[Kikyo] III - Au-delà de l'Eternel

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Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Jadis puissante et imprenable, la cité de Nym était à présent réduite à l'état de ruines dont certaines flottaient encore à quelques yalms du sol. La pierre vieillie et pourtant toujours aussi blanche réfléchissait les rayons d'un soeil rayonnant et tandis qu'elle marchait entre les allées immergées, Kikyo imaginait la vie qui autrefois peuplait cette contrée.
"Pourquoi venir ici, maîtresse ?"
Shinme suivait d'un pas léger, ces rares moments seule à seule se faisaient si rares qu'elle en savourait chaque seconde, et Kikyo elle-même savait combien cela importait, surtout en ce moment.
"Une intuition, répondit-elle. Je me sens, depuis que le lien entre Nym et l'Ordre a été mit au jour, une envie et une curiosité à l'égard de ces lieux.
- Nous n'avons toujours aucune réponse de Sharlayan malheureusement."

La raenne baissa les yeux, coupable sans doute dans son esprit de n'avoir pu obtenir les informations attendues. Elle n'était pourtant coupable de rien. Kikyo s'arrêta et se tourna afin de poser sa main sur sa tête, lissant doucement la chevelure d'ambre.
"Cela ne fait rien, nous verrons ce que l'avenir nous réserve. Regardes où nous sommes."

Le vent qui se leva gonfla sa chevelure qui retrouvait peu à peu sa couleur d'origine. Sans les obligations de la noblesse et l'image de l'épouse au sang Kakita, sans Sanjuro-nii-sama et son désir de lui inspirer fierté et honneur, quel intérêt y avait-il encore à perpétuer ce rituel propre à la Grue ? Cela avait d'ailleurs surpris sa suivante lorsque, à la sortie de son bain, elle avait finalement écarté le flacon d'eau oxygénée en secouant la tête. "Jettes ceci" avait-elle dit d'une voix douce, le regard vide de toute expression ; bien sur Shinme s'était exécutée et avait assisté, jour après jour, au retour de ces teintes châtain sur les cheveux de sa maîtresse, semblables à l'unique mèche de cheveux de Kiyo. De dos, ainsi, il n'était pas difficile de s'imaginer la silhouette de ce petit bébé une fois adulte.
"Pensez-vous que nous devrions orienter nos recherches sur Nym, maîtresse ? Osa demander la suivante.
- Oui, je le penses. Mais avant nous avons certaines affaires à régler."
Shinme acquiesça.
"Et si vous me le permettez, il n'est guère prudent de rester ici trop longtemps.
- Tu as raison Shinme, rentrons."

L'escapade touchait à sa fin, déjà, et pourtant d'avoir pu marcher quelques instants ici semblait avoir provoqué chez Kikyo un regain d'énergie et de motivation. Elle ne s'attarda pas davantage, elle et sa suivante tournèrent les talons en direction du lac d'Airain et de son ethérite, sans se douter que debout sur un promontoire deux silhouettes félines observaient de loin. Celles-là n'étaient pas ennemies, du moins pas dans le sens envisagé. Ils n'étaient ni les amis, ni les ennemis de qui que ce soit.

"C'est elle, tu en es sure ? Demanda une voix féminine.
- Certain, ma chérie. Je le sens au plus profond de moi.
- Je te fais confiance, mais si tu m'appelles encore une fois "ma chérie" tu dînes avec les requins."

Un feulement accompagna cette dernière tirade tandis que la miqo'te aux cheveux de nuit rajustait son chapeau orné d'une plume, trois fois trop grand pour elle. Elle s'étira ensuite :
"Quand je pense qu'on vient de passer les trois dernières années à écumer la Mer de Rubis pour finalement trouver ce qu'on était partit chercher en pleine Noscea...
- L'ironie du sort, je dirais. Si on était resté ici on lui serait tombé dessus tôt ou tard. Reste plus qu'à...
- Woh, woh, woh ! Déjà on va y aller molo mon chaton. Destinée ou pas, je veux être archi certaine que c'est la bonne personne.
- Dis plutôt que tu n'es pas pressée de..."

Le miqo'te mâle s'approcha, forçant sa compagne à plisser les yeux pour ne pas trop souffrir des rayons du soleil réfléchissant dans sa fourrure immaculée.
"... Mal aux n'yeux... Putain d'Esprit Blanc."
Il se pencha, réclamant un baiser innocent. La femelle leva les yeux au ciel, avant de tendre le cou vers lui. C'est le moment que choisit une voix aigüe et bien connue pour sortir de leurs linkperles respectives.
"Yoh, Chapitaine, ici Sinae ! Dites, j'en ai un peu Rahz la barbichette de faire le garde d'enfant pour vos chiards. Rihnn ta fille a emprunté ton bâton pour frapper sur le timmonier.
- DE QUOI ?!"
S'exclamèrent les deux en même temps.
Ni une, ni deux, le couple de miqo'tes s'empressa de retourner vers les hauteurs du volcan. De l'ombre du versant, se dessina lentement celle d'un navire dont les voiles arboraient fièrement le symbole de Llymlaen tandis qu'ils s'enfonçaient dans la jungle.

Au Lac d'Airain, la rumeur commença à se répandre, on avait cru entendre une phrase bien connue que nul n'avait entendu depuis des lunes.


"PAR LES COUILLES DE LEVIATHAN SIN, JE VAIS TE TUER !"
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Ton époux est plus robuste qu'une armée, il va s'en remettre."
Un jour de plus à son chevet silencieux, et le Tigre du Lotus Blanc n'ouvrait toujours pas les yeux. Elle l'avait déjà vu blessé, elle l'avait déjà vu mourant, mais elle ne l'avait jamais vu plongé dans une telle léthargie sans savoir quoi faire, sans savoir quand ni comment il se réveillerait. Ses jours ne sont plus en danger disent les géomanciens, mais alors pourquoi ne se réveille t-il pas ? Encore une fois il s'était donné corps et âme pour sa famille, pour son pays, encore une fois il avait bravé le sort sans un regard sur ce que l'on peut bien dire de lui, encore une fois il avait fait ce qui devait être fait quitte à y laisser la vie.
"Je suis désolé d'entendre ces mauvaises nouvelles, Kikyo."
Lantis la ramena contre lui, tâchant de rester calme. Il était le seul à connaitre ce visage chez elle, le seul qui l'avait connue suffisamment tôt dans sa jeunesse pour qu'elle n'ai aucun moyen de bloquer ses émotions. Kikyo se serra contre lui, le souffle court.
"Trois jours avant, nous nous étions disputé. Il en faisait encore des caisses avec ses fichues convictions sur le respect et l'engagement, je lui ai dit que le monde ne tournait pas autour de son égo... j'étais en colère, j'avais passé une mauvaise soirée et je ne l'ai pas écouté. Je n'ai pas envie que les derniers mots que nous ayons échangé soient...
- Hé... nous parlons du Tigre, pas d'un vulgaire soldat."

Malgré le différent qui l'opposait à cet homme, s'il y avait une chose sur laquelle il s'entendait avec lui c'était sa vision du destin et sa manie de contrer le sort quoi qu'il en coute. Il était même prêt à se présenter lui-même à Ten no Tsuki pour l'examiner si elle le lui demandait. Mais ce soir elle n'avait besoin que de l'étreinte d'un ami, à l'abri des regards et des jugements, pour elle comme pour lui.

Depuis que Lantis avait été banni du Lotus les choses n'étaient plus aussi évidente. Elle se voyait confronté aux regards mauvais de personnes qu'elle ne connaissait pas mais qui connaissaient Licinia, lui reprochant sans doute mille et un méfaits joliment édulcorés. En temps normal cela ne l'aurait même pas affecté mais Lantis se retrouvait pas dans une situation inconfortable, à marcher sur des œufs car toujours loyal à sa meilleure amie. Elle avait un temps pensé qu'il garderait ses distances, il n'en était rien, elle s'était même trompé au plus haut point. Il avait même proposé de la présenter à ces personnes, qu'ils puissent la voir différemment mais elle refusa. Ce n'était pas vraiment le moment, et puis à quoi bon ? Elle ne voulait pas lui attirer plus d'ennuis.
"Je ne t'abandonnerai jamais." ces mots de la seule personne au monde qui avait dans une autre vie presque provoqué les mêmes palpitations de son cœur qu'Akira, c'était suffisant.
"Tu m'as maqué, Lantissu no baka
- Toi aussi tête de mule."

Il fallait pourtant bien le partager, il n'avait pas manqué qu'à elle. Ils n'étaient pas entrés au relais depuis une minute que des mains se levèrent pour le saluer.
"On dirait que c'est déjà la fin de nos retrouvailles..." Pensa t-elle avec un sourire que lui seul voyait.

Tous semblaient vouloir fêter le retour du médecin. Ce soir-là fut une véritable bouffée d'oxygène pour Kikyo qui rentra à Shirogane tard dans la nuit. Les enfants, inconsolables, avaient fini par s'endormir, et Akira Kurusu reposait presque paisiblement un autre bâtiment. Par moments, l'ombre silencieuse d'un shinobi passait dans le couloir, même les servantes se faisaient les plus discrètes possibles.
Kikyo se rendit au chevet de son mari, passant doucement sa main dans ses cheveux. Le linge qu'elle utilisait pour le laver chaque jour avait été changé, ainsi que les fleurs dans le vase. Le thé avait refroidi, comme la brise une fois la nuit tombé.
"Je vous interdis de me faire cela, murmura t-elle. Je vous interdis de me laisser de la sorte avant que nous ayons pu nous retrouver, avant que vous ne puissiez voir de vos yeux à quel point vous aviez tort."
Elle sourit, malgré tout, tâchant de rester confiante. Elle l'imaginait en train de lutter dans son propre corps pour se réveiller, une vision bien épique et sans doute peu réaliste, mais ô combien proche de ce qu'elle voyait en lui. Ce n'est pas un Oni qui le ferait tomber, pas après tout ce qu'il avait déjà accompli face à la corruption. Lantis avait suggéré une chose ce soir, une chose à laquelle elle n'avait pas pensé et pourtant si évidente : les rêves. Peut-être qu'il était en train de rêver, et qu'avec un peu d'aide, elle et Hotaru pourraient ouvrir la porte pour le trouver et essayer de comprendre.

La nuit passa sans un bruit. Kikyo avait dormi là, comme les nuits précédentes. Qu'il soit ou non dans le comas, il était son mari et c'est auprès de lui qu'elle passerait ses nuits. Elle n'avait aucune envie de rentrer et de s'allonger dans ce lit froid. Elle ne le quitta que pour s’acquitter de ses devoirs, après avoir pris le temps pour leurs enfants et avant de les confier à Shinme. Elle ne pouvait passer ses journées à son chevet, à attendre qu'il ouvre les yeux, mais elle serait rentrée bien assez tôt.
"Où allez-vous d'un si bon pas, maîtresse ? demanda Shinme, prenant Kimiko dans ses bras.
- Au quartier général du Maelstrom, il est au moins un des officiers dont je sois certaine qu'elle n'est pas de mèche avec l'Oeil, et qui m'aidera sur mon projet."
La suivante acquiesça, soucieuse elle aussi mais à cet instant son attention revenait à la petite princesse du Lotus Blanc. Depuis que le seigneur était dans cet état, elle culpabilisait bien assez de ce qui était arrivé. Comme tant d'autres, elle n'aspirait qu'au réveil de son chef de clan. Elle laissa donc partir Kikyo qui traversa Shirogane jusqu'à l'ethérite pour se rendre à Limsa Lominsa.

L'été approchant, elle ne voyait plus les couleurs du ciel et la beauté qui s'éveille. Elle ne voyait plus que ses ennemis qu'elle voulait défaire une fois pour toutes, elle ne voyait plus que les navires si grands et si complexes dont il lui fallait comprendre le fonctionnement, elle ne voyait plus que ses objectifs. Mais dans la tourmente, il y avait encore un éclat.
Onze heures, la pendule au-dessus de la porte du bureau de l'officier sonna, cette insupportable musique que l'on colle aux chocobos. Debout dans le couloir, Lantis l'attendait, vêtu à la noscéenne pour changer de son éternelle blouse de médecin.
"On y va ? demanda t-il avec un sourire.
- On y va."
La porte du bureau s'ouvrit, et c'est ensemble qu'ils entrèrent sous les salutations surexcitées de la miqo'te en uniforme rouge flamboyant. Elle était visiblement très enthousiaste concernant leur petite histoire, d'un autre côté elle était toujours trop enthousiaste pour tout.
"Comme au bon vieux temps, hm ? Le camp d'entrainement, mais sans l'occupation et la servitude.
- Voyons si on forme toujours une bonne équipe."
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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La musique résonnait dans la cathédrale, et alors que tous s'étaient rassemblés pour entendre l'éloge funèbre à Gualeb, elle demeurait silencieuse et effacée. Quand le prêtre de Halone invita Yul à parler, elle écouta sans réagir. Sans un mot elle suivit le rite, avec le respect du aux morts, elle semblait absente. C'est à peine si elle regarda le corps et le cercueil, à peine si elle adressa un signe de tête à Mineko, à peine si elle affichait une quelconque présence.

Et puis le prêtre demanda à ceux qui le souhaitaient s'il voulaient prononcer quelques mots. Ainsi qu'elle l'avait promis à Nazah, elle s'avança enfin, et enfin elle osa le regarder. Il était là, couché, comme endormi au milieu de ces fleurs aux couleurs pâles, l'air paisible.
Elle prit une profonde inspiration.

"Impulsif, impétueux, certains -dont moi- ont dit imbécile à maintes reprises. Combien de fois as-tu mit les autres et toi-même en danger, et pourtant tous croyaient en toi, et y croient encore. La seule chose que nous peinons à croire, c'est que tu n'ouvres pas encore les yeux... Que tu ne les ouvriras plus."
Elle entendait Albynn, quelques pas derrière elle, pleurer à chaudes larmes.
"Toi qui avait accepté que les héros n'existent que dans les livres, c'est un élan d'héroïsme qui t'a emporté. Un élan qui te ressemble. Impulsif, courageux, stupide et pourtant ô combien admirable dans nos esprits altérés par le manque que provoque ton absence.
Karashirr s'est éteinte, alors que tu t'apprêtais à la brandir. Elle sera conduite au tombeau des Gauphron, là où aucun d'entre eux ne repose. Elle attendra, encore mille ans, plus encore, qu'un autre phénix vienne la prendre ; mais il ne viendra pas."

Elle marqua une pause, prenant une profonde inspiration.
"Le Phénix Gauphron s'est envolé, il brille parmi les étoiles au-dessus du Coerthas. Il n'a pas besoin d'épée, ni de tombeau."

Elle tourna les talons, retournant s'asseoir sur son banc au troisième rang, loin des amis et de la famille. Elle ne regarda personne, et quitta l'église dès la fin de la cérémonie sans s'attarder. Elle ne suivit pas le cortège, elle n'assista pas à l'enterrement, un seul regard sur le jeune homme endormi lui avait suffit à accepter sa mort, elle ne voulait pas le voir disparaître dans les ténèbres d'une tombe même si elle respectait les coutumes ishgardaises, elle ne le pouvait pas.
Elle marcha le plus loin possible sur les Contreforts, jusqu'à s'appuyer à la rambarde d'une terrasse donnant sur l'Assise.
"Imbécile" souffla t-elle, la gorge nouée. "IMBÉCILE !"

Son cri fut aussitôt emporté par le vent, disparaissant à jamais. Elle ne parlerait plus jamais de lui, ne mentionnerait plus jamais ce nom. Il était tombé, avant de pouvoir accomplir son ambition, avant d'atteindre son objectif, alors qu'il commençait tout juste à y voir clair et à progresser. Encore une injustice due à ce monde malade, à ces folies qui le gangrènent un peu plus chaque jour. Gualeb n'avait plus d'avenir, lui qui n'en désirait un que depuis peu, à quoi bon lui donner de l'espoir si c'était pour en arriver là ?
Elle ne pouvait tous les sauver, elle le savait. Nombre d'entre eux mourraient encore dans cette guerre. Un autre était coincé entre vie et non-vie à attendre qu'on le libère d'une façon ou d'une autre. Deux étaient encore otages d'un ordre rival qui pouvait les tuer à tout moment. Elle sera les mains autour de la pierre froide. Sa linkperle vibra près de sa corne, elle entendut la voix d'Amélianne.
"N..Nazah! Ivanhault! C... Frédérick se réveille!"

Elle se redressa lentement, le regard figé. Enfin une bonne nouvelle.


Au moins un héros avait ouvert les yeux.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Johanna jugeait avec beaucoup de sévérité le résultat de son propre travail. Déjà trois retouches alors qu'elle venait d'enfiler la première tenue. Kikyo ne bougeait pas, plus inquiète de contrarier la couturière que de se prendre malencontreusement un coup d'aiguille. Le corset n'était pas un problème pour elle, pas plus que le large ceinturon, seul le chapeau lui était étranger après tant d'années à exhiber sa longue chevelure, symbole de fierté pour la noblesse orientale. Elle ne parlaient pas vraiment, l'une comme l'autre ; pour Kikyo ce n'était pas une première mais cette fois-ci l'ambiance générale était plutôt à la morosité. Le sort avait voulu que malgré tous leurs efforts il était déjà trop tard pour Meryl et Ana, rien n'aurait pu les sauver, mais malgré cela et c'est bien normal, les hommes culpabilisaient ou se taisaient par respect. D'une manière générale, les coeurs n'étaient pas à la fête, d'autant plus qu'elle leur avait annoncé la suite des évènements concernant le Sceau et les Quatre.
"Je pense que c'est bon, madame.
- Bien. Alors, de quoi ai-je l'air ?"

Jo la regarda des pieds à la tête, une moue d'abord dubitative suivi d'un sourire satisfait.
"D'un capitaine, madame."
Kikyo souffla un coup, rassurée. Même devant le miroir elle peinait à réaliser sa propre image. Étrangeté, que quelques morceaux de tissus et de cuir vous fassent vous sentir aussi différent.
Elle se sentait changer, presque trop rapidement. Revoir Oyuun lors de ce duel, voir la progression de son ancien commandeur aujourd'hui épanouie dans sa nouvelle vie, manier de nouvelles armes, développer de nouvelles techniques, tout cela lui faisait prendre conscience à quel point elle avait elle aussi changé tout en ayant le sentiment de rester immobile, coincée dans son devoir de chef de compagnie, faisant toujours passer les problèmes des autres en priorité et les ennemis qui s'enchaînaient sans jamais lui laisser le temps de juste se regarder dans un miroir et se voir grandir.

Elle se demandait si c'était ce qui s'était passé pour les commandeurs d'autrefois, aveuglés par leur mission au point de ne pas voir qu'ils changeaient, qu'ils sacrifiaient leurs enfants dans un rite peut-être nécessaire, mais ô combien tragique.
Comme beaucoup, elle avait d'abord été en colère, songeant que ses rêves, les messages qu'on lui avait porté, tout ceci n'était que mensonge ; en se calmant elle avait longuement réfléchi. Et si ce n'en était pas un ? Owleen parlait d'une ancienne magie qui influait sur le temps, pour faire passer un message à travers les siècles. Et si, au soir de leur existence et face à l'inévitable cataclysme, le Conseil des Quatre sentant qu'ils n'avaient plus le temps de corriger leur faute, avaient envoyé un message pour que d'autres viennent finir cette histoire à leur façon. A bien y réfléchir, ils leurs avaient laissé les armes, les clés, les indices, mais aucune indication comme s'ils avaient souhaité ne pas intervenir post-mortem dans ce qui arriverait. D'une certaine façon ils leurs ressemblaient, ils avaient confiance en les générations futures.

"Madame ?
- Hm ?"

Sortie de ses songes, elle observa le reflet de Johanna dans le miroir, par-dessus son épaule.
"Vous ne m'avez toujours pas dit ce que vous en pensez."
A nouveau Kikyo porta son attention sur sa propre image. D'ici peu de temps elle serait pilote, capable de tenir la barre du Corbeau sans l'assistance d'un pantin, et d'ici quelques lunes elle serait parfaitement à l'aise à son poste. Malgré les remous et l'affliction réprimée, conséquence des pertes et des obstacles, elle nourrissait à nouveau cette ambition qui l'avait animée un an plus tôt lorsqu'elle partait pour Golmorre, vers l'inconnu. Les images de son combat contre Oyuun lui revinrent en mémoire. Forte, épanouie, engagée, disciplinée, et ouverte sur l'avenir. Il ne lui restait qu'à ouvrir cette fenêtre à son tour, ce que les commandeurs du passé n'ont jamais eu l'occasion de faire, fauchés par le Sixième Fléau.
"Ce que je vois me plait, Jo. Merci infiniment."
La styliste sourit et s'inclina, pressentant surement qu'elle devait laisser sa cliente de renom seule un moment. Face à face avec elle-même, le Haut-Commandeur commençait à entrevoir son propre avenir, nourrie par ses rencontres avec des femmes d'ambition et de poigne. Elle se sentait prête à mettre fin à ce cycle et à aller de l'avant, et plus loin encore. Une seule chose manquait à son bonheur, un seul regard sur la femme qu'elle deviendrait, pour être sure de son choix.


"J'arrive, anata."
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Es-tu prête à porter ce fardeau ?
- Je n'aurais pas à le porter bien longtemps."

Un dernier regard sur ses hommes précéda son dernier pas vers le Cerf Blanc. Pour mettre fin à cette partie, il fallait d'abord la rejoindre et jouer le jeu le temps qu'il faudrait pour gagner du temps. Ce rôle était le sien, celui du Haut-Commandeur, choisi et reconnu par les siens et par ses pairs. Dès l'instant où la tiare se forma pour ceindre son front, elle sentit couler en elle l'ether de tous ceux qui l'avaient précédé, qui s'étaient avant elle retrouvés scellés. Elle baignait à présent dans leur immense pouvoir, une puissance qui ne lui appartenait pas, dont elle ne voulait pas quand bien-même pourrait-elle faire le bien avec ; cela dépassait de loin la capacité d'un être humain.
Était donc cela l'ancienne magie des nymiens ? Oui, ce genre de pouvoir pourrait faire trembler la terre, soulever des montagnes, et détruire le monde dans son esprit de néophyte. Elle avait toujours tenu la magie pour responsable de bien des maux et cette sensation aussi enivrante qu'effrayante la confortait dans sa pensée.
"Faites vite. Je tiendrais aussi longtemps que je pourrais."
Ainsi furent ses derniers mots avant de disparaître.


L'archipel brisé autour de l'île de la Flèche était maintenant secoué par une tempête surnaturelle. Pour les météorologues de Limsa Lominsa, trop éloignés pour ressentir le trouble ethérique, cela passerait pour un vulgaire orage saisonnier de plusieurs jours mais pour ceux qui s'y tenaient à cet instant, c'était bien le signal. Elle apparut en bas des marches du pavillon des Quatre, reliquat de l'ancienne forteresse. Sauf qu'il ne s'agissait plus d'une ruine. A chaque pas qu'elle faisait, c'était comme si elle remontait le temps, les éclairs qui frappaient le sol faisant apparaitre des images de plus en plus nettes puis tangibles.
"Dépêchons-nous, il va s'ouvrir !"
Toutes ces voix dans sa tête parlaient à l'unisson, la sienne comprise. C'était le risque, qu'elle fusionne avec eux et se retrouve à son tour piégée dans le sceau pour l'éternité. Elle sentait que, comme elle, ils ne le souhaitaient pas. Aucun d'eux ne souhaitait que cela se terminé ainsi, bien qu'ils aient accepté leur destin avec dignité.
Elle se sentit soulever de terre tandis que les marches du pavillon se soulevaient dans les airs. Le bâtiment était en train de se reformer, les pierres sortaient de l'eau comme si elle y étaient tombées la veille, les murs s'élevaient derrière elle, et les cris des vivants se firent entendre. La bulle temporelle l'avait ramenée au moment précis où le sort fut lancé, à l'endroit précis dans cette salle du conseil où les Quatre se tenaient à chaque extrémité, les mains tendus et les yeux entièrement dorés. Au centre, un jeune homme attendait, le seul qui ne soit pas figé dans cette expression de douleur et de transe. Sa voix était douce, il était trop jeune pour mourir et pourtant le sourire triste et résigné sur ses lèvres en disait long. Il lui rappelait Byakuya, trop jeune et trop tendre pour avoir à supporter le poids d'une telle charge.
"Je ne voulais pas que cela se termine ainsi, murmura t-il, fatigué. J'aurais voulu... mais seul je ne le peux. Et mes hommes sont en train de mourir dehors... S'il vous plait, aidez-moi à en finir avec ce destin."
Il tendit sa main vers Kikyo, comme une supplique. Elle s'avança.

Le sort, le destin, tout ce qu'elle rejetait depuis le début. Elle avait contribué à détruire la Trame, elle avait refusé toute forme d'ingérence des esprits ou des dieux, et refusait aujourd'hui, exactement comme ses hommes, que ce qui fut écrit jadis leur impose un avenir qu'ils n'auraient pas décidé. Ces hommes s'étaient imposés une destinée pendant des générations, croyant faire le bien, avant de se rendre compte qu'il y avait une autre issue possible. Le Sixième Fléau les en avait empêché, ils étaient tous morts. Ils n'avaient plus rien à perdre, ils auraient pu abandonner et tenter de survivre ou bien mourir ensemble et laisser le Sorcier s'échapper, quelle importance cela aurait-eu pour eux ?
"Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ? Demanda Kikyo avec froideur, sachant qu'il avait vu la question dans son esprit.
- Parce que c'est mon pays... et aussi... c'est mon fils." Répondit Lucas, un sourire navré sur les lèvres. "J'ai bravé le destin, je m'en remets à vous à présent. Vous pouvez nous abandonner et combattre dans le présent, ou vous pouvez le détruire avec nous ici et maintenant."
Alors qu'il allait baisser sa main, Kikyo posa la sienne sur son poignet, elle le serra fermement.
"Mes hommes ont déjà bravé le sort plus de fois que je ne saurais les compter.
- ... Merci."



Tandis que sur les flots déchaînés, l'Eternal s'éloignait des côtes brisées, une colonne de lumière blanche perça le sommet du bâtiment, suivi bientôt par quatre autres qui se fondirent dans la première. On entendit un cri perçant, inhumain. Le vent se mit à souffler.



L'heure est venue. Le Destin est-il irréversible ?
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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Que ferions-nous si, l'espace d'un instant, fugace et unique, il nous était donné de toucher à un pouvoir ancien et qui nous semble absolu ? Pour les gens de ce monde, de cette époque, ou même de son pays où la magie est moindre qu'en Eorzéa, l'antique magie nymienne semblait réellement absolue. Ce pouvoir n'était pas le sien, il ne lui avait jamais été destiné, et si le sort basculait en sa faveur, elle le renverrait là où il devait aller. A aucun moment elle ne s'était sentie élue, à aucun moment on ne l'avait désignée comme telle, elle n'était que le vaisseau.
"Ils vont réussir !"
Cette quête, ce n'était pas seulement la sienne. Ensemble, ils mettraient un terme à ce cycle sans fin.

Autour d'elle, elle sentait le monde s'écrouler dans une tempête de fin du monde; une île qui s'effondre sous ses pieds, sur le point d'être engloutie par les flots. Cet aperçu du sixième fléau s'ancrait dans son âme autant que dans sa chair. Ainsi, c'est ce qu'ils avaient vu. Elle ne voulait ni ne pouvait les imaginer se tenant ici, immobiles, tenant aussi longtemps qu'ils pouvaient jusqu'à ce que la mort les prenne afin de sauver le maximum de leurs compagnons. Combien de temps avaient-ils tenus, une heure ? un jour ?

Un morceau de la tour se détacha et tomba dans le vide, sous les chocs du combat qui se déroulait sous ses pieds, manquant de la faire tomber. Elle n'aurait jamais cru, jamais pensé qu'une entité de lumière pourrait être aussi dévastatrice. D'ici, elle ressentait le feu purgateur de ce "démon blanc" qu'était devenu l'oracle Arkhémis. Et dehors, partout autour d'elle, ce n'était que nuages sombres et puissance du Néant. La sueur perlait sur son front, son corps ne tiendrait plus très longtemps une telle charge. Comment diabolos les anciens nymiens avaient-ils pu tenir tête à deux monstres pareils ?!
Les tremblements de ses bras annonçaient la fin. Il fallait qu'elle les trouve, il fallait qu'elle rejoingne le vaisseau.
"Mais où sont-ils ?!"
Comme pour lui répondre, deux voiles firent leur apparition derrière la tour. Une puissante aura réagit avec la sienne, comme un appel discret dans le feu d'une apocalypse. "Tiens encore un peu" murmurait-il dans son esprit, empreint d'une légère brise sortie de nulle part. En levant les yeux, elle vit sur le pont, penchée par-dessus le bastingage, un visage qui lui était si cher.
"Shinme..."
La raenne leva la main, comme si elle en appelait au navire. A la barre, Lantis , Hotaru et Hayabusa se tenant aux cordes, Fjrn, Kazami, tous ils étaient vivants et avaient probablement vécu nombre d'épreuves avant d'arriver jusqu'ici.
La voix de sa suivante retentit avec force, parvenant jusqu'à ses cornes : "A l'assaut, mettons fin à ce combat !"
Kikyo sentit ses yeux et son âme s'embraser. Quoi qu'il fut, ce navire répondait au Haut-Commandeur, il répondait à ses hommes. A nouveau elle entendit sa voix, une dernière fois à ses côtés.
"Ce fardeau qui ne t'as jamais été destiné, détruisons-le ensemble"
S'il vous était donné, pendant un court instant, de disposer d'un pouvoir qui vous semble absolu, qu'en feriez-vous ? Cette question, elle se la poserait certainement à maintes reprises quand tout serait terminé. Pour l'heure, elle ne pensait qu'à une chose.
"Finissons-en, une fois pour toutes."
Une onde d'ether déferla depuis l'Eternal jusque sur l'esplanade au sommet de la tour, passant à travers tout ce qui s'y trouvait. Ce n'était une force ni lumineuse, ni ténébreuse, ce n'était même pas un sortilège en soit. Elle sentait cette force brute, issue des âmes de tous ceux qui les avaient précédé en ces lieux et dans ce combat. Pendant une poignée de secondes elle devint aveugle et sourde, elle ne savait plus ce qui se passait. Puis, il y eu comme une cassure ; la tiare ceignant son front se ternit. Sous ses pieds, retentit une longue plainte d'agonie, l'entité vaincue était en train de disparaitre et au-dessus de leurs têtes, un morceau de ciel étoilé perça au travers de l'orage ; c'était la brèche dans la bulle temporelle, le passage pour retourner chez eux.
Elle fit un pas en avant, puis réalisa qu'elle ne ressentait plus cette présence. Le sceau s'en était allé, sa couronne n'était rien de plus qu'un bijou d'orfèvrerie, souvenir d'un destin changé pour toujours. Une corde lui fut lancée depuis le pont du vaisseau, qu'elle saisit. Dans son dos elle entendait déjà les pas de ses compagnons qui avaient combattu dans la tour. Quand elle monta à bord, elle savait qu'elle n'était plus le Haut-Commandeur, du moins, elle ne l'était plus dans le sens originel. Ils avaient achevé une quête vieille de plus de 1600ans, et le plus important...
"Vous êtes vous en vie..."
Fugace mais sincère, un sourire vint éclairer son visage juste avant que la raenne aux yeux d'ambre de vienne lui sauter au cou. Ils allaient tous pouvoir rentrer, il n'y aurait pas un mort de plus dans cette longue aventure.





"Haut-Commandeur ?
- Non, Gyoban.
- Pardon, je voulais dire, Madame, ils vous attendent."

Presque une semaine s'était écoulée depuis cette aventure sur l'Île de la Flèche. Calliopé ainsi que Rihnn Rahz avaient choisi de rester pour prendre la place des deux oracles manquant. A trois, ils avaient rétabli l'équilibre entre les trois couronnes et Lucas avait repris sa juste place. Ils avaient bel et bien changé le destin de personnes qui vécurent il y a plus d'un millier d'années.
Bien sur, Ako Rahz avait elle aussi choisi de rester, avec son équipage. Plus qu'un monde parasité par la guerre, c'est dans un monde nouveau à reconstruire et surtout à découvrir qu'ils s'en étaient allé pour de bon. Et aujourd'hui, elle était là, dans la cabine qu'occupait autrefois cette miqo'te si particulière. Elle avait eu toutes les peines du monde à raconter son histoire au Maelstrom, elle se doutait d'ailleurs que tous ne la croiraient pas mais au moins, elle disait la vérité.

Le bois craquait sous la houle, le vent soufflait sur la baie. Elle et ses hommes avaient brisé le cycle ; les Quatre Tours n'avaient plus de raison d'être et ne seraient plus jamais. Plus que la magie et les pouvoirs anciens, plus qu'une menace intemporelle contre laquelle elle était destinée à perdre encore et encore jusqu'à sa mort, elle avait trouvé sa juste place.
Posant sa main sur la poignée elle s'apprêtait à monter sur le pont quand, pris d'une pulsion soudaine, elle se tourna vers le namazu.
"Capitaine, je suis le Capitaine Kikyo Kurusu"


C'était la fin du Haut-Commandeur.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Est-ce vraiment le devoir du fort de se sacrifier pour le faible. Les serviteurs devraient mourir pour leur seigneur. C'est la seule réponse !"
Non, non... non !

Le son du bois qui se fend pour la dernière fois avant que la porte ne s'écroule et ne disparaisse la fit s'éveiller en sursaut. Ce n'était qu'une réminiscence passagère, pas un rêve. Elle ne parvenait pas à l'oublier, cet échec, et elle le voyait au quotidien. A ses côtés, le souffle régulier du tigre endormi dans la pénombre lui rappela l'essentiel : il était au moins en vie. Ils l'avaient ramené, ils avaient réussi l'épreuve de trois des quatre portes, mais la dernière avait pris quelque chose, une partie de lui n'était pas revenue avec eux.
Quelques pâles rayons de soleil passant au travers des rideaux touchèrent ses yeux, il devait être encore tôt. Plutôt que de le réveiller, plutôt que de rester immobile à le contempler et ressasser ces terribles instants, elle se leva et quitta la chambre conjugale.

La maison était vaste et silencieuse, beaucoup de caisses n'avaient pas encore été vidées mais les servantes les avaient rangées dans un recoin de l'entrée. Elles aussi s'agitaient plus que d'habitude, le changement dans le quotidien se faisait sentir. Passé l'inquiétude devant l'état léthargique du maître, son réveil et son nouveau comportement dans l'intimité de Ten no Tsuki ne passait pas inaperçu au regard de ceux qui partageaient son quotidien. Orgueilleux plus que de raison, il avait oublié ce pourquoi il était devenu seigneur et ce pourquoi il s'était toujours acharné à défendre les plus faibles. Pour tout le reste il était redevenu l'homme qu'elle connaissait, mais pour son orgueil qu'elle n'avait jamais plus cerner, c'était encore pire. L'entendre parler comme il le faisait des autres, de ses vassaux, lui aurait été insupportable si elle n'avait pas eu conscience qu'il n'était pas lui-même en disant cela, et qu'elle était responsable.
"C'est ce démon, Orochi, qui est responsable" lui murmura Akio lorsqu'elle passa près de lui. Le loup avait pris l'habitude de dormir devant la chambre des enfants en bon protecteur. Les pas de Kikyo l'y avaient conduit dans son errance matinale.
"C'est moi qui n'ai pas été capable de trouver la bonne réponse.
- L'orgueil a ses travers, tu ne peux porter cet homme à toi seule lorsqu'il tombe, et au lieu d'accepter un seul échec tu passe déjà tes nuits à réfléchir au moyen de réparer ce qui a été brisé.
- Il n'est plus totalement mon époux, Akio. Je peine à le reconnaître, quand il se montre aussi odieux je ne le connais plus, pourtant c'est bien lui et il ne parlerait pas ainsi s'il était dans son état normal. Pire, il n'hésiterait pas à s'en prendre à un homme proférant de telles paroles. Je ne peux pas juste accepter les conséquences cette fois, il faut que je lui rende ce qu'on lui a pris avant qu'il n'enseigne à Kimiko de tel-...."

Le temps qu'elle prononce le nom de sa fille aînée, le fusuma de la chambre bougea un peu. Trop lourd pour une petite d'un an et demi, c'est pas accoups que cette dernière montra le bout de son nez, le visage sérieux mais encore encore endormi.
"Papa dort ?" Demanda t-elle, presque comme un ordre.
Kikyo se pencha sur elle, finissant d'ouvrir la porte, et la souleva dans ses bras.
"Oui, mais il va se réveiller ce matin encore. Tu n'as plus besoin de te réveiller la nuit pour venir vérifier, papa est presque guéri maintenant.
- Alors pourquoi triste ?"

Kimiko se lova contre la poitrine de sa mère, le visage fermé. Malgré son jeune âge elle sentait elle aussi que quelque chose n'allait pas. Son père avait déjà été gravement blessé mais elle n'avait jamais témoigné d'une quelconque excès d'angoisse quand on lui disait qu'il allait guérir. Kikyo posa un baiser dans ses cheveux, tâchant de se montrer rassurante.
"Papa n'est pas encore tout à fait guéri, petit lotus. Il lui manque encore quelque chose.
- quoi ?"

La question était toute innocente, spontanée, quand l'enfant leva un oeil curieux comme si elle s'attendait à ce qu'on lui réponde qu'Akira Kurusu avait perdu sa peluche kojin. C'est avec des mots simples qu'elle tenta de lui répondre.
"Un but, afin de lui rappeler pour qui il est devenu le tigre que nous connaissons."




Quand ils rentrèrent du casino, la porte était à peine fermée que Kikyo retira ses talons en soupirant.
"La mode eorzéenne n'a pas que de bons côtés..."
Akira ferma les yeux, retrouvant son foyer. A cette heure les servantes, épuisées d'avoir passé la journée à ranger, étaient surement déjà couchées ainsi que les enfants. Akio semblant avoir disparu pour la nuit comme cela lui prenait parfois.
"Il est tard. Souhaitez-vous que je prépare votre bain ? Demanda t-elle, chaussures en mains.
- Oui."
Une demeure digne des Kurusu. Elle avait fait installer un bain oriental à l'image de celui de leur ancienne résidence, mais plus grand avec quelques améliorations. Une fois montée dans leurs appartements et après avoir dénoué son corset elle s'attacha à préparer le nécessaire. Qu'importe l'orgueil, il appréciait toujours autant les mêmes choses.

"Avez-vous besoin d'un thé ou autre chose ?
- Non, rejoignez-moi."

Elle acquiesça, sans vraiment de surprise bien qu'elle ne s'y attendait pas non plus. Il s'était certes réveillé mais depuis trois jours c'est à peine s'il lui avait accordé un regard. Et elle aussi, l'avait presque évité. Cette soirée au casino pour assister au concert de Shinme avait été l'occasion de se montrer ensemble et surtout de mettre fin aux rumeurs sur l'état critique du Tigre.
Une fois délestée de sa robe de soirée, Kikyo releva ses cheveux afin de ne pas les mouiller et se rinça le corps avant d'entrer dans le bain. Une éponge à la main, elle la présenta à son époux en guise de proposition silencieuse. Pour toute réponse, il lui présenta son dos.
"C'est vraiment l'un des plaisirs les plus simples.
- Hai. Simples et pourtant l'un de ceux que vous appréciez le plus.
- Mhm."

Elle plongea l'éponge dans l'eau avant de la passer avec douceur sur la nuque et les épaules du hyurois. Pendant des semaines elle avait lavé son corps immobile et engourdi, elle en redécouvrait les contours aujourd'hui. Mais alors qu'elle aurait pu tout donner pour retrouver son étreinte, c'est à peine si elle osait le toucher à présent. L'éponge glissait lentement sur son cou et ses omoplates, elle veillait à ce que ce soit la seule chose qui entre en contact avec sa peau.
"Utilisez votre corps, femme." dit-il fermement.
Kikyo cligna des yeux, surprise, fixant la nuque de son mari qui lui tournait le dos. Elle réalisa à quel point ses attentions n'étaient plus aussi naturelle après tout ce qui était arrivé et ce qui avait changé chez lui. Pourtant, lui ne pouvait se rendre compte de ce qui était différent chez lui. Il ajouta :
"Avez-vous peur de vous réveiller et que je dorme encore ?"
Un frisson remonta le long de son échine à cette simple idée et l'éponge tomba dans l'eau. Kikyo se rapprocha de lui, nouant ses bras autour de sa taille pour poser son front contre son dos.
"J'ai crains de ne jamais vous voir vous réveiller. Je ne cessais de penser que si je ne réussissais pas à vous ramener, je devrais vivre pour toujours avec les dernières paroles que nous avions échangé."
Oui, elle s'en souvenait de cette soirée où ils s'étaient disputé. Elle avait eu une dure journée et ils avaient ue des mots à propos de divers sujets et personnes, surtout Itaru qui lui devait toujours des excuses. Elle s'était emportée comme cela lui arrivait rarement, et avait fini par lui dire que le monde ne tournait pas autour de son égo. Ils en étaient venus à faire chambre à part, et deux jours plus tard il se sacrifiait pour protéger ses alliés face à Orochi. Cruelle irone que ce soit précisément la porte de l'orgueil sur laquelle elle avait échoué, et qu'il fut aujourd'hui encore pire que ce qu'elle lui avait reproché à ce moment là.
"Vous m'avez bien trop manqué anata, plus que je ne pourrais jamais l'avouer."
Pourtant, bien qu'elle ne supporte pas cet orgueil qui n'était pas le sien et qui faussait totalement son regard sur l'homme qu'elle aimait, c'était bien lui pour tout le reste. Elle sentait son coeur battre dans sa poitrine, l'odeur de sa peau, la chaleur de son aura, comme celle de son désir pour elle.
"Eh bien, qu'attendez-vous pour vous assurer que je suis bien présent ?
- Votre consentement."

Mentir serait de nier qu'elle n'avait pas voulu de cet instant dès lors qu'il avait ouvert les yeux, mentir serait de nier ce tiraillement entre l'envie de le fuir pour ne pas succomber à son regard sachant qu'il n'est plus vraiment lui-même, et le besoin de le retrouver. Quand il se retourna enfin, dominateur et impérieux, elle se vit intérieurement se lever et quitter la pièce en toute hâte, son propre orgueil lui hurlant de ne pas s'offrir à lui ainsi tant qu'il n'aurait pas pleinement retrouvé la raison, mais ce geste demeura dans son esprit ; elle le fixait, son regard perdu dans le sien. Il remonta sa main le long du bras de son épouse, jusqu'à sa gorge.
"Ne faites pas trop de bruit, les enfants dorment."
Elle retint son souffle quelques secondes, coeur battant. Il l'attira à lui d'un bras, le pouce sur ses lèvres.
"Vous êtes de retour, watashi no tora.
- Oui, Kikyo."




"Est-ce vraiment le devoir du fort de se sacrifier pour le faible. Les serviteurs devraient mourir pour leur seigneur. C'est la seule réponse !"
Non, non pas encore !

La vision du spectre qui arrache la serrure la réveilla en sursaut, retenue par l'étreinte possessive du tigre endormi. Elle s'apaisa vite, encore tremblante, et enfouit son visage dans son cou. Dans ce grand lit, ils prenaient bien peu de place mais elle s'en moquait. La nuit avait effacé toute trace de ces semaines de questions sans réponses, d'angoisses étouffées, et de baisers manqués ; ne restait que ces mots qui la hantaient. Elle serra ses bras autour de lui.
Je sais que vous n'avez pas conscience de ce qui vous a été volé, anata. Ou peut-être le sentez-vous, sans pouvoir le définir. Mais je refuse d'accepter qu'un démon vous change, vous le refuseriez aussi si vous saviez ce qu'il vous a fait. Je vous rendrais ce qui vous a été volé, et le voleur sera puni au centuple.
Il resserra brusquement son étreinte alors qu'ils glissaient sur le côté ; elle sentit sa chaude respiration près de sa corne. Avait-il lu dans ses pensées ? Un sourire pointa au coin de ses lèvres à cette idée, ce ne serait qu'une folle rumeur de plus sur la clairvoyance d'Akira Kurusu. Voilà une chose que Orochi et Cheng Bao ne savaient pas encore, ils pensaient avoir atteint le tigre roi de la jungle...


... mais la reine peut être pire encore.
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Comment vous sentez-vous ?"
La question n'était pas anodine, c'est à peine si elle l'avait saluée à son arrivée, occupée à donner des ordres pour lever l'ancre comme il se doit. A la barre, elle était concentrée, pas encore au point avec la navigation. Elle ne lui adressa finalement la parole qu'une fois l'Eternal une cinquantaine de yalms au-dessus de la mer, stable et dans le vent. Plus elle passait du temps sur ce navire, et plus elle s'y liait, et cela n'avait rien à voir avec une quelconque magie, ce sentiment venait d'elle. Elle le faisait sien, se l'appropriait, s'en imprégnait jusqu'à en devenir... ce qu'elle voulait devenir.
"Me permettez-vous une totale franchise ?
- Oui.
- Je me sens à ma place. Ici, je ne suis pas seulement votre épouse, ni porteuse d'une mission qui n'est pas la mienne. Je suis le capitaine Kurusu."

Elle n'était pas la seule, loin de là. Rien qu'à regarder Valorius faire visiter le pont supérieur à sa compagne, mains dans la main, ou Nazah qui conversait avec Liiz accoudée à la balustrade comme si elle était chez elle. Meleth dansait dans les cordages, même Silius s'était attaché.
"Voyons qui sera le capitaine Kurusu" avait-il répondu ; elle le savait déjà. Elle ne pouvait encore le dire, mais son coeur battant chaque fois qu'elle prenait la barre le lui faisait comprendre : "il est déjà".

Le voyage fut court, une simple nuit dans le ciel. Ils avaient beau s'entasser dans des micro-cabines à deux ou trois, ils dormaient tous profondément, bercés par le vent du Nord. Kikyo s'éveilla pour voir, par l'ouverture du rideau de sa couchette, de la neige sur les carreaux de sa cabine. Il faisait plus froid, un léger courant d'air s'infiltrait par la porte de ses quartiers la pressant à rechercher la chaleur du corps endormi à ses côtés encore quelques instants ; néanmoins elle se leva, attirée par la vue qu'ils devraient avoir d'ici.
On n'y voyait pas grand chose à travers la vitre, le Coerthas était noyé dans le brouillard et pourtant quelques rayons du soleil parvenaient à percer.
Nous ne devons plus être très loin d'Ishgard.
Ramassant son chapeau laissé près des cartes, son regard s'arrêta un instant sur un petit grafiti laissé par son prédécesseur, juste à côté du cadre de la mappemonde sur le mur, "vers l'infini et on verra", comme si elle ne choisissait jamais vraiment sa destination. Des nombreux effets personnels et traces du passage d'Ako Rahz, c'était la seule qu'elle n'avait pas fait enlever. Ces mots avaient un sens pour elle, au-delà de son rejet le plus total pour la piraterie.

Sur le pont, tout était silencieux, l'équipage dormait encore et le pantin à la barre se contenait de maintenir le cap. Le soleil se levait à peine, réchauffant le pont couvert de givre ; le brouillard se dissipait lentement au fur et à mesure que ses rayons le perçaient depuis les montagnes de l'Est. Kikyo pris une profonde inspiration et referma le col de son manteau pour marcher jusqu'à la proue. Elle découvrait le Coerthas vue du ciel.
"Dire que cette terre fut jadis verdoyante, baignée de soleil et parsemée de dizaine de cascades..."
Contemplant le lit des rivières gelées, elle ne pouvait qu'imaginer, peindre dans son esprits le tableau du passé. Ses pensées vagabondes s'arrêtèrent au moment où les nuages s'écartèrent pour dévoiler les traits de la Sainte Cité au loin, elle se recula du bastingage.
"Nous y sommes."
Elle se tourna vers le pantin, haussant la voix depuis l'autre bout du vaisseau.
"Réduisez l'allure, et amorcez la descente. Nous serons à l'aerodrome dans une quinzaine de minutes !"
Le temps de traverser le pont en sens inverse, elle entendait le reste de l'équipage qui se mettait en mouvement un niveau en dessous. Elle sourit intérieurement, songeant qu'ils étaient bien enthousiastes de si bon matin avant de réaliser qu'elle n'était pas mieux, première debout. Bien sur, elle se dépêcha de regagner sa cabine pour ne rien en montrer même si le son de ses pas rapides sur le pont grinçant n'échappa ni à quelques uns à l'ouïe fine, ni à l'Eternal lui-même qui se contenta de laisser la porte de sa cabine se refermer derrière elle.
Akira était en train de s'habiller, ses affaires déjà prêtes, sa canne l'attendait contre la porte. Il n'était pas encore tout à fait remit, il se fatiguait vite, pourtant il était venu. Il se tourna, avisant son épouse dans son manteau de capitaine, coiffée de l'un de ces chapeaux confectionnés pour elle par Johanna. Avant qu'il ne puisse afficher son air dubitatif, Kikyo s'avança vers lui.
"Nous amorçons la descente vers Ishgard. Le voyage vous a t-il été agréable, anata ?"
Il finit de fermer son manteau, puis il prit son sac et s'avança vers la porte où elle se trouvait. Il se baissa pour prendre sa canne et finalement, tout en tendant le bras pour saisir la poignée, se planta devant elle pour lui répondre les yeux dans les yeux :
"Oui."

"Capitaine sur le pont !"
Nazah fit un signe de la main, assise sur la rampe de l'escalier. Kikyo inclina la tête en montant les marches pour prendre la barre.
"Tout le monde à son poste, je veux que l'amarrage soit aussi réussi que le décollage.
- Oui, capitaine !"

la miqo'te sauta de son perchoir pour aller s'assurer que tout était en ordre. Plusieurs silhouettes montaient dans les cordages, à contrejour, sur le pont tous les autres aidaient à préparer l'arrivée. C'était la première fois que ce bâtiment allait être officiellement invité à s'arrimer à une plateforme de l'aerodrome d'Ishgard, comme quoi il y a une première fois à tout. L'Ombre de la cité couvrit l'Eternal qui ralentit encore l'allure ; Kikyo resserra ses mains sur le gouvernail.


"Nous y sommes. Prochain arrêt : le Diadème."
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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L'été de cette année là était particulièrement chaud, les nuits à peine moins n'apportaient que peu de sommeil aux plus sensibles et pourtant dès le matin depuis deux jours on entendait dans le jardin des Kurusu des coups répétés depuis l'aube jusqu'à ce que le soleil soit trop haut et la chaleur trop forte pour continuer.
"Maîtresse, il n'est pas trop tard pou-...
- Il suffit. Voilà ce que j'y gagne à me montrer plus accessible, plus sociable, plus tolérante. Humiliation, encore et toujours venant d'une personne à qui je viens d'offrir ma confiance et mon affection !"

Le mannequin d'entraînement tomba sur le sol, tranché par la lame de Shiroyume. Shinme observait en retrait, la mine soucieuse, tenant dans ses bras une Kimiko perplexe de voir sa mère enchainer ainsi ses victimes de bois et de paille. parfois un "Té !" accompagnait le mouvement.
"Tu l'as entendu ? Il n'attend rien de moi, il ne m'écoute pas, quand mes mots sont les mêmes que ceux de Murasaki avec quelques minutes d'avance, ma voix ne compte même plus à ses yeux !"
Shinme ne pouvait rien dire de plus ; dans ces moments là sa maitresse se montrait aussi fermée qu'une huître. Elle plus que tous les autres en savait quelque chose : plus la personne compte, plus la blessure est grave, et plus Kikyo se meut en une statue de diamant empreinte d'une colère glaciale, plus radicale et plus inflexible que les plus tyranniques dirigeants. Tout y passe, Kazami, Akira-sama, Shinme elle-même et ses travers du langage, sa propre inaptitude à prévenir ces choses là, tout. Kikyo en voulait au monde entier, et elle s'en voulait à elle-même plus encore.
La punition avait été rude pour tous, et pour elle particulièrement indigeste compte tenus tout ce qu'elle avait accompli pour le clan et pour lui, mais aussi pour ses hommes.
"Humiliée devant tous, pour un acte que personne, pas même son Ombre n'aurait pu prévenir ! Si Keiten n'était pas intervenu il se serait... !"
La tête du dernier mannequin fut tranchée net, le coup porté sous l'effet de la rage provoquée par cette vision de la veille venait de générer une énergie destructrice concentrée sur le fil de la lame. Elle revoyait son époux sur le point de se trancher un doigt devant elles, punissant son échec en même temps que le leur. Shinme réprima un haut-le-coeur.
"Comment a-t-il osé ?! Après tout ce que j'ai donné pour le Lotus Blanc, sans Kikyo Kurusu, Akira Kurusu ne serait rien de plus aux yeux des eorzéens qu'un petit roquet belliqueux insignifiant, au mieux méprisé ! Si je n'étais pas là pour répondre à ces imbéciles baignés dans les stéréotypes et afficher cette dévotion qui fait réfléchir les moins idiots, sans moi il ne serait rien, RIEN !
- Je suis certaine qu'il le sait, maîtresse.
- Bien sur qu'il le sait ! Mais il n'en a cure, seul compte sa colère et son fichu égo !"

La lame trancha le corps de paille du mannequin qui tomba raide. Kikyo la planta dans le sol, soufflant. Elle savait, elle ne pouvait nier que tout cela était de sa faute et que la punition était méritée. C'est elle qui avait échoué, la porte de l'orgueil s'était brisée dans le Cauchemar, ses mots, ses réactions en étaient devenues altérées. Peu importe ce que Kazami avait fait, il n'aurait pas réagit ainsi s'il avait été lui-même. Elle était la responsable du fait qu'il ne le soit plus.

Elle finit par baisser sa lame, à court de cible à frapper plus que de frustration à expier. Les appels des jumeaux couchés dans leur panier non loin de Shinme et Kimiko suffirent à capter son attention et apaiser sa rage.
"Ils ont faim."
Elle posa Shiroyume, à bonne distance des enfants. Shinme s'empressa de venir s'en saisir après avoir posé Kimiko, pour la garder bien en hauteur tandis que Kikyo prenait place sur le banc avec ses enfants. Elle dénoua le col de son yukata avant de prendre Akihiko dans ses bras pour lui donner le sein.
"Je ne m'explique pas non plus ce qui a bien pu se passer maîtresse" souffla Shinme pour tenter de l'apaiser. S'asseyant à ses pieds, elle chercha son regard. Kikyo regardait son fils, adoucie par sa seule présence.
"Tu as fait la promesse de t'occuper de Kazami personnellement et il te l'a accordé. Tu ne partageras pas mon sort, alors n'échoues pas.
- Je ne permettrais pas que vous soyiez humiliée une fois de plus, maîtresse.
- Té !"

Kimiko n'entendait peut-être rien aux choses des adultes, mais la détermination affichée par Shinme suffisait à lui donner l'envie de manifester sa propre poigne de petite princesse. Kikyo souffla par le nez. Un comble peut-être que cela soit arrivée alors qu'elle venait tout juste de proposer à Shinme des initiatives afin de se montrer plus sociable. Elle avait même prévu de se rendre à plus d'évènements et d'y participer en dehors des soirées du relais et des défilés de Johanna et la maison Mhasi. Elle voulait sincèrement essayer de se montrer moins distante avec autrui, mais maintenant...

S'il y avait un être vivant en ce monde capable de changer sa honte en fierté, c'était bien sa yamaboto.






"... pour le reste, je n'attends rien de vous. Vous me l'apportez sans que j'ai à le demander."
Comme chaque fois qu'ils s'opposaient, chaque fois qu'elle avait ravalé sa colère, il était venu. Si elle pouvait se vanter de le connaitre, il la connaissait tout autant. Elle ne voulait ni d'excuses, ni de reconnaissance, injuste ou non sa punition était méritée mais qu'il ne s'attende pas à ce qu'elle en sorte comme si rien n'était arrivé. Pourtant, le tigre savait apaiser le glacier, il connaissait sa corde sensible, sa peur de l'échec comme de tout ce qui pouvait être un frein à son ambition, ces murs qu'elle dressait autour d'elle mais ses bras étaient plus solides que tout.
"Kikyo. Je ne saurais plus faire ce chemin avec une autre."
Il n'avait jamais parlé, ni même abordé la question de se défaire l'un de l'autre. Pourtant il savait à quel point elle voulait se montrer digne de lui et combien elle pouvait craindre, sans qu'il n'ai jamais eu de telle pensée, qu'un jour elle ne soit plus à la hauteur. Quoi qu'on en dise, elle demeurait une Kakita, une perfectionniste pour qui la moindre faute quand elle est répétée se meut en un tourment permanent. Elle murmura d'une voix tremblante :
"Baka..."
Quand il posa doucement son front contre sa tête, elle retint son souffle. Il murmura un "merci" qui la fit déborder. Il n'y avait personne à cette heure dans le jardin du relais et sans doute était-ce mieux ainsi car personne ne verrait Kikyo Kurusu se retourner brusquement pour lui enserrer la taille, étouffant un cri contre son épaule.
"Baka !"
Elle ne cesserait de souffler ce mot, le visage enfoui dans sa chemise. Il releva une main pour la glisser dans ses cheveux, la maintenant contre lui. Non personne ne verrait cette étreinte, ni ce baiser sous les feux d'artifices parsemant le ciel de Brumée, les Kurusu devaient conserver l'image de ce couple austère et distant qui n'affiche jamais rien en public et le hasard fait si bien les choses que les rares instants où ils oublient, personne ne soit présent autour d'eux.

Triste concours de circonstances, qu'à ses premiers pas volontaires vers les autres Kikyo se retrouve fauchée et jetée à terre, pire que tout sans en comprendre la raison. Sa colère ne disparaitrait pas si aisément même si ce soir le feu et la glace parvinrent à s'apaiser mutuellement.



"Je vous l'ai dit il y a longtemps, c'est vous ma récompense."
Lerith Il y a 12 mois et 3 jours
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"Ces hurlements que tu entends, ce peut être un appel ou un avertissement. Je doute que Yume-dori soit menacé mais Inu-dori est encore fragile. Je me rendrais là-bas avec Akio demain matin. Toi, économises tes forces."
Comme toujours la pudeur et la mesure retenaient la moindre émotion. Voir Hotaru dans cet état, savoir qu'elle a été empoisonnée et se meurt à petit feu la rendait folle de rage. Elle avait tout ravalé, Hotaru elle-même ne voulait pas se montrer alarmiste. Si seulement Shinme n'avait pas été enceinte, elle l'aurait emmené avec elle ; elle l'entendait déjà grogner en gonflant les joues lorsqu'elle apprendrait qu'elle avait été au-devant d'un mystère sans elle mais sa chère yamaboto avait déjà une blessure à panser, une blessure au coeur. C'était décidé, elle irait seule, enfin pas tout à fait.

Ce matin-là elle partit tôt de Shirogane, acocmpagné d'Akio pour se rendre dans ces routes de montagne à deux heures de Namaï. Arrivée à hauteur du petit sentier qui s'enfonçait dans la forêt jusqu'à l'ancien sanctuaire des loups blanc, elle commença à sentir quelque chose n'allait pas. La forêt si paisible, baignant dans les rayons du soleil et le chant des oiseaux lui paraissait bien trop calme.
"Ne prenons pas de risque insensé Akio. Montons jusqu'à l'ancien autel pour commencer."
Au fur et à mesure qu'elle avançait, l'ambiance devint plus pesante. Aucun des habitants des villages voisins ne l'aurait senti à moins de venir ici, et ils venaient peu, bien trop occupés dans la reconstruction du pays. Ils avaient retracé la route et reconstruit un autel décent, par respect, mais rien de plus.
Un coup de vent froid la fit frissonner, est-ce la météo qui a subitement changé ? Il faisait bien plus sombre que d'habitude. Akio se montrait nerveux, il sentait ses congénères agités, les loups gris sont des animaux craintifs mais pas à ce point, pas ici. Elle sursautait parfois en les entendant japper derrière les arbres, parfois se grogner dessus mutuellement. Quelque chose n'allait vraiment pas ici. Quand ils atteignirent le pavillon, Akio s'arrêta, aux aguets, attendant qu'elle décide.
"Nous n'allons pas monter vers le coeur du sanctuaire sans savoir ce qui se passe. Cherchons Rama, et s'il ne vient pas nous rentrons prévenir les autres."
Un puissant hurlement, bientôt repris par les autres loups habitant les lieux, se fit entendre. Ils avaient à peine entamé leur marche que le grand loup blanc, gardien des lieux, apparut plus haut sur le sentier qui menait dans la montagne. Rama n'était pas un kami, il était comme Akio mais avec trois têtes et trois siècles de plus. L'oeil droit manquant marqué d'une longue cicatrice n'était que l'une de ses nombreuses marques corporelles, héritage des guerres passées et de ses nombreux affrontements. Puissant et fougueux, son regard plongea dans celui de Kikyo.
"Rama que se passe t-il ? Hotaru-chan a entendu un appel, elle a été empoisonnée et elle est très malade. Qu'arrive-t-il à la forêt et au sanctuaire ?"
La voix de Rama gronda sans qu'il n'ait à ouvrir la gueule.
"Une force sombre est à l'oeuvre Kikyo. Shiri, une de mes louves grises de la forêt a disparu. Mes meutes sont inquiètes et nerveuses. Qu'a encore fait le monde des Hommes pour souiller une fois de plus cette terre ?!"
Il se mit à grogner, montrant les crocs, mais face au silence de Kikyo il se calma.
"Suis-moi si tu le peux mais ne t'approche pas, cela ne s'étend pas pour l'instant, je crois que le passé nous rattrape."
Il s'en fut sur le sentier, suivit par Akio portant toujours son amie. Il demeura à bonne distance comme s'il craignait que le mal qui sévissait en ces lieux soit contagieux. Attentive et inquiète, bien que rassurée par la présence du puissant Rama, Kikyo observa la forêt alentours.

Pour un étranger elle aurait semblé ordinaire, quoique un peu sombre pour la saison. Les couleurs de la nature, d'ordinaire à son apogée en été, lui paraissaient ternies et froides, comme sans vie, et l'ombre des arbres plus menaçante. Sûr de lui, Rama les emmena vers le coeur d'Inu-dori, la clairière où se trouvait le vieil autel de pierres, et la tombe de sa mère ainsi que celle du père de Hotaru près d'une petite marre à peine profonde. Ce lieux qui d'ordinaire respirait la sérénité lui provoquaient à présent la nausée. Ils se stoppèrent devant l'autel.
"Quelque chose oeuvre ici et cherche à salir ce lieu. Quelque chose issu du passé de ta famille s'éveille et cherche à se nourrir. Si rien n'est fait, il ne faudra pas longtemps aux filles de la Tisseuse pour se rassembler en ce lieu."
Il gronda à nouveau.
"Shiri a disparu ici. Je pense que c'est elle que Hotaru entend. Ressens Kikyo, ressens ce qui est à l'oeuvre, le Rêve n'est pas loin..."
Il se mit en retrait, laissant faire la Fille des Songes bien peu capable qui descendit de son compagnon et fit un pas en avant, les yeux fermés, pour tenter de percevoir quelque chose. Il lui fallait ouvrir son esprit, non pas comme une de ces "visions ethériques" des mages mais plus des sensations, une ouverture quelque part, une porte vers le Rêve, ou vers le Cauchemar.

Elle sent sa présence, comme toujours même si elle est plus diffuse ici qu'à Yume-dori, mais quelque chose cloche. D'ordinaire les lucioles dansent dans la forêt lorsque l'énergie du Rêve se diffuse, exactement comme lorsque Hotaru pratique l'oniromancie, mais là ces mêmes lucioles rougoient telles des braises ardentes et se consument dans l'air avant de se désintégrer en cendres que le vent disperse, glacé. Une odeur âcre lui remplit les narines, un voile glacé l'enserre, Kikyo ouvre les yeux. Quelque chose l'observe.
Rama ne bouge pas, il a déjà observé ce phénomène. Akio bondit sur ses pattes et montre les crocs, prêt à défendre son amie. Quand un hurlement plaintif, lointain, se fait entendre, il retrousse les babines. Le hurlement une série de jappements pitoyables. Une vague de colère envahit la demi-raemme et elle serre les poings, comme si ce sentiment était devenu incontrolable, qu'il la submergeait sans qu'elle l'ait décidé. Quelque chose cherche à l'attirer plus avant.
"Que se passe t-il ici ? L'équilibre des énergies a été renversé, il est instable ! un rien suffirait à ouvrir une porte aux Jorogumos !"
Elle peut le sentir, elles ne tarderont pas à arriver, si elles ne sont pas déjà en chemin cela ne saurait tarder.

"Il faut que je rentre prévenir les autres, s'exclama-t-elle en enfourchant son loup à nouveau, et avec empressement. Seule, je ne peux rien faire mais je reviendrais vite. mets tes loups à l'abris, je doute fort que cela vienne des hommes cette fois, du moins pas directement."
Sa voix tremblait autant que ses mains autour du harnais. Elle laissa là le puissant alpha qui avait survécu à l'attaque du Cauchemar et de l'Airaignée, tenu tête à Onigumo et à Kurokami, il avait connu bien des guerres et veillé sur la montagne après l'occupation. Rama n'était pas un dieu, ni même un demi dieu, il était né d'un loups gris et de Okamisama. Il pouvait peut-être tenir encore un peu mais si les jorogumos parviennent à nouveau à tisser leur toile dans le monde réel, il mourra ici. L'idée de le laisser là lui déchirait le coeur mais il le fallait.
Elle serait de retour dans quelques heures à Shirogane, sans aucune solution pour soigner Hotaru mais au moins avec quelques réponses.


"Le passé, tout est lié au passé. Tiens bon Hotaru, je sais où chercher à présent."

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