes faisaient des bêtises ou se trompaient, elle aussi ça lui arrivait. Mais chaque fois que ça se passait mal, il était là, comme si on lui avait jeté un sort pour lui porter la guigne.
- Comme Pon-pon !
- C'est ça, oui. Comme avec Pon-pon. Mais il n'y avait pas de tanuki, pas de méchante sorcière ou de sortilège. C'était juste... comme ça. Et chaque fois que le mari voyait ces choses, il n'était pas content et il commença à douter de sa femme qui lui racontait son travail mais quand lui regardait, ce n'était pas du tout ce qu'elle avait dit. Il commença à se dire qu'elle lui mentait, il n'avait plus confiance."

Ses mains serrèrent doucement la couverture, alors qu'elle continua.
"Alors au début, sa femme redoubla d'efforts et d'ambition pour lui montrer, mais à chaque fois elle échouait. Alors elle se relevait, comme Kimiko à l'entrainement, pour repartir et progresser. Elle était persuadée que tôt ou tard, elle réussirait."
Les yeux de Kimiko s'ouvrirent un peu plus, écoutant sa mère elle à la mention de son "entrainement" elle se redressa, persuadée d'entendre le dénouement tout proche.
"Mais plus elle avançait vers cet objectif, plus elle voyait sa famille s'éloigner d'elle. Elle se trouva alors à se demander ce qu'elle faisait là, pourquoi elle le faisait, et ce qu'elle risquait à poursuivre.
- Elle avait peur ?
- Oui, très peur. Parce que si elle faisait tout ça, c'était pour sa famille. Mais si elle continuait, il n'y aurait plus de famille. Son mari voulait qu'elle fasse ce qu'elle veut, alors elle se posa la question sur ce qu'elle voulait vraiment.
- Et qu'est ce qu'elle a fait ?"

Cette fois, c'était plus de la curiosité qui transparaissait dans la voix de la fillette qui se rallongea. Kikyo ne répondit pas tout de suite, la bordant avec affection sans laisser apparaitre la moindre émotion sur son visage, menant l'histoire à son terme. Elle ne se rendit pas compte que cette seule minute eut raison de la tenacité de l'enfant qui ferma les yeux et s'endormit avant d'entendre la fin.
"Elle a contemplé l'horizon, et toutes ces possibilités qu'elle avait presque à portée de main, ses hommes qui faisaient sa fierté malgré leur maladresse, et les voiles de son navire éclatant au soleil, jusqu'à ce qu'elle ai la force de faire demi-tour..."
Kikyo baissa les yeux, interrompue par la respiration lente de l'enfant assoupie. Sans perdre son sourire, elle déposa un autre baiser sur son front. Puis elle se leva et quitta la chambre pour retourner dans le bureau. Elle ne trouverait pas le sommeil cette nuit.


Le doute, ce poison insidieux qui vous dévore de l'intérieur. Les larmes ne venaient pas, les sanglots demeuraient coincés dans sa gorge, rien ne pouvait soulager ce mal qu'elle avait si longtemps voulu étouffer. Elle avait cru, imbécile, que l'ambition et la volonté suffiraient, que le travail payerait, qu'elle ferait ses preuves, qu'elle serait à la hauteur. Mais elle ne l'était pas, elle n'y arriverait pas et si elle continuait elle perdrait tout ce qu'elle avait déjà construit.
Plus j'avance, plus il s'éloigne, et le temps que les enfants grandissent et soient en âge de le contredire il sera trop tard. Ce n'est pas pour lui que je le fais, mais la partie se joue pour l'heure entre lui et moi seulement.
Pourtant, prendre une décision n'était pas aisé. Abandonner maintenant après tous ces sacrifices, après tous ces coups de pied dans la fourmillère, n'était pas plus digne de lui que la vision qu'il avait d'elle en ce moment. Dès lors, l'une ou l'autre de ces options n'arrangerait rien, il n'y avait aucune issue, seulement un sursis. Elle porta une main à son visage, cherchant à empêcher la rage et le désespoir de s'emparer de son esprit quand une voix résonna dans sa linkperle. Il était presque deux heures du matin.
"Une escouade de sharlayanais déguisés en casaques jaunes vient d'emmener Silius pour le rappatrier de force. Capitaine, êtes-vous à l'écoute ?"
Elle ne pouvait pas répondre, pas dans cet état, mais elle avait entendu. Ainsi, le sort s'acharne. Elle avait touché du doigt l'objectif qui s'éffondrait comme un chateau de cartes, elle perdait sa famille, sa cousine ne lui adressait plus la parole, Shinme l'avait abandonnée, son mari ne croyait plus en elle, et voilà qu'on lui enlevait Silius.
"Hors de question."
On aurait presque pu entendre le sang dans ses veines devenir glace. Son regard se figea, elle se leva et dans son élan se saisit de sa lance. Akio qui était resté couché dans un coin se leva d'un bond et la suivit hors de la pièce sans un seul regard vers la chambre. Deux étages plus bas, elle frappa à la porte de la chambre de Valentinault qui mit plusieurs minutes à ouvrir. L'elezen fut surpris d'être ainsi dérangé en pleine nuit mais la laissa entrer, jetant un regard inquiet à l'énorme loup blanc qu'il voyait pour la première fois sous sa vraie forme. Quelques heures plus tard, les trois avaient quitté l'Escale quand un message d'Ivanhault arriva dans le bureau avec plus de détails sur la situation.
"... je vous demande de ne pas déclencher l'apocalypse..."


Rien n'était maintenant moins sûr.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Le vent soufflait sur la plaine yanxienne. Assise dans l'herbe face aux montagnes, Kikyo contemplait le paysage tout en gardant un oeil sur les enfants qui jouaient près d'Akio. Les rizières paisibles étincelaient sous ce soleil de fin d'après-midi, et le vent transportait avec lui les saveurs d'un dîner prêt à cuire dans un village un peu plus bas sur la route. Les heures passaient sans qu'elle ne les compte, le visage fermé et ne s'adoucissant que lorsque l'un de ses enfants s'approchait d'elle pour réclamer une étreinte, lui tendre un brin d'herbe ou un caillou quelconque qu'ils trouvaient fascinant, ou simplement s'endormir sur ses genoux le temps d'une sieste.
Mille questions s'étaient entrechoquées dans sa tête, entre colère et résignation, autant de sentiments qu'elle ne pouvait accepter comme guide. La porte restée close devant elle au Quartier Enclavé et la lettre froissée dans sa poche réveillaient la blessure chaque fois qu'elle y repensait. Il avait fallu l'expliquer aux enfants, les rassurer sans leur mentir, parler avec des mots qu'ils comprendraient.


"Pourquoi papa est partit ?
-  Parce qu'il ne pouvait pas rester."


"Il ne veut plus nous voir ? Il est fâché ?
- Il n'est pas heureux, mais il vous aime."


"Maman a fait une bêtise, et elle n'a pas eu de chance. Votre papa... pense que j'ai oublié qui je suis, qu'il n'y a plus rien de Doma en moi et il a presque raison. Maman a tellement travaillé ces dernières lunes qu'elle avait presque oublié."


"Presque oublié."
Elle inspira profondément, le wakizachi tournant entre ses doigts. Le ciel se teintait d'orange au-dessus des montanes. Lorsqu'elle baissa les yeux sur la lame, elle y croisa son propre regard avant d'y voir celui d'Akira, déçu et las, dissimulant sa faiblesse. Elle l'avait toujours vu comme un roc, comme un tigre, pas qu'il puisse se sentir si mal, si frustré, si délaissé, un homme simple derrière le masque du tigre.
Et comme lui, elle n'était pas infaillible. Comme lui elle pouvait flancher. Akio attendit que Kimiko soit descendue de son dos pour se lever et se tourner vers elle.
"Kikyo, cela fait un jour.
- Oui. je pense qu'il est temps."

A son tour, elle se leva, la main serrée autour du wakizachi. Les enfants la fixèrent sans comprendre, ignorant tout de ces choses et de ce que l'honneur domien pousse les femmes à faire. Sa main agrippa ses cheveux, les tordant autour de son poignet tandis que la lame venait les trancher net au-dessus du vide. La main retomba, laissant les dernières mèches irrégulières retomber sur sa nuque et le reste de sa belle chevelure brune dont les lambeaux s'envolaient avec le vent.
"Nous rentrons."
Les jumeaux furent placés dans leur couffin et Kimiko devant sa mère sur le dos du loup. Laissant là ce coucher de soleil rouge sang au-dessus de la Muni.




Ce n'est que bien après le coucher des enfants, après que le dernier d'entre eux se soit endormi, que Kikyo s'avança devant le miroir pour affronter son reflet. Le bain préparé par ses soins l'attendait, le parfum de jasmin embaumait déjà la chambre. Elle frissonna, les yeux clos, s'autorisant un dernier moment de faiblesse. Trois jours plus tôt, elle n'aurait jamais pensé en arriver là.

L'eau était presque trop chaude, mais il n'en fallait pas moins pour que cela soit efficace. Le flacon attendait sur le rebord, elle n'aurait jamais pensé qu'elle en trouverait si facilement à Kugane. L'odeur était toujours aussi déplaisante, le jasmin palierait à cela. Elle se plongea dans le bain, noyant l'intégralité de la carpe koï dans son dos. Trois jours plus tôt il posait encore sa main le long du dessin avec fascination. Elle frémit un instant, mais ne laissa plus la douleur stopper son élan.
Quelques gouttes versées sur la racine des cheveux, et elle les plongea dans l'eau. Puis elle remonta, inspira, versa de nouveau quelques gouttes et appliqua le produit un peu plus, avant de recommencer. Plonger, respirer, appliquer et rincer. usant chaque fois d'une quantité un peu plus grande. Peu à peu, ses cheveux perdaient leur couleur. D'abord ternes et grisâtre, comme si on les avait plongé dans la cendre, ils se mirent à blanchir au bout d'une demi-heure., elle continua encore un long moment jusqu'à ce qu'ils ressortent de l'eau devenue blanche elle aussi, tels une soie argentée aussi brillante que la lune derrière la fenêtre. Kikyo se frotta le visage, son regard n'exprimait plus la moindre émotion. Elle plongea la tête une dernière fois avant de quitter le bain et de s'enrouler dans une serviette tiède. Face au miroir, elle s'observa de nouveau.
"Qui je suis, et n'ai jamais cessé d'être."
Elle ouvrit un tiroir, en sortit des ciseaux, et entreprit d'arranger un peu son apparence et les mèches irrégulières encadrant son visage. Ce n'était que la première étape.
"Aussi vrai que celui qui cesse de manier le sabre en perd sa force, celui qui cesse de répéter ce geste pour blanchir ses cheveux les voit perdre la pureté de cet éclat. Et celle qui a cessé de montrer qui elle était, plongée dans ses ambitions, a perdu la reconnaissance des siens."
Elle ordonna ses cheveux du mieux qu'elle put avant de les sécher. Il lui sembla revenir plusieurs années en arrière, à l'époque où ce rituel avait une signification toute autre dans son esprit et qu'elle associait à la noblesse orientale désuète et incapable de se maintenir dans le monde actuel.
De retour sur le futon où dormaient ses enfants, elle s'endormit aurpès d'eux, la main posée sur la lettre scellée qu'elle laisserait à l'Enclave demain matin avant de retourner à son poste.



J'ai été aveuglée par mon travail et par toutes les difficultés auquelles j'ai du faire face pensant abréger au plus vite cette situation qui vous pesait. Par ma faute vous avez souffert, vous souffrez encore croyant que je ne suis plus celle que j'étais. Vous n'êtes pas un frein, vous ne l'avez jamais été. Aujourd'hui encore vous agissez pour moi qu'importe la douleur que vous m'infligez.
J'irais au bout, et je vous y trouverais car là est ma vraie place. Chez moi, c'est ici.

D'ici là, je veillerais sur nos enfants. Ils vous réclament, mais ils comprennent plus vite que moi.


Kikyo


Les voiles de l'Eternal se gonflèrent sous un vent venu de l'Est. Il n'était pas plus froid, ni plus lourd que d'habitude. Il était changeant, peut-être un peu plus vrai qu'avant. Peut-être n'était-il rien de plus que le jour d'avant et que tout ceci n'était qu'un sentiment fugace propre à ceux qui vivaient auprès de lui. Il était à l'image de son capitaine.


N'oublies pas, montre-leur qui tu es, qui tu étais,
et celle que tu n'as jamais cessé d'être.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Tout le monde quitta la réunion avec le sourire ou presque. De tous, Valorius était sans doute le plus inquiet mais comment lui en vouloir, depuis deux ans et demi il prenait soin de Meleth comme l'aurait fait un père. L'idée de la ramener à Golmorre et l'exposer à la fois au courroux de ses semblables en plus des tourmens de son passé avaient de quoi inquiéter. Le capitaine rassembla les cartes et les documents sur lesquels ils s'étaient appuyés, et sortit à son tour pour rejoindre ses quartiers.
"Je monte ceci et je vous rejoins, le temps de passer voir si les enfants dorment."
Le fait est qu'elle ne descendit pas. Les enfants ne s'étaient pas réveillé et Kimiko ayant confié sa peluche préférée à son père, avait construit dans son lit tout un fort de ses peluches pour l'entourer. Kiyoko tenant contre elle sa poupée qu'elle aimait tant, et dans l'autre main celle d'Akihiko enroulé dans sa propre couverture. Kikyo s'installa à son bureau dans la pièce adjacente, juste quelques minutes pour observer ces cartes une fois encore, songeant au voyage à venir ; encore un. Bien sûr, elle avait hâte de repartir, mais à cette impatience s'ajoutait maintenant l'attente plus forte que jamais de sa récompense, le fruit de ses efforts qui lui avait tant coûté.

L'océan sous sa fenêtre la berçait, et la nuit apportait ce calme et l'apparente sérénité d'un repos sain. C'est là qu'elle s'assoupit de longues minutes sans même le voir venir ; éprouvée plus qu'elle ne l'aurait voulu par la situation. Ajoutant à cela l'absence de Silius et la tension avec Sharlayan... Oh, bien sûr Liiz était parfaitement capable de s'en sortir seule jusqu'au retour de son officier maiscela ajoutait un peu plus sur la pile des difficultés sur son parcours. Elle l'avait choisi, elle les avait choisi.

La truffe humide du loup blanc qui, dans ses quartiers, reprenait sa forme adulte, la réveillé. Une heure avait passé quand elle leva les yeux sur la pendule.
"Oh, mince... il est tard ils ont dû tous partir."
Elle rangea les cartes dans son tiroir avant de quitter son fauteuil. Si depuis son bureau la fenêtre donnait sur la mer, celle du couloir traversant le dernier étage donnait sur le jardin et elle les entendit sitôt après avoir passé la porte. Il n'y avait aucune autre chambre à cet étage hormis la sienne, rien de plus que son bureau, l'observatoire et ses propres quartiers silencieux à cette heure. Les voix venaient de l'extérieur, elle se pencha pour observer à travers les carreaux. Il étaient juste là, en bas, rassemblés autour du feu sous les arbres. Lucien aussi était encore là, debout comme elle l'aurait fait mais souriant. Ils riaient, elle n'entendait pas ce qu'ils disaient mais pouvait voir la joie et l'enthousiasme sur leurs visages, chez certains l'inquiétude de l'inconnu et la détermination.
Golmorre n'était pas le seul sujet, il y avait aussi Sharlayan et les tours de l'apocalypse, depuis le "rappatriement forcé" de Silius il se posait beaucoup de questions sur leurs véritables chances d'être un jour conviés dans la cité des sages. Oh, ils avaient su impressionner par leurs deux dernières grandes expéditions, ils avaient fourni des rapports complets et même retrouvé un artefact perdu, mais au fond à part faire parler d'eux et attiser l'intérêt d'une minorités d'archons, quel poids avaient-ils même avec le soutient de la famille Dandelion ? Valentinault avait raison, la seule raison pour laquelle une ville aussi fermée que la Vieille Sharlayan pourrait inviter des "barbares étrangers" à accoster sur leur territoire serait qu'ils possèdent quelque chose qu'ils n'ont pas, quelque chose qu'ils veulent et même là ce serait risqué car la faction des Conservateurs pourraient tenter de le lui prendre. L'objet en question existait, c'était l'Eternal.
Kikyo reposa son épaule contre le mur, le regard dirigé vers ses compagnons mais l'esprit ailleurs. Elle avait confié à Valentinault une copie des rapports de recherche menés sur le chantier naval, et lorsqu'il arriverait entre les mains des archons, elle était certaine qu'ils ne feraient que seulement parler. Ceci s'ajoutant à la plainte de la doyenne Dandelion pour avoir entravé les intérêts de la famille en enlevant Silius et l'influence discrète mais bien réelle de cette musicienne de talent dans les hautes sphères, cela pouvait marcher c'était même plus que probable quoi qu'en pense Ivanhault dans sa réserve plus que compréhensible. Après tout il connaissait Sharlayan mieux qu'elle, mais la tacticienne voyait large, très large. Elle jouait sur le terrain avec une vue d'ensemble, tel le tigre caché dans la brousse qui voit toute la prairie où il est pourtant étranger. D'une manière ou d'une autre, se donner à corps perdu dans cette stratégie lui donnait l'impression d'avoir encore un peu de lui à ses côtés. Kikyo ferma les yeux quelques secondes ; la douleur était revenue.

Un éclat de rire venant du jardin la ramena à la réalité. Ils étaient tous là prêts à partir, prêts à combattre pour ce monde qu'ils s'étaient promis d'explorer ensemble. C'était Hotaru qui riait, elle reconnaitrait son rire mesuré mais qui porte loin entre mille. Face à la douleur, à la peur et à la menace constante de voir ces tours détruire leur futur du jour au lendemain, ils riaient, discutaient, préparaient leur prochain voyage sans laisser la moindre place au doute. Elle n'avait jamais douté... avant. Sa main se serra contre son coeur, se rappelant ce que cela faisait. Elle les avait choisi, ils l'avaient choisie aussi, et ils avaient eu peur lorsqu'elle s'était absentée, peur qu'elle ne revienne pas, qu'elle abandonne.
Abandonner ce en quoi je crois ? Non, jamais...
Même si cela pouvait lui faire perdre sa famille, elle ne la perdrait pas. Elle faisait cela pour eux, pour lui aussi, il fallait juste... qu'elle avance pour le lui prouver, au lieu de lui prouver pour avancer. Qu'importe les risques, qu'importe la souffrance et la solitude... plus facile à dire qu'à faire. Une épouse domienne doit servir son mari, un samourai domien doit servir son seigneur, servir elle l'avait toujours fait même élevée à la tête d'une famille à ses côtés comme une égale. Pouvait-elle seulement franchir ce cap ? Elle soupira, ce n'était pas le moment de penser à cela. Reportant son regard sur le jardin, elle se revit avec eux, au même endroit quelques jours plus tôt tandis qu'ils affirmaient tous leur volonté de repartir sitôt leurs proches en sécurité à Keanu. Oyuun avait choisi de quitter l'équipage pour s'y installer définitivement ainsi, elle veillerait sur l'ensemble du "village" en leur absence. On ne se refait pas, finalement, même lorsqu'on clamehaut et fort qu'on ne souhaite plus jouer les héros qui sauvent le monde, le monde vient nous rappeler à nos devoirs envers l'avenir.
Ils avaient peur, tout le monde a peur, mais voulaient y aller et elle le voulait aussi. Quoi qu'il arrive ils ne laisseraient pas le monde s'éteindre même s'ils n'étaient rien de plus qu'une goutte d'eau dans un vase, une goutte d'eau qui possédait quelque chose que Sharlayan n'a pas, et que Sharlayan voudrait. Tout ce qu'il manquait, c'était une occasion de le prouver, un bel exploit à l'ancienne.

Kikyo laissa échapper un rire léger, un souffle audible par elle seule qui répondit à l'écho de ceux provenant du jardin. Elle retrouvait enfin un peu d'elle-même. Sur le mur face à la fenêtre, entre deux portes, elle avait fait accrocher une peinture de Morolili représentant l'Eternal dans le port de Limsa Lominsa, la toile était protégée par une mince protection de verre et c'est dans ce verre qu'elle croisa le regard de son propre reflet, dur et froid. Elle répéta alors ces mots prononcés devant l'équipage mais cette fois pour elle-même.
"Très bien, allons sauver le monde."
Elle ne descendit pas ce soir-là, de toute façon il était bien tard et ils commençaient à se disperser chacun rejoignant sa résidence ou ses quartiers à l'Escale. Elle attendrait que les jours passent jusqu'au moment où elle donnerait l'ordre de lever l'ancre pour leur prochaine expédition...


... Sans savoir qu'à Sharlayan, un ordre similaire venait d'être donné.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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C'était une journée comme les autres à Brumée. Un soleil radieux entre deux averses de saison, l'Escale de Llymlaen résonnait des claquements légers de portes et des conversations des clients voyant passer les dockers aux bras chargés de caisses de matériel jusque là entreposés dans les sous-sols de l'établissement. De jour en jour, les recrues et volontaires de dernière minute s'ajoutent à la liste des effectifs inscrits sur le tableau d'expédition, tout semblait parfaitement normal, ordinaire.
Jusqu'à ce qu'une voix claire que l'on avait entendu rire depuis longtemps -d'ailleurs, elle ne rit jamais même quand tout va bien- résonna dans les couloirs du dernier étage.

"Haha ! C'est excellent monsieur Dandelion, excellent !"
Le visage toujours si sérieux, le capitaine ne pouvait dissimuler la flamme dans son regard tandis qu'elle relisait encore et encore le contenu de la lettre qu'il venait de recevoir, accompagnant la réponse de sa mère concernant la procédure de plainte suite à l'enlèvement de Silius.



Madame, monsieur,

dans le cadre des dispositions légales relatives au jugement des litiges commerciaux et/ou administratif, le Cabinet de règlement des litiges maritimes invite vos représentant à assister à une audience privée destinée à régler le contentieux à l'amiable en présence du procureur Eline Froncelet ce 30ème soleil de la Lune de Nophica . Les parties concernées sont priées de se faire accompagner par leurs témoins qui seront entendus au cours de l'entrevue. Les parties concernées peuvent se faire représenter par un avocat.


Cabinet de règlement des litiges maritimes
Procureur Eline Froncelet, magistrat de Sharlayan



"Vous voilà officiellement invitée à Sharlayan, capitaine Kurusu. Conclut le musicien, un sourire dans la voix.
- Je n'en esperais pas tant. Combien de jours aurais-je devant moi ?
- Un visa de sept jours pour deux personnes, avec une possibilité de rallonge si la procédure judiciaire traîne un peu.
- Votre mère est redoutable.
- Elle sait quelles oreilles entendent ce qu'elle a à dire."

Kikyo replia le document avec précaution afin de l'ajouter à son dossier portant en lettres d'or le nom "SHARLAYAN". Son regard dévia sur l'autre lettre, celle qu'il avait reçu de Silius. Il n'y était pas pour rien, assurément, bien qu'il ai été rappatrié de force il contribuait depuis Sharlayan à faire parler de l'Eternal chaque jour un peu plus. Elle devrait lui répondre, et lui annoncer la nouvelle par l'intermédiaire d'Ivanhault.
"Je ne vous cache pas que l'audience en elle-même sera rapide et inintéressante."
La voix posée de Valentinaul la sortit de ses pensées, il avait continué son monologue explicatif sans s'interrompre, la pensant toujours attentive ; ce qu'elle tâchait d'être. Sharlayan n'était pas une cité aussi paisible qu'on pourrait le croire. D'après Ivanhault et Silius justement, l'éclatante blancheur de son pavé dissimulait de bien sales intrigues.
"Un arrangement à l'amiable sera rapidement trouvé sur présentation de votre registre confirmant que Monsieur Derinloire est bien membre de votre équipage. Un dédommagement financier sera proposé, sans doute assez généreux pour vous dissuader d'insister sur le préjudice.
- L'audience en elle-même m'importe peu. Que dit votre mère à propos du fait que l'on en parle à Sharlayan ?
- On en parle beaucoup, mes deux oncles sont rendus complices malgré eux de notre tentative lors qu'ils répondent à leurs visiteurs curieux d'en apprendre plus, ils cherchent à se justifier, ne pas perdre la face devant les Conservateurs."

Elle hocha la tête de nouveau.
"Capitaine, les sharlayanais ne voient presque plus aucun étranger dans la cité depuis des années. Croyez-moi, vous allez être scrutée avec attention.
- Cela ne jouera que davantage en ma faveur. Reste à résoudre la question de la personne qui me servira d'escorte.
- Vous avez une idée ?
- Non, pas encore. Je vais prendre le temps d'y réfléchir, merci Valentinault vous avez brillamment réussi votre coup."


L'elezen s'inclina alors respectueusement avant de quitter le bureau, satisfait, laissant derrière lui une Kikyo tout aussi satisfaite. Bien sur, à cet instant, elle pensa aux enfants et à Akira. Elle pensait qu'il lui faudrait des lunes pour atteindre son objectif, il était maintenant à portée de main, elle était invitée. Il faudrait une catastrophe planétaire cette fois-ci pour qu'il lui échappe et quand bien même la fin du monde ne l'arrêterait pas. Elle effleura du bout des doigts la chemise cartonnée.
"Vous n'avez pas fini de parler de moi, archons."




"Capitaine, j'ai une lettre à vous remettre."
La voix d'Ivanhault vint troubler sa difficile tentative d'une réponse à la lettre de Silius, une réponse qui ne sonnerait pas comme celle d'une supérieure en colère, ou d'une étrangère formelle. Autant dire que dans ces moments là, la domienne était dans la plus grande perdition. Le moindre mot gentil lui semblait ridicule, le moindre mot sérieux lui semblait inadapté.
Elle sauta sur l'occasion d'esquiver son syndrome de la page blanche, et posa sa main sur sa perle.
"J'espère que c'est une bonne nouvelle, aujourd'hui je ne veux entendre que des bonnes nouvelles.
- Elle vient de Sharlayan."

Piquée au vif par la curiosité, ce ne pouvait être un hasard que cette missive soit précédée de peu par celle de Rosamarine Dandelion. Elle posa sa plume et enfila sa veste en même temps que la voix de Nazah répondait sur la linkperle de l'équipage.
"Elle dit quoi ?
- Contrairement à toi Nazah, Ivanhault n'ouvre pas mon courrier."

On entendit des rires étouffés sur le canal, la voix de Hotaru s'y ajouta.
"Moi je le ferais. D'ailleurs je suis déjà en train de réfléchir à comment subtiliser cette lettre des mains d'Ivanhault."
Kikyo ne put s'empêcher, l'espace d'une demi-seconde, de sourire. Malgré les derniers déboires avec Kyuuji l'unité et la bonne humeur prenaient le pas sur tout le reste, et les nouvelles de Sharlayan enthousiasmaient vraiment tout le monde. Il fallait faire vite, avant de retrouver sa cousine cramponnée au bras de l'elezen, lui frappant l'épaule avec une geta pour tenter de lui faire lâcher la lettre.
... Pourquoi j'imagine ce genre de choses ?

Elle les trouva au salon de l'équipage, parlant d'autre chose mais sitôt que son second avait sortit la lettre de sa manche, Hotaru s'était mise à loucher dessus avec grand intérêt, si bien que Kikyo préféra se tourner pour ouvrir l'enveloppe. Elle sentait sur elle le regard insistant de sa cousine qui tendait le coup en espérant voir le contenu.
"...
- ça dit quoi ? ça dit quoiiiii ?
- Ivanhault, que savez-vous de ce Mouse ?
- Je ne sais ce que je suis autorisé à en dire, disons qu'il fait partie de ce que l'on pourrait appeller les services du renseignement."

Le visage du capitaine resta de marbre, mais en son fort intérieur elle jubilait. Que ce soit pour la soutenir ou la percer à jour, le simple fait que les "services du renseignement" sharlayanais la contactent et lui proposent une rencontre confirmaient sa réussite.
"Le fait que je reçois cette lettre immédiatement après l'invitation officielle à me rendre à Sharlayan n'est pas anodin."
Ivanhault hocha la tête avant de demander.
"Quand devez-vous y aller ?
- Le 30, cela nous laisse le temps de rentrer de Golmorre avant que je ne prenne le premier navire pour le vieux continent.
- J'allais vous dire qu'il n'était pas une bonne idée en effet d'accoster directement avec l'Eternal."

Elle acquiesça d'un regard entendu vers son second. Il était prudent, elle était calculatrice, autant jouer sur les deux tableaux. Ne pas voir l'Eternal entretiendrait les rumeurs tout en gardant navire et équipage loin de tout piège éventuel.
"C'est un visa pour deux personnes, sept jours. Il me reste à choisir qui de vous tous l'accompagnera en premier.
- Ivanhault, répondit aussitôt Valorius.
- Ivanhault n'a pas besoin de visa pour aller à Sharlayan.
- Je suis citoyen, renchérit le concerné.
- Autant en faire usage pour quelqu'un qui ne peut encore y aller, quelqu'un de réellement enthousiaste..."

Tous les regards convergèrent vers Hotaru, impassible en apparence, qui n'eut pour seule confirmation que :
"On part quand, déjà ?"
Elle avait déjà décidé.





De retour devant sa page blanche, Kikyo posa son front contre ses mains et ferma les yeux. C'était du concret cette fois, plus d'anticipation ou de calcul sur une table de probabilités, c'était réel. Elle allait se rendre à Sharlayan, et mettre la main dans le panier de crabes. Bien sur, ce ne serait pas Hotaru qui l'accompagnerait à l'audience mais Ivanhault, emmener Hotaru avait une toute autre utilité
La lueur des chandelles éclaira le bas du visage de Kikyo, un sourire naissant au coin de ses lèvres. . Là-bas, les regards seraient braqués sur elle, le capitaine étranger, on allait certainement surveiller Hotaru aussi mais avec moins d'aplomb surtout si elle recommençait à jouer de son côté "gentille cousine effacée" à l'orientale, plus discrète et timide qu'une enfant pour quiconque se laisserait berner pendant les quelques heures que durerait d'audience.
"Les services du renseignement, hm ? Voyons voir ce qu'ils pensent de ma redoutable vigie."
Les mots lui vinrent finalement, pour sa réponse à Silius.



Très cher Archon Derinloire,

Savoir où vous êtes et que vous allez bien ne rend pas votre absence moins désagréable.
Savoir que nous vous manquons ne rend pas votre joie d'être gardé loin de nous sujette à représailles.
Cependant, savoir ce qui nous attend même si ce ne sera pas moins difficile, permet d'anihiler le doute et les pensées contradictoires. Ne reste plus désormais qu'une seule route bien droite parsemée de trous et de pièges pour la plupart bien visibles, qui nous séparent de l'arrivée. Cela vaut autant pour Golmorre que pour d'autres ambitions proches de s'accomplir.

J'ai grand hâte de vous revoir, égal à vous même, ne changez pas. Peut-être me permettra t-on de vous voir quand je poserais le pied dans votre cité d'ici le 30 de cette lune.


K. Kurusu

Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Levez l'ancre, cap au sud !"
Quand les voiles de l'Eternal se gonflèrent, poussées par la brise et le courant des chutes, beaucoup des membres de l'expédition se massèrent au bastingage pour regarder ce paysage une dernière fois. La Terre des Torrents, des chutes d'eau à perte de vue au coeur de la jungle de Golmore, des créatures fabuleuses, des ruines mystérieuses et des personnes qu'ils avaient appris à connaître, qu'ils avaient aidé, et parmi eux deux personnes qu'ils aimaient et devaient laisser derrière eux quelques temps. A son poste, le capitaine Kurusu serrait fort le gouvernail et luttait pour ne pas se retourner.
"Ce voyage nous a transformé, indubitablement."
La présence de son second à ses côtés était encore le meilleur moyen de focaliser son attention.
"Indubitablement."

Son regard se posa sur les membres de l'équipage, sur U'napa perchée dans les haubans qui agitait la main avec, sur le visage, un immense sourire dissimulant sa tristesse. Lucien demeurait auprès de son baron, le regard pensif mais pas autant que Valorius cloué à la proue qui ne pouvait détacher son regard des chutes qui s'éloignaient petit à petit. De tout l'équipage il était celui qui avait laissé derrière lui le plus gros, et même si personne ne doutait que la compagnie soit de nouveau au complet prochainement, nul ne pouvait nier ce petit pincement au coeur aussi discret soit-il.
"Nous repartons pour Eorzéa, capitaine ?
- Non, nous allons d'abord faire un crochet par Kugane. Ceux qui ne souhaitent n'auront qu'à prendre l'ethérite ce soir."

Il n'y eut aucune question, en tout cas pas pour l'instant. Sous couvert de rendre service aux Delacroix en leur offrant l'opportunité de s'harmoniser à une ethérite orientale, il ne faisait aucun doute que Kikyo comptait se rendre à Doma avec les enfants tant qu'elle en avait l'occasion. Elle avait à faire au Quartier Enclavé et pas seulement pour une affaire de famille qui traîne depuis des semaines ; sa prochaine visite à Sharlayan pourrait sans doute intéresser plus d'une personne dans le nouveau gouvernement du seigneur Hien. Et si ce n'était pas le cas, il resterait toujours sa famille.




Ils ne rentraient pas bredouille, bien que l'accueil -prévisible- eut été des plus froids. Outre les trouvailles botaniques et minérales, outre les quelques savoirs obtenu auprès des sentinelles de Naatu et l'exploration de la Terre des Torrents, il sembla que chaque personne à bord de l'Eternal durant ce paisible trajet du retour se sentait différent, changé. Certains libérés d'un poids, d'autres davantage tourmentés, des visions s'étaient reforgées, des opinions reconsidérées, certaines voies s'en étaient trouvées altérées puis modifiées, pour le meilleur dira-t-on. Aucun ne regrettait d'être venu, et d'avoir pris ce risque. Se posait toutefois la question "et maintenant ?" dans le regard de chacun.
"Et maintenant, capitaine, que fait-on ?
- Si les cartes d'Ivanhault disent vrai, nous aurons sous peu matière à nous occuper et puis il vaut mieux préparer l'Eternal. Il a déjà survécu à deux fléaux je m'en voudrais qu'il sombre sous mon commandement au troisième.
- On renforce et on attend, donc.
- Pour commencez vous allez tous prendre du repos."


La Mer de Rubis se rapprochait à vue d'oeil, le Couvercle des Enfers fumait toujours à l'horizon, et les navires croisés en chemin typiquement orientaux lui donnaient un petit avant-gout de ce qui l'attendait : son pays.
Si vraiment le pire était à envisager dans les semaines, voir les jours à venir, elle ne voulait pas avoir le moindre regret. La côte yanxienne lui apportait toujours une vision de réconfort mais cette fois-ci ce n'était qu'un pincement au coeur de plus. Quelle mère serait-elle de ne pas donner à ses enfants l'occasion de voir leur père ce soir, lors de leur escale en orient ? Et en même temps, la situation était toujours aussi compliquée, ces quelques jours dans la jungle n'avaient rien changé à ce qui l'attendait probablement sur place. La seule qui risquait d'avoir changé, c''était elle.
"Quelque chose vous perturbe, capitaine.
- Hm ? Non, non."

Tout dans son attitude disait le contraire, mais il était hors de question d'en parler et de perturber un voyage de retour déjà marqué par l'absence de Meleth et Hotaru. Cela ne regardait qu'elle de toute façon.

Au coucher du soleil, l'Eternal atteignait enfin le port de Kugane sous un ciel de feu et au parfum de thé. Les lumières du port hingashien s'allumaient les unes après les autres, leurs reflets dansant sur l'eau d'une mer calme. Certains allaient probablement se diriger à grande vitesse vers l'ethérite la plus proche, aussi on accosta sur la jetée la plus proche du Shiokaze. Le capitaine attendrait que tout le monde soit descendu pour laisser le vaisseau à la surveillance des pantins et s'en aller à son tour sur la place centrale où Sunori les attendait.


"Bon retour chez vous, Kurusu-tsubone."
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Je vous défie, devant mes hommes et devant les vôtres.
- Enfin."

Elle en brûlait d'envie depuis si longtemps, il n'en serait tenu qu'à elle ce combat aurait été bien plus rapide mais elle se devait de montrer qu'elle ne tirerait pas sa lame sur commande uniquement parce qu'il l'exigeait. Ce n'est plus à lui qu'elle avait des comptes à rendre et ils étaient nombreux encore à penser qu'une infime partie d'elle risquait de se soumettre à ses volontés, elle l'avait compris plus tôt dans la journée lorsque Kyuuji avait exposé ses craintes en toute franchise ; et il était là ce soir avec les autres.
Ma véritable force...
"Besoin d'une lame cap'tain ?" lança Haku Rei l'une des nouvelles recrues. Celui-ci ne comprenait pas grand chose au conflit qui conduisait le couple Kurusu à se confronter ici et maintenant une bonne fois pour toutes mais il porta prêta malgré tout son katana à l'ex-duelliste Kakita sans chercher plus loin lorsque celle-ci lui tendit sa main droite en guise de réponse sans lâcher le Tigre du regard.

On ne raisonne pas avec le tigre, soit on l'affronte soit on s'enfuit.

La pièce lancée par U'napa tomba sur le pont du navire. Aussitôt les coups fusèrent, et Kikyo se laissa surprendre par les nouvelles capacités que son mari avait développé durant sa retraite. Il était toujours aussi fort, non il l'était bien plus qu'avant. Mais il était sur son terrain à elle, sur son Eternal.
Les orbes sombres qu'il projeta furent stoppées par une poulie qui se décrocha sans raison pile à ce moment, et bascula pile dans la trajectoire. L'objet fu propulsé sous l'impact à l'autre bout du navire, un instant que Kikyo se devait de mettre à profit. Les passes d'arme s'enchaînèrent, tantôt mêlées d'apparition de l'avatar démoniaque au-dessus d'Akira, tantôt troublées par les mouvements chaotiques de l'Eternal qui semblait plus que partit pris pour son capitaine au-delà de toute idée de hasard. Ni l'un ni l'autre ne faisait semblant, et vint le moment où, blessée, la demi-raenne commençait à fatiguer.
Pas maintenant, pas après tout ça...
Elle pouvait entendre les cris d'encouragement de Napa qui faisait concurrence à Isarmaux. Les souffles de Hotaru dont elle savait que les petits poings se tendaient chaque fois qu'elle murmurait "oui c'est ça !" lorsque sa lame passait la défense du tigre. Le bois du pont virait sous ses pas, le navire tanguait de sorte de l'équilibrer. Elle ne pouvait pas perdre, elle ne VOULAIT pas perdre.

A l'aura sombre de l'ancien chevalier noir répondit une aura blanche étincelante comme le diamant. Elle parvint à le faire reculer, encore et un peu plus jusqu'à le faire tomber dans l'escalier.
"Voilà le diamant" entendit-elle dans la bouche d'un Valorius captivé par le combat.
Vive et précise, lorsqu'il se redressa et que l'ether autour de lui commença à s'accumuler elle ne lui laissa pas le temps d'entreprendre une autre de ses nouvelles techniques dont elle ignorait la nature mais dont elle savait le danger. Elle fusa sur son adversaire, la lame au clair trancha dans la première blessure au torse qu'elle lui avait infligée.
Il se figea, une gerbe de sang au coin des lèvres, son aura de ténèbres se dissipa. Elle ne vit que son sourire satisfait avant qu'il ne s'écroule à ses pieds, vaincu.
"VALORIUS !"
Le médecin de bord accourut sans attendre.




La musique résonnait encore sur le pont, le violon d'Iko accompagnait les rires et les chants tandis que l'équipage fêtait la victoire, trinquant à leur capitaine. Les armes au fourreau, les adversaires furent invités à se joindre aux réjouissances tandis que dans la cabine du capitaine, le tigre allongé sur le matelas se reposait en silence. L'Eternal avait levé l'ancre pour la nuit, et voguait à présent dans les cieux au-dessus des nuages, dans la plus paisible des nuits pour chacune des personnes présentes à son bord.
Il avait été soigné, et on l'avait laissé s'entretenir avec Isarmaux et Ishii-san avant qu'il ne remonte mais la fatigue le tenaillait autant que Kikyo qui l'avait jusque là caché tant bien que mal. Personne ne posa de question lorsqu'ils prirent congés, tous conscients de leur état sans leur faire l'affront d'en parler ouvertement.

Une fois les enfants dans leur lit et bien bordés face à la grande fenêtre par laquelle ils pouvaient s'endormir en voyant les étoiles, Kikyo s'approcha de lui. Le maquillage cachant les cernes de ses insomnies avait complètement disparu, sa chevelure décoiffée par le combat et son corset mutilé n'affichaient plus une seule trace de cette glorieuse victoire mais Akira n'en disait rien, il avait les yeux fermés et ne bougeait déjà plus. Après tout cela, tout ce temps, il n'avait eu que quelques mots et simplement reconnu sa défaite.
Baka...
Elle ôta ses vêtements et enfila une chemise propre de son armoire. Se glisser à ses côtés lui prit un moment tant elle hésitait à l'approcher, mais après trois jours sans dormir, elle sentait le sommeil venir enfin. A partir de demain plus rien ne serait pareil ; elle ne voulait pas y penser tant que demain ne serait pas là. Elle avait envie de lui, de le retrouver pleinement, mais après tout ce qu'il lui avait fait subir, quand bien même ce fut dans le seul but de la pousser à le surpasser, elle se refusait à lui céder d'un milimètre sur ce terrain-là. Elle voulait juste pouvoir s'endormir enfin, près de son visage et une main à peine posée contre son coeur.


"Vous ai-je seulement manqué, anata ?
- Bien sur."

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