[Kikyo] II - Coeur de Diamant
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
"Je suis prête."
Elles qui s'était toujours montrée réticente à ces pratiques tribales, s'était finalement présentée d'elle-même face au vieux yol afin de confronter ses propres barrières. Il était temps qu'elle sache, qu'elle puisse voir de ses yeux ce qu'il y avait au-delà de ce plafond de verre qui se brisait toujours quelques secondes avant son réveil. Seule, elle ne parvenait pas à prendre le contrôle sur ces images.
Cela se passait sur les bords d'une falaise en Noscea, sous la lumière des étoiles.
"La réalité est une chose ... compliqué, beaucoup de théorie, peu de vérité. Nous contemplons en permanence des forces qui vont au dela de ce que nous pouvons appréhender, le néant en est un fragment. L'ombre a la lumière du cristal. Un déséquilibre...
- Avons-nous seulement une influence dans ce monde ?
- autant qu'une goutte dans un lac... Nos actions ne sont qu'une onde, se répendant sur la surface limpide de ce lac, mais si les ondes s'additionnent et deviennent vague."
L'expérience chamanique de Khaidai allait bien au-delà de ses attentes. Plongée dans une transe onirique par les chants profonds du chaman, elle le laissa aller... et lâcha prise. A nouveau les quatre colonnes apparurent, et le plafond de verre, mais tout semblait accélérer. Le verre vola en éclats et dans la lueur elle vit la mer d'étoiles, plus brillante que les mines de diamant du mont Tenshi.
"C'est donc ainsi que mon esprit se représente l'équilibre..."
Khaidai apparut auprès d'elle, flottant dans les airs, voyant ce qu'elle voyait. Il ne semblait ni surpris, ni même curieux. Elle entendit sa voix en écho.
"C'est ce que tes rêves veulent que tu vois. Nous sommes une part de ce tout. Mais la réalité est que ce fleuve ... s'étiole, l'éther de ce monde s'éteint peu a peu."
Cela lui semblait tellement en dehors de la réalité. Elle qui n'avait aucun don en magie ne voyait pas les changements de ce monde, ou très peu. Elle tendit la main comme pour atteindre ces étoiles, si proches et pourtant si loin. Tout ceci n'était pourtant qu'une illusion un produit de son imagination que le vieux yol pouvait la faire reproduire grâce à ses rites chamaniques. Tout semblait si réel pourtant, et cela avait forcément un sens.
"Que dois-je faire Khaidai ?"
Sa voix tremblait un peu, noyée dans le flot de lumière qui passait près d'elle chaque fois qu'une de ces étoiles filantes traversaient cette immensité. Khaidai posa une main sur son épaule, c'est à ce moment précis qu'elle réalisa que la lueur ne venait pas des étoiles mais d'elle. Elle irradiait, comme une étoile parmi les étoiles, à la fois unique et noyée dans ce flot scintillant de milliards et de milliards de vies.
"Ce que tu as toujours fais Kikyo, cette vérité a toujours existé, elle est immuable. Que tu en ai conscience, ou non, cela ne change pas ce qui est."
Elle se sentit happée en arrière, et vit l'image de Khaidai s'éloigner. En un instant, elle reprit conscience de la lourdeur de son corps et du monde physique. Assis dans l'herbe en face d'elle, le chaman ouvrit les yeux, le visage serein, tandis qu'elle reprenait ses esprits.
C'est alors qu'en regardant ses mains, elle réalisa que le halo de lumière blanche était toujours présent. Elle brillait dans la nuit comme un phare.
"Qu'est ce que...?
- Tu as un fragment en toi, répondit simplement Khaidai. Il t'a guider jusqu’à présent, et continuera de le faire. Une force que nul ne comprend, pas même ceux qui la possède, pour certains, elle prend la forme de vision, pour d'autre d'une force qui les pousse en avant, leur permettant d'accomplir ce qui transcende le mortel."
Quelque chose de supérieur qui transcende la culture eorzéenne, domienne, la culture des steppes, toute forme de culture. Quelque chose qui transcende les mots. Elle avait entendu parler du Guerrier de la Lumière, de ses exploits, et de ce pouvoir, "l'écho" ou la bénédiction d'Hydaelyn. Elle n'était rien de tout ceci. L'héritage qu'elle portait, elle ne le contrôlait pas. Elle n'avait ni visions, ni capacités supérieures à la moyenne, elle n'avait... elle n'avait qu'elle-même, seule, dans son humanité la plus imparfaite. Qui était-elle dans cette immensité ?
Lentement, minute par minute, la lueur s'estompa et son corps retrouva sa condition ordinaire. Khaidai avait presque l'air amusé de ses questionnements. Il attendit, sage, qu'elle se remette de ce qu'elle avait vu.
"Je suis le pilier qui maintient les Quatre. Je dois apprendre. Je dois connaitre ce que tu connais. Il faut que je sois prête.
- Nous sommes les piliers qui te soutienne Kikyo, pas l'inverse."
Elle haussa un sourcil. Il insista :
"Ton rôle est de maintenir cet équilibre, la lumière parmi les Quatre"
La lumière, non, elle ne pensait pas à Hydaelyn ou à toute autre chose mystique ou magique. Elle leva les yeux vers le ciel et contempla les étoiles, ou plus exactement l'étoile du nord, celle que les voyageurs suivent pour maintenir leur cap, celle que les enfants prisonniers contemplent pour garder l'espoir, celle qui n'est rien de plus qu'une étoile parmi les étoiles, qu'une lumière parmi toutes les lumières, et qui pourtant parvient à guider ceux qui lèvent les yeux sur elle.
Elle repensait aux mots de Shinme, de Nazah, de Gualeb... tant de personnes au sein de l'Ordre semblaient le voir, et le vouloir. Était-ce cela que voulaient lui montrer ses ancêtres au travers de son rêve, était-ce là son rôle ?
"A toute lumière il faut les ténèbres." Murmura t-elle pour elle-même.
Elle n'avait pas besoin de chercher bien loin pour savoir où les trouver. Elle se couchait à ses côtés chaque soir, l'ombre qui contre-balançait avec sa lumière. Tout commençait à prendre sens dans son esprit : pourquoi ses rêves avaient commencé juste après son mariage, pourquoi la Mer d’Étoiles derrière le plafond de verre, pourquoi les Quatre... et pourquoi elle.
Khaidai hocha une fois la tête.
"la réponse ne se trouve pas sur ce monde. ce que tu as a vu est un aperçu, mais un aperçu suffisant.
- Mais c'est ce monde que nous devons protéger."
Elle se leva, sa voix redevenue ce qu'elle avait toujours été : posée et déterminée. Son regard azur se posa sur le Commandeur de la Balance qui rassemblait paisiblement ses affaires, ils en avaient terminé. Il se leva à son tour, leurs regards se croisèrent. Elle ouvrit à nouveau la bouche :
"Et je serais là pour te le rappeler chaque fois que tu l'oublieras."
C'était une belle nuit d'été. Sur le sentier menant à la Brumée, elle marchait seule, ne laissant derrière elle que l'écho de ses pas sur le gravier. Au-dessus d'elle la nuit, moins belle que dans ses songes et probablement moins que dans les visions de ces héros qu'elle n'égalerait jamais. Il y avait en ce monde des puissances supérieures, qu'il s'agisse des dieux, des esprits ou des héros. Elle n'avait rien de ces êtres hors du commun capable de prouesses prodigieuses ; elle n'était que Kikyo, Fille des Songes, dont la destinée était de mener les Quatre Tours là où elles devraient être. Un éclat, un fragment... une lueur parmi toutes celles d'un ciel d'étoiles.
"Dans ce monde peuplé par les héros,
souviens-toi que tu es mortel."
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
Cette nuit-là, l'excitation qui précède au voyage faisait que tous ne parvenaient à dormir. Où qu'ils soient, dans leur lit chez eux ou confortablement installé dans l'une des chambres du quartier général, chacun avait l'esprit tourné vers le lendemain. Kikyo non plus ne parvenait à trouver le sommeil. Après des heures, seule, à tourner et se retourner dans le grand lit conjugal, elle finit par se lever. Il fallait l'admettre, elle ne dormirait pas.
Commençant par saisir le haori de son époux dont elle aimait à se vêtir entre ces murs, elle choisit de s'habiller complètement pour sortir.
Dans la chambre annexe, Kimiko dormait paisiblement sous sa couverture. Kikyo n'entra pas, mais comme chaque fois qu'elle passait sur ce palier elle ouvrit légèrement la porte coulissante afin de l'observer. Ce soir-là elle resta plus de quelques secondes. Si rien ne transparaissait sur le visage de la demi-raenne, les sentiments se bousculaient dans son esprit.
"C'est la première fois que je vais te laisser seule plus d'un jour, petit lotus. Je peine à ne pas me sentir coupable."
Toutes les mères passent par ce stade, parait-il, celui où elle doivent s'arracher à leur petit pour la première fois. Elle avait toujours raillé intérieurement le sentimentalisme des autres femmes si incapable de se défaire de leur progéniture qu'elles n'hésitaient pas à les emmener partout, les exhibant comme des accessoires au sein de tavernes et autres lieux peu adapté à un jeune enfant. Elle n'avait jamais éprouvé la moindre difficulté ou le moindre remord à laisser Kimiko ici avec Sachiko, à l'abri des regards, pour ne rentrer que le soir et elle se croyait au-dessus de ce genre de faiblesse ; elle avait tort. Laisser son enfant ici, s'absenter une semaine entière et la laisser aux soins d'une nourrice ne l'enchantait guère ; en fait, c'était le seul point de ce voyage qu'elle n'appréciait pas tout court. Plutôt que de se torturer l'esprit, elle referma la porte et descendit les escaliers en silence.
C'était une belle nuit d'été, encore tiède après une journée de plus marquée par la canicule. Les étoiles scintillant sur un voile de velours sombre éclairaient la nuit comme en plein jour... Ou peut-être n'était-ce qu'une impression due à son insomnie. Les cerisiers éternellement en fleurs de Shirogane dansaient sous le vent marin. Comment dormir ?
Elle repensait aux cinq lunes qui avaient été nécessaires pour préparer cette expédition, cinq lunes pour une semaine d'exploration dans une forêt hostile et inhospitalière. Plus largement, une année pour faire de sa compagnie naissante ce qu'elle avait imaginé. Ce voyage n'était pas seulement un projet commun, mais le premier des Quatre Tours, l'aboutissement de tous ces entraînements et de ces préparatifs entrecoupés par les missions internes, sauvetages et les appels à l'aide d'autres organisations. Découvrir Golmorre, saisir ses mystères et cet équilibre unique propreà son existence, comprendre le pour mieux le défendre, cette expédition ouvrait la marche à la mission des Quatre Tours, ce n'était que la première d'une longue série et la démonstration de leur engagemen : ils étaient enfin prêts. Elle était prête, prête à voir le monde de ses propres yeux.
Il était magnifique, le Corbeau, ancien aeronef de Pluma Noctis désormais aux couleurs de l'Ordre. Les portes du hangar grandes ouvertes laissaient entrer la brise marine et les rayons de lune. Les quatre gardiens représentés sur la coque peinte captèrent son regard sitôt qu'elle monta sur la passerelle. Jo'lyne n'avait pas lésiné sur les moyens, les parties métalliques brillaient comme s'il sortait de l'atelier de fabrication. Le bois vernis faisait ressortir les silhouettes des quatre animaux : l'ours, le corbeau, le loup et le cerf. Un sourire éclaira son esprit faute d'éclairer son visage. De ses deux mains elle saisir les barreaux de l'échelle et monta à bord.
Demain, le pont supérieur serait animé par une douzaine d'aventuriers enthousiastes, mais cette nuit tout était silencieux... enfin presque. Dans un coin près de la porte permettant d'accéder en soute, une xaela en yukata rouge et noir se tenait penchée sur un établi de fortune en train de nettoyer des pièces de rechange.
"Je vois que je ne suis pas la seule à ne pas dormir ce soir. Murmura Kikyo pour s'annoncer, sans approcher la mécanicienne au travail.
- Vous êtes la troisième ce soir, Kikyo-sempai. Répondit Jo'lyne sans lever les yeux. J'aurais tout le temps de dormir demain après le départ mais je préfère m'assurer que toutes les pièces de rechange du moteur principal soient testées. Qui sait ce qu'on va trouver là-bas ? Je vous épargne mon blabla technique, il a convaincu le commandeur Pucci de retourner se coucher."
Kikyo haussa un sourcil, amusé. Elle ne dérangea pas plus la "princesse des forgerons" du scorpion et tourna les talons. Avant de repartir pour son tour des lieux elle s'adressa cependant une ultime fois à Jo'lyne :
"Tu as dit trois personnes ?"
Sans répondre, la xaela lui indiqua une direction du bout de sa règle en fer, vers l'avant du bâtiment. Cachée derrière une des voiles secondaires sensées augmenter la vitesse sous le vent, elle reconnut une silhouette et s'en approcha. Il se tenait debout, silencieux, les mains dans son dos et le regard sévère porté sur l'horizon comme un tigre qui s'apprêterait à fondre sur sa proie. Kikyo souffla un rire discret avant de le rejoindre.
Il n'y avait pas besoin de parler, jamais. Que pourrait-on dire, un "Bonsoir" à peine soufflé mais ensuite ? Parler de la mer, du ciel et des étoiles n'aurait eu aucun sens à moins qu'il ne soit aveugle et incapable de décrire par lui-même ce qu'il voyait. Parler du voyage ? Inutile, ils en avaient suffisamment parlé et chacun d'eux connaissait les détails de cette expédition. Parler de Kimiko n'aurait fait que remuer le couteau dans la plaie quant à leur choix de laisser leur enfant une semaine et aucun d'eux ne se sentait d'humeur "éorzéenne" à parler et reparler de leurs états d'âmes insignifiants. Non, parler n'était pas nécessaire loin de là. Ils avaient déjà tout dit de ce qu'il y avait à dire. Elle se pencha légèrement par-dessus le bastingage, observant son reflet sur la surface noire, éclairée par les lampes du Corbeau amarré à moins d'un malm au-dessus de l'eau. Elle aimait ce qu'elle y voyait jusqu'à ce que l'image soit brouillée par quelques gouttes de pluie. Il y avait pourtant peu de nuages mais en quelques instants le ciel s'était voilé pour rafraichir la nature d'une fine pluie estivale. Ils étaient à l'abri dans le hangar mais le vent emportait avec lui quelques gouttelettes chaudes qui vinrent mouiller le pont. Jo'lyne émit un grognement et emporta ses pièces à l'intérieur de l'appareil.
Elle sentit bouger le hyur à ses côtés. Sans avoir besoin de le regarder elle se redressa avant que sa main ne trouve instinctivement la sienne. Ils n'échangèrent pas un mot, ils n'en avaient toujours pas besoin.
Commençant par saisir le haori de son époux dont elle aimait à se vêtir entre ces murs, elle choisit de s'habiller complètement pour sortir.
Dans la chambre annexe, Kimiko dormait paisiblement sous sa couverture. Kikyo n'entra pas, mais comme chaque fois qu'elle passait sur ce palier elle ouvrit légèrement la porte coulissante afin de l'observer. Ce soir-là elle resta plus de quelques secondes. Si rien ne transparaissait sur le visage de la demi-raenne, les sentiments se bousculaient dans son esprit.
"C'est la première fois que je vais te laisser seule plus d'un jour, petit lotus. Je peine à ne pas me sentir coupable."
Toutes les mères passent par ce stade, parait-il, celui où elle doivent s'arracher à leur petit pour la première fois. Elle avait toujours raillé intérieurement le sentimentalisme des autres femmes si incapable de se défaire de leur progéniture qu'elles n'hésitaient pas à les emmener partout, les exhibant comme des accessoires au sein de tavernes et autres lieux peu adapté à un jeune enfant. Elle n'avait jamais éprouvé la moindre difficulté ou le moindre remord à laisser Kimiko ici avec Sachiko, à l'abri des regards, pour ne rentrer que le soir et elle se croyait au-dessus de ce genre de faiblesse ; elle avait tort. Laisser son enfant ici, s'absenter une semaine entière et la laisser aux soins d'une nourrice ne l'enchantait guère ; en fait, c'était le seul point de ce voyage qu'elle n'appréciait pas tout court. Plutôt que de se torturer l'esprit, elle referma la porte et descendit les escaliers en silence.
C'était une belle nuit d'été, encore tiède après une journée de plus marquée par la canicule. Les étoiles scintillant sur un voile de velours sombre éclairaient la nuit comme en plein jour... Ou peut-être n'était-ce qu'une impression due à son insomnie. Les cerisiers éternellement en fleurs de Shirogane dansaient sous le vent marin. Comment dormir ?
Elle repensait aux cinq lunes qui avaient été nécessaires pour préparer cette expédition, cinq lunes pour une semaine d'exploration dans une forêt hostile et inhospitalière. Plus largement, une année pour faire de sa compagnie naissante ce qu'elle avait imaginé. Ce voyage n'était pas seulement un projet commun, mais le premier des Quatre Tours, l'aboutissement de tous ces entraînements et de ces préparatifs entrecoupés par les missions internes, sauvetages et les appels à l'aide d'autres organisations. Découvrir Golmorre, saisir ses mystères et cet équilibre unique propreà son existence, comprendre le pour mieux le défendre, cette expédition ouvrait la marche à la mission des Quatre Tours, ce n'était que la première d'une longue série et la démonstration de leur engagemen : ils étaient enfin prêts. Elle était prête, prête à voir le monde de ses propres yeux.
Il était magnifique, le Corbeau, ancien aeronef de Pluma Noctis désormais aux couleurs de l'Ordre. Les portes du hangar grandes ouvertes laissaient entrer la brise marine et les rayons de lune. Les quatre gardiens représentés sur la coque peinte captèrent son regard sitôt qu'elle monta sur la passerelle. Jo'lyne n'avait pas lésiné sur les moyens, les parties métalliques brillaient comme s'il sortait de l'atelier de fabrication. Le bois vernis faisait ressortir les silhouettes des quatre animaux : l'ours, le corbeau, le loup et le cerf. Un sourire éclaira son esprit faute d'éclairer son visage. De ses deux mains elle saisir les barreaux de l'échelle et monta à bord.
Demain, le pont supérieur serait animé par une douzaine d'aventuriers enthousiastes, mais cette nuit tout était silencieux... enfin presque. Dans un coin près de la porte permettant d'accéder en soute, une xaela en yukata rouge et noir se tenait penchée sur un établi de fortune en train de nettoyer des pièces de rechange.
"Je vois que je ne suis pas la seule à ne pas dormir ce soir. Murmura Kikyo pour s'annoncer, sans approcher la mécanicienne au travail.
- Vous êtes la troisième ce soir, Kikyo-sempai. Répondit Jo'lyne sans lever les yeux. J'aurais tout le temps de dormir demain après le départ mais je préfère m'assurer que toutes les pièces de rechange du moteur principal soient testées. Qui sait ce qu'on va trouver là-bas ? Je vous épargne mon blabla technique, il a convaincu le commandeur Pucci de retourner se coucher."
Kikyo haussa un sourcil, amusé. Elle ne dérangea pas plus la "princesse des forgerons" du scorpion et tourna les talons. Avant de repartir pour son tour des lieux elle s'adressa cependant une ultime fois à Jo'lyne :
"Tu as dit trois personnes ?"
Sans répondre, la xaela lui indiqua une direction du bout de sa règle en fer, vers l'avant du bâtiment. Cachée derrière une des voiles secondaires sensées augmenter la vitesse sous le vent, elle reconnut une silhouette et s'en approcha. Il se tenait debout, silencieux, les mains dans son dos et le regard sévère porté sur l'horizon comme un tigre qui s'apprêterait à fondre sur sa proie. Kikyo souffla un rire discret avant de le rejoindre.
Il n'y avait pas besoin de parler, jamais. Que pourrait-on dire, un "Bonsoir" à peine soufflé mais ensuite ? Parler de la mer, du ciel et des étoiles n'aurait eu aucun sens à moins qu'il ne soit aveugle et incapable de décrire par lui-même ce qu'il voyait. Parler du voyage ? Inutile, ils en avaient suffisamment parlé et chacun d'eux connaissait les détails de cette expédition. Parler de Kimiko n'aurait fait que remuer le couteau dans la plaie quant à leur choix de laisser leur enfant une semaine et aucun d'eux ne se sentait d'humeur "éorzéenne" à parler et reparler de leurs états d'âmes insignifiants. Non, parler n'était pas nécessaire loin de là. Ils avaient déjà tout dit de ce qu'il y avait à dire. Elle se pencha légèrement par-dessus le bastingage, observant son reflet sur la surface noire, éclairée par les lampes du Corbeau amarré à moins d'un malm au-dessus de l'eau. Elle aimait ce qu'elle y voyait jusqu'à ce que l'image soit brouillée par quelques gouttes de pluie. Il y avait pourtant peu de nuages mais en quelques instants le ciel s'était voilé pour rafraichir la nature d'une fine pluie estivale. Ils étaient à l'abri dans le hangar mais le vent emportait avec lui quelques gouttelettes chaudes qui vinrent mouiller le pont. Jo'lyne émit un grognement et emporta ses pièces à l'intérieur de l'appareil.
Elle sentit bouger le hyur à ses côtés. Sans avoir besoin de le regarder elle se redressa avant que sa main ne trouve instinctivement la sienne. Ils n'échangèrent pas un mot, ils n'en avaient toujours pas besoin.
Elle partageait son impatience, et brûlait d'envie de dévorer le monde.
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
Ils n'étaient pas les bienvenu dans cette jungle, et pourtant le peu de terrain qui leur était accordé d'explorer lui suffisait. Les paysages forestiers noyés dans le brouillard lui paraissaient à la fois inquiétants et protecteurs. Elle comprenait que la résistance dalmasquienne puisse se sentir à l'abri ici. Au-delà de la présence des gardiennes prêtes à occire le moindre intrus, Golmorre avait tout de ce que l'on imagine d'un sanctuaire impénétrable.
En quelques jours, elle avait appris davantage sur le monde qu'en six lunes dans ses livres. Elle qui pensait pourtant avoir connu toute forme de couchage rudimentaire durant ses années de pauvreté, si elle ne devait retenir qu'une chose, ce serait de dormir dans un hamac.
S'éveiller à cause des gouttes de rosée tombant sur ses joues n'avait rien de désagréable. Elle ne voyait que les feuilles des arbres au-dessus d'elle, et n'entendait que la respiration paisible du Tigre endormi. La profondeur du hamac leur accordait à tout deux un semblant d'intimité en plus de les rapprocher physiquement s'il était besoin d'un prétexte pour cela. Leurs jambes entrelacées dans ce mince espace suspendu entre les branches, elle pouvait sentir son bras lui enserrer la taille et son torse se soulever de façon régulière sous la main qu'elle avait posée près de son cou. De petites perles de rosées continuaient de tomber au rythme du chant des oiseaux, elle referma les yeux.
En quelques jours, elle avait appris davantage sur le monde qu'en six lunes dans ses livres. Elle qui pensait pourtant avoir connu toute forme de couchage rudimentaire durant ses années de pauvreté, si elle ne devait retenir qu'une chose, ce serait de dormir dans un hamac.
S'éveiller à cause des gouttes de rosée tombant sur ses joues n'avait rien de désagréable. Elle ne voyait que les feuilles des arbres au-dessus d'elle, et n'entendait que la respiration paisible du Tigre endormi. La profondeur du hamac leur accordait à tout deux un semblant d'intimité en plus de les rapprocher physiquement s'il était besoin d'un prétexte pour cela. Leurs jambes entrelacées dans ce mince espace suspendu entre les branches, elle pouvait sentir son bras lui enserrer la taille et son torse se soulever de façon régulière sous la main qu'elle avait posée près de son cou. De petites perles de rosées continuaient de tomber au rythme du chant des oiseaux, elle referma les yeux.
Le long de l'eau, elle marchait en compagnie d'Alexois qui n'avait de cesse de s'arrêter tous les trente pas pour cueillir une nouvelle plante. Depuis le début de ce voyage, Ivanhault et lui s'en donnaient à cœur joie malgré le regard inquisiteur de leur "guide" locale qui avait davantage des allures de surveillant.
"... et ils ont pu dormir là-bas. Je les jalouserai presque.
- D'après Morolili, elles n'ont pas été des plus aimable, répondit-elle tout en scrutant la rivière. Mais ce qui m'intrigue c'est ce gouffre qu'ils ont vu, et sur lequel elles ont construit leur village.
- Hm, pour tout vous dire cela ne m'étonne guère. Souvenez-vous des récits que l'on nous a rapporté sur les aventures du Guerrier de la Lumière dans le Monastère d'Orbonne qui se trouve lui aussi quelque part dans cette forêt. Sincèrement, je ne suis pas surpris d'apprendre qu'il se cache dans cette forêt d'autres lieux empreints d'une ancienne et sombre magie.
- Il est vrai."
L'elezen s'avança à sa hauteur, avant de s'asseoir au bord de l'eau, le visage soudain plus sérieux.
"Ce qui devrait nous inquiéter en revanche, c'est que cette magie s'éveille à nouveau.
- C'est cela qui occupe mon esprit." Confirma t-elle.
Alexois cueillait machinalement des brins d'herbe un par un pour les jeter dans l'eau, signe de sa contrariété.
"L'ether instable, le déséquilibre qui affecte notre monde progresse jusqu'à affecter les lieux les plus reculés et les mieux gardés. Les viéras de ce village ne tiendront pas dix ans de plus comme ça.
- On ne peut rien faire de plus, elles ne veulent pas de notre aide.
- Ni de notre présence. J'ai parlé avec Ivanhault... elles veulent qu'on s'en aille le plus vite possible."
Kikyo fronça les sourcils.
"Nous partirons dans deux jours au plus tard."
L'elezen haussa les épaules, puis se releva dans un craquement de genoux. Il sourit.
"Dans ce cas, je vais en profiter pour étudier les plantes aquatiques tant que je le peux encore. Meleth m'a parlé d'une algue qui aurait des vertus thérapeutiques."
D'un signe de main, il la salua avant de continuer sa marche, la laissant seule à moins de vingt minutes du campement. Elle lui faisait confiance de toute façon, pour ne pas s'éloigner ou prendre des risques. Tout le monde semblait satisfait de ce voyage, inutile d'importuner davantage les autochtones déjà hostiles à leur présence.
Elle avait beaucoup appris ici. Sur la forêt mais aussi sur la résistance dalmasquienne qui se cachait dans certains endroits de la forêt. Les viéras n'étaient peut-être pas si sectaires bien qu'elles posent des limites claires et se refusaient au moindre contact.
Mais ce gouffre, ces magies anciennes à la fois fascinantes et inquiétantes, elle hésitait entre son envie d'étoffer ses connaissances et son instinct qui lui intimait de tout faire pour qu'une telle entité ne puisse jamais sortir de son sommeil. Elle ne pouvait présentement rien faire, elle était forcée de quitter les lieux avec rien de plus que l'espoir de trouver des réponses et des solutions avant qu'il ne soit trop tard. Elle repartait avec plus de détermination d'avoir vu de ses yeux à quel point le mal grandissait dans le monde comme une maladie qui s'étend.
Un craquement dans son dos annonça la présence d'une troisième personne. En se retournant elle croisa le regard améthyste de son époux qui avait tout entendu. Il la jaugeait du regard, dominateur, ce qui l'incita à se redresser avec toute sa force de conviction.
"Qu'allez-vous faire à présent ?" Demanda t-il, de sa voix impérieuse.
Quittant la rivière, elle s'approcha pour lui répondre sur un ton bien plus bas, à la fois respectueux et vibrant de conviction.
"Je vais me battre."
La main gantée du tigre la saisit par la gorge, sans serrer, alors que les deux s'affrontaient du regard. L'autre main la saisit par la taille sans ménagement. La jungle de Golmorre cachait de nombreux mystères et savait comment garder ses secrets. Elle en garderait un de plus, seule témoin de ce qui s'en suivit.
"... et ils ont pu dormir là-bas. Je les jalouserai presque.
- D'après Morolili, elles n'ont pas été des plus aimable, répondit-elle tout en scrutant la rivière. Mais ce qui m'intrigue c'est ce gouffre qu'ils ont vu, et sur lequel elles ont construit leur village.
- Hm, pour tout vous dire cela ne m'étonne guère. Souvenez-vous des récits que l'on nous a rapporté sur les aventures du Guerrier de la Lumière dans le Monastère d'Orbonne qui se trouve lui aussi quelque part dans cette forêt. Sincèrement, je ne suis pas surpris d'apprendre qu'il se cache dans cette forêt d'autres lieux empreints d'une ancienne et sombre magie.
- Il est vrai."
L'elezen s'avança à sa hauteur, avant de s'asseoir au bord de l'eau, le visage soudain plus sérieux.
"Ce qui devrait nous inquiéter en revanche, c'est que cette magie s'éveille à nouveau.
- C'est cela qui occupe mon esprit." Confirma t-elle.
Alexois cueillait machinalement des brins d'herbe un par un pour les jeter dans l'eau, signe de sa contrariété.
"L'ether instable, le déséquilibre qui affecte notre monde progresse jusqu'à affecter les lieux les plus reculés et les mieux gardés. Les viéras de ce village ne tiendront pas dix ans de plus comme ça.
- On ne peut rien faire de plus, elles ne veulent pas de notre aide.
- Ni de notre présence. J'ai parlé avec Ivanhault... elles veulent qu'on s'en aille le plus vite possible."
Kikyo fronça les sourcils.
"Nous partirons dans deux jours au plus tard."
L'elezen haussa les épaules, puis se releva dans un craquement de genoux. Il sourit.
"Dans ce cas, je vais en profiter pour étudier les plantes aquatiques tant que je le peux encore. Meleth m'a parlé d'une algue qui aurait des vertus thérapeutiques."
D'un signe de main, il la salua avant de continuer sa marche, la laissant seule à moins de vingt minutes du campement. Elle lui faisait confiance de toute façon, pour ne pas s'éloigner ou prendre des risques. Tout le monde semblait satisfait de ce voyage, inutile d'importuner davantage les autochtones déjà hostiles à leur présence.
Elle avait beaucoup appris ici. Sur la forêt mais aussi sur la résistance dalmasquienne qui se cachait dans certains endroits de la forêt. Les viéras n'étaient peut-être pas si sectaires bien qu'elles posent des limites claires et se refusaient au moindre contact.
Mais ce gouffre, ces magies anciennes à la fois fascinantes et inquiétantes, elle hésitait entre son envie d'étoffer ses connaissances et son instinct qui lui intimait de tout faire pour qu'une telle entité ne puisse jamais sortir de son sommeil. Elle ne pouvait présentement rien faire, elle était forcée de quitter les lieux avec rien de plus que l'espoir de trouver des réponses et des solutions avant qu'il ne soit trop tard. Elle repartait avec plus de détermination d'avoir vu de ses yeux à quel point le mal grandissait dans le monde comme une maladie qui s'étend.
Un craquement dans son dos annonça la présence d'une troisième personne. En se retournant elle croisa le regard améthyste de son époux qui avait tout entendu. Il la jaugeait du regard, dominateur, ce qui l'incita à se redresser avec toute sa force de conviction.
"Qu'allez-vous faire à présent ?" Demanda t-il, de sa voix impérieuse.
Quittant la rivière, elle s'approcha pour lui répondre sur un ton bien plus bas, à la fois respectueux et vibrant de conviction.
"Je vais me battre."
La main gantée du tigre la saisit par la gorge, sans serrer, alors que les deux s'affrontaient du regard. L'autre main la saisit par la taille sans ménagement. La jungle de Golmorre cachait de nombreux mystères et savait comment garder ses secrets. Elle en garderait un de plus, seule témoin de ce qui s'en suivit.
"Je ne faillirai pas."
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
"Vous pouvez disposer."
Un soir comme les autres. D'abord satisfait par sa rencontre avec U'raze Tia il n'avait pas manqué de lui rappeler combien il était mécontent de son voyage, de ce qu'il voyait des Quatre Tours, combien ses hommes étaient indisciplinés et désorganisés, comment lui aurait fait différemment, aurait sanctionné, et ceci et cela. Lui, toujours lui. Si elle avait voulu la perfection elle n'aurait pas pris la peine de se lancer dans ce projet, elle se serait contentée de le regarder faire et d'apprendre dans son ombre comme une épouse docile. Ce qu'il pouvait être... parfois ! "Je veux le mieux, pas le bien", que croyait-il qu'elle se contentait du médiocre et ramassait les miettes ?
Kikyo lança presque ses affaires sur le tapis avant d'entrer rageusement dans le bain. Ce soir n'était pas si différent des autres soirs. C'était sa vie, entre petites satisfactions et grande sévérité, parfois oubliée dans la chaleur de ses bras. Elle ne doutait pas, n'avait jamais douté. Elle était chaque jour un peu plus fort, chaque jour un peu plus solide, et chaque jour la même réponse. Aujourd'hui une de plus.
"Je devrais songer à trouver quelqu'un d'autre pour assurer la régence si quelque chose devait m'arriver."
Il ne dit jamais rien sans raison, même si elle pensait depuis longtemps -et avec clairvoyance- qu'il avait déjà désigné Murasaki. Ce n'était visiblement pas le cas, mais pourquoi aborder le sujet ? Oui, elle était incapable de régenter le Lotus Blanc, les Kakita ne sont pas des dirigeants, et elle n'avait jamais été éduquée à cela, il ne l'avait tout de même pas épousé pour ça. Même si... il fallait l'admettre, diriger l'Ordre était un moyen pour elle d'apprendre en se mettant volontairement sous pression. Elle savait qu'échouer n'était pas envisageable, c'était la plus grande des motivations. Elle voulait être à la hauteur si un jour il n'y avait d'autre choix. Mais elle ne l'était pas, pas encore évidemment. Cela prendrait du temps, elle ferait des erreurs. Cherchait-il à la mettre au pied du mur ? la vexer ? Lui rappeler encore sa condition de "trop Kakita" ?
Je sens bien qu'il n'est pas déçu de moi, mais qu'il attend plus. Est-ce que je suis trop lente ?
Elle n'entendait que les goutes de condensation tomber dans l'eau stagnante du bain. C'était sa vie. Peut-être apparaitrait-il dans une heure ou deux sans prononcer un mot avant de se coucher près d'elle, peut-être l'ignorerait-il durant des jours jusqu'à ce qu'elle comprenne et lui donne ce qu'il veut. Le Tigre était parfois difficile à vivre, surtout quand il décide de n'écouter que lui.
Mais elle ne voulait pas se confronter à lui plus que nécessaire, ni se soumettre sans raison. Elle voulait lui montrer qu'il avait tort. Chose peu aisée quand on sait qu'il ignore sciemment le bon pour ne retenir que le déplaisant.
Les pleurs de Kimiko la poussèrent à quitter sa solitude. L'enfant ne pleurait jamais, sauf pour réclamer son repas et c'était la première fois que sa mère n'était pas ponctuelle. Les pleurs ne durèrent pas cependant, ils cessèrent sitôt qu'elle eut passé la porte de la chambre.
Sa fille dans les bras, Kikyo s'installa sur le fauteuil avant de défaire le haut de son yukata.
"Pardonne-moi petit Lotus, voilà que dans mes songes je manque d'oublier l'heure..."
Aucun bruit dans la pénombre si ce n'est le très léger bruit de succion de la petite Kimiko, qui fixait sa mère de ses grands yeux améthyste.
"Tu as bien le droit de me juger ainsi, je ne devrais penser qu'à toi dans ces moments là. Hélas, ton père a toujours eu un don pour occuper mon esprit quand il le décide et ce, même s'il n'est pas là."
Le simple fait de la regarder lui arracha un sourire. Comment pourrait-elle échouer alors qu'elle l'avait portée, mise au monde, qu'elle allait l'élever et lui offrir un monde. Elle ne doutait pas, ni de son combat, ni des liens qui l'unissaient à Akira et dont elle tenait le fruit entre ses bras, ni de son futur. Qu'importe qui il choisissait pour le remplacer en attendant que Kimiko soit en âge, elle connaissait sa place.
"Ni à la régence, ni sur votre tombe."
Repus, l'enfant toussa un peu, prise de hoquet. Kikyo la souleva légèrement pour lui tapoter le dos, une serviette sur l'épaule.
"Il vivra, car ma place est à ses côtés jusque dans la mort. Mais tu sais, petit lotus, nous voulons te voir grandir, et je te promets que tant que je vivrais ton père rentrera en vie lui aussi."
Elle se leva, Kimiko commençait déjà à fermer les yeux. Il était bien tard.
"Ton père sait beaucoup de choses." Ajouta t-elle en la bordant, sur le ton de la confidence. "Il donne parfois l'impression de tout savoir, de tout comprendre, d'avoir toujours raison. Et je ne vais pas te mentir, c'est souvent le cas même si c'est difficile à admettre. Mais il est une chose qu'il ne verra jamais aussi bien que moi, quoi qu'il te dise."
Elle s'agenouilla sur le tapis au pied du berceau, ses bras croisés sur le rebord et le menton posé dessus. Elle caressa d'une main les cheveux d'ébène du bébé dont la poitrine se soulevait maintenant de façon régulière. Elle baissa alors d'un ton.
"Il est tellement occupé à tout anticiper que nombre d'évidences lui passent sous le nez. Mais ta mère n'a pas dit son dernier mot crois-moi. Je dois juste apprendre à rugir, encore un peu plus fort..."
Un soir comme les autres. D'abord satisfait par sa rencontre avec U'raze Tia il n'avait pas manqué de lui rappeler combien il était mécontent de son voyage, de ce qu'il voyait des Quatre Tours, combien ses hommes étaient indisciplinés et désorganisés, comment lui aurait fait différemment, aurait sanctionné, et ceci et cela. Lui, toujours lui. Si elle avait voulu la perfection elle n'aurait pas pris la peine de se lancer dans ce projet, elle se serait contentée de le regarder faire et d'apprendre dans son ombre comme une épouse docile. Ce qu'il pouvait être... parfois ! "Je veux le mieux, pas le bien", que croyait-il qu'elle se contentait du médiocre et ramassait les miettes ?
Kikyo lança presque ses affaires sur le tapis avant d'entrer rageusement dans le bain. Ce soir n'était pas si différent des autres soirs. C'était sa vie, entre petites satisfactions et grande sévérité, parfois oubliée dans la chaleur de ses bras. Elle ne doutait pas, n'avait jamais douté. Elle était chaque jour un peu plus fort, chaque jour un peu plus solide, et chaque jour la même réponse. Aujourd'hui une de plus.
"Je devrais songer à trouver quelqu'un d'autre pour assurer la régence si quelque chose devait m'arriver."
Il ne dit jamais rien sans raison, même si elle pensait depuis longtemps -et avec clairvoyance- qu'il avait déjà désigné Murasaki. Ce n'était visiblement pas le cas, mais pourquoi aborder le sujet ? Oui, elle était incapable de régenter le Lotus Blanc, les Kakita ne sont pas des dirigeants, et elle n'avait jamais été éduquée à cela, il ne l'avait tout de même pas épousé pour ça. Même si... il fallait l'admettre, diriger l'Ordre était un moyen pour elle d'apprendre en se mettant volontairement sous pression. Elle savait qu'échouer n'était pas envisageable, c'était la plus grande des motivations. Elle voulait être à la hauteur si un jour il n'y avait d'autre choix. Mais elle ne l'était pas, pas encore évidemment. Cela prendrait du temps, elle ferait des erreurs. Cherchait-il à la mettre au pied du mur ? la vexer ? Lui rappeler encore sa condition de "trop Kakita" ?
Je sens bien qu'il n'est pas déçu de moi, mais qu'il attend plus. Est-ce que je suis trop lente ?
Elle n'entendait que les goutes de condensation tomber dans l'eau stagnante du bain. C'était sa vie. Peut-être apparaitrait-il dans une heure ou deux sans prononcer un mot avant de se coucher près d'elle, peut-être l'ignorerait-il durant des jours jusqu'à ce qu'elle comprenne et lui donne ce qu'il veut. Le Tigre était parfois difficile à vivre, surtout quand il décide de n'écouter que lui.
Mais elle ne voulait pas se confronter à lui plus que nécessaire, ni se soumettre sans raison. Elle voulait lui montrer qu'il avait tort. Chose peu aisée quand on sait qu'il ignore sciemment le bon pour ne retenir que le déplaisant.
Les pleurs de Kimiko la poussèrent à quitter sa solitude. L'enfant ne pleurait jamais, sauf pour réclamer son repas et c'était la première fois que sa mère n'était pas ponctuelle. Les pleurs ne durèrent pas cependant, ils cessèrent sitôt qu'elle eut passé la porte de la chambre.
Sa fille dans les bras, Kikyo s'installa sur le fauteuil avant de défaire le haut de son yukata.
"Pardonne-moi petit Lotus, voilà que dans mes songes je manque d'oublier l'heure..."
Aucun bruit dans la pénombre si ce n'est le très léger bruit de succion de la petite Kimiko, qui fixait sa mère de ses grands yeux améthyste.
"Tu as bien le droit de me juger ainsi, je ne devrais penser qu'à toi dans ces moments là. Hélas, ton père a toujours eu un don pour occuper mon esprit quand il le décide et ce, même s'il n'est pas là."
Le simple fait de la regarder lui arracha un sourire. Comment pourrait-elle échouer alors qu'elle l'avait portée, mise au monde, qu'elle allait l'élever et lui offrir un monde. Elle ne doutait pas, ni de son combat, ni des liens qui l'unissaient à Akira et dont elle tenait le fruit entre ses bras, ni de son futur. Qu'importe qui il choisissait pour le remplacer en attendant que Kimiko soit en âge, elle connaissait sa place.
"Ni à la régence, ni sur votre tombe."
Repus, l'enfant toussa un peu, prise de hoquet. Kikyo la souleva légèrement pour lui tapoter le dos, une serviette sur l'épaule.
"Il vivra, car ma place est à ses côtés jusque dans la mort. Mais tu sais, petit lotus, nous voulons te voir grandir, et je te promets que tant que je vivrais ton père rentrera en vie lui aussi."
Elle se leva, Kimiko commençait déjà à fermer les yeux. Il était bien tard.
"Ton père sait beaucoup de choses." Ajouta t-elle en la bordant, sur le ton de la confidence. "Il donne parfois l'impression de tout savoir, de tout comprendre, d'avoir toujours raison. Et je ne vais pas te mentir, c'est souvent le cas même si c'est difficile à admettre. Mais il est une chose qu'il ne verra jamais aussi bien que moi, quoi qu'il te dise."
Elle s'agenouilla sur le tapis au pied du berceau, ses bras croisés sur le rebord et le menton posé dessus. Elle caressa d'une main les cheveux d'ébène du bébé dont la poitrine se soulevait maintenant de façon régulière. Elle baissa alors d'un ton.
"Il est tellement occupé à tout anticiper que nombre d'évidences lui passent sous le nez. Mais ta mère n'a pas dit son dernier mot crois-moi. Je dois juste apprendre à rugir, encore un peu plus fort..."
"...jusqu'à ce qu'il cesse de ne voir en moi qu'une femme déviante, effrayée à l'idée de le perdre."
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
Elle avait attendu qu'il rentre du Quartier Enclavé, attendu d'être certaine qu'il resterait quelques heures et que Kimiko soit en sécurité, avant de s'en aller silencieusement comme elle en avait l'habitude autrefois lorsqu'il faisait beau, enfourcher sa monture et partir au hasard, seule avec Akio. Aujourd'hui le ciel était noir, les éclairs déchiraient les nuages sous un déluge violent mais elle sortit malgré tout. Aucun orage n'aurait pu être plus violent que la tempête qui faisait rage dans son esprit.
Aux menaces contre sa fille se mêlaient frustration et colère, honte et injustice.
"Où sommes-nous ?
- Je l'ignore" Répondit le loup blanc sans ouvrir la gueule. "Quelque part en Mer de Rubis."
Le rideau de pluie bloquait la vue, mais la mer à leurs pieds était agitée. Le loup s'arrêta entre deux larges rochers plats appuyés l'un contre l'autre, fournissant un abri mais l'aoranne de s'y réfugia pas, demeurant debout face à l'orage. Il savait vers qui étaient tournées ses pensées. Une viéra dont elle ne connaissait pas les traits ni le nom, seulement les mots échangés avec Akame. Des mots qu'elle allait regretter amèrement.
Mais comme toujours, les autres trouvaient le moyen de faire le lien avec le Tigre.
"Pourquoi ne lui apportes-tu pas sa tête toi-même ?
- J'ai pris mes dispositions, je recevrais un premier rapport rapidement ce n'est qu'une question de temps avant que l'on sache qui elle est et où la trouver.
- Mais c'est un autre qui va réussir grâce à toi.
- Je n'ai pas à quémander pour son regard comme on donne un os à un chien. Je suis sa femme, je fais ce que je dois faire et je n'ai pas à leur agiter sous le nez que tout ça c'est grâce à moi, je ne suis pas Byakuya et je n'ai rien à prouver."
Elle soupira, évacuant un peu de la pression de ces derniers jours, une goutte d'eau dans la mer. Le loup se redressa les sourcils froncé. Mieux que personne il la connaissait, il voyait tout, entendait tout même ses plus intimes pensées. Il voyait sans savoir, mais il voyait. Il sentait qu'elle était à bouts.
"Kikyo, je penses que..."
Il aurait suffit d'un rien pour que le miroir vole en éclats.
"Arrêtes, Akio. je sais ce que tu vas me dire. Que tout va bien, que le temps fera le reste, que rien n'est jamais parfait et que je suis constamment sous pression. Que c'est un ambitieux, un homme sans patience qui n'écoute que lui et que je dois seulement me montrer forte. Je ne suis pas comme toi, moi, je ne suis pas née d'une créature mortelle et d'un kami ! Je suis humaine ! et tu sais quoi ? Les humains sont ainsi, soit nous pensons avec orgueil que tout est parfait, soit nous poussons encore. "
Le tonnerre couvrait ses éclats de voix, et sa respiration saccadée. Le loups assis la fixait intensément malgré l'eau qui lui tombait dans les yeux.
"Tu n'es pas comme lui non plus.
- Bien sur que non, ce n'est pas non plus ce qu'il veut, il me l'a dit."
Elle se laissa tomber contre le rocher, la pluie lui balayait le visage.
"Entre ce qu'il dit, et ce qu'il dira de ce qu'il a dit trois jours après l'avoir dit, il y a un monde Kikyo et tu le sais.
- Je sais, mais je sais aussi ce que je fais.
- Vraiment tu le sais ? Parce que mis à part sa fortune et les deux vassaux qu'il te préfère, tout ce qu'il a c'est à toi qu'il le doit. Ce sont tes hommes qui lui ont sauvé la vie lorsque les siens étaient absents. C'est toi qui lui amène ses vassaux, toi qui fera toujours en sorte qu'il ai raison même s'il a tort. Sans tes manœuvres, le Serpent n'aurait jamais plié le genou hier. C'est toi, Kikyo, qui accepte d'être traitée comme une erreur. Toi qui sers la moindre ambition, le moindre caprice et le regarde en récolter les fruits mûrs qui lui tombent dans la main pendant qu'il te...
- ASSEZ !"
Le tonnerre gronda de nouveau, un éclair frappa le sol en contrebas, assourdissant le duo pendant de longues secondes. Quand le ciel redevint sombre, la lame de diamant était posée contre l'encolure du loup.
"Ne me demandes pas de te regarder tomber, toi que j'ai juré de défendre.
- Comment oses-tu..."
Sa voix vibrait de colère. Elle ne voulait pas entendre la suite qui n'était pas une crainte, même pas une douleur, mais une insulte à tout ce qu'elle était. Le loup émit un grognement sourd pour la réveiller, la faire sortir de cet état de rage incontrôlable. Réalisant son geste, Kikyo baissa son arme et son regard. Elle n'avait jamais levé la main sur lui, même dans les pires moments. Peu rancunier, comme le sont tant d'animaux fidèles, il se rapprocha d'elle, la poussant doucement du bout de sa truffe. Elle y posa sa main tremblante. Pendant plusieurs minutes, elle ne dit rien.
"Sanjuro...
- ...ne tardera pas à l'apprendre.
- Il ne te reprochera pas cet échec. Il partage ta clairvoyance, il sait ce que tu devras faire. Ce ne sera pas le cas de ses conseillers. Ta famille...
- Dira que ce mariage était une erreur, qu'ils ont vendu la sœur de leur seigneur à un monstre."
Le loup poussa un peu plus sur la poitrine de sa compagne, accusant le coup de la fracture qui venait de grandir un peu plus. Elle l'avait toujours accepté, elle affrontait la réalité avec dignité mais cette réalité commençait à vaciller. Si elle ne serait jamais une Kurusu aux yeux du clan, elle ne serait jamais non plus une vraie Kakita. Elle ne serait rien de plus que la moitié de rien du tout, une moitié de rien avec beaucoup d'impact, mais pour toujours reléguée au rang d'erreur, quelque chose qui n'aurait jamais dû exister.
"J'ai gagné ce droit...
- Tu devras le faire valoir toute ta vie, enfant. Jusqu'à ta dernière heure, tu lutteras pour exister."
Après une brève étreinte, le loup se détacha de Kikyo. Il s'avança vers le rebord de la falaise la plus proche et se retourna, lui lançant un dernier regard, l'esprit déjà loin.
"Pour ton honneur ?
- Pour mon serment" lui répondit-elle.
Le loup soupira.
"Par amour.
- Tu m'as appris que lorsque les deux vont de paire, c'est que ce choix était le bon. Qu'importent les conséquences."
Akio se résigna, il disparut derrière le rideau sombre et humide qui s'abattait sur la côte orientale, la laissant seule face à la tempête. Autour d'elle, les ténèbres semblaient lentement progresser, dévorer la plage et les rochers, la mer et le ciel. Les éléments déchainés, à son image en cet instant. Les fragments de sa vie projetés devant elle comme l'écume sur les rochers, toujours dans le noir.
Aux menaces contre sa fille se mêlaient frustration et colère, honte et injustice.
"Où sommes-nous ?
- Je l'ignore" Répondit le loup blanc sans ouvrir la gueule. "Quelque part en Mer de Rubis."
Le rideau de pluie bloquait la vue, mais la mer à leurs pieds était agitée. Le loup s'arrêta entre deux larges rochers plats appuyés l'un contre l'autre, fournissant un abri mais l'aoranne de s'y réfugia pas, demeurant debout face à l'orage. Il savait vers qui étaient tournées ses pensées. Une viéra dont elle ne connaissait pas les traits ni le nom, seulement les mots échangés avec Akame. Des mots qu'elle allait regretter amèrement.
Mais comme toujours, les autres trouvaient le moyen de faire le lien avec le Tigre.
"Pourquoi ne lui apportes-tu pas sa tête toi-même ?
- J'ai pris mes dispositions, je recevrais un premier rapport rapidement ce n'est qu'une question de temps avant que l'on sache qui elle est et où la trouver.
- Mais c'est un autre qui va réussir grâce à toi.
- Je n'ai pas à quémander pour son regard comme on donne un os à un chien. Je suis sa femme, je fais ce que je dois faire et je n'ai pas à leur agiter sous le nez que tout ça c'est grâce à moi, je ne suis pas Byakuya et je n'ai rien à prouver."
Elle soupira, évacuant un peu de la pression de ces derniers jours, une goutte d'eau dans la mer. Le loup se redressa les sourcils froncé. Mieux que personne il la connaissait, il voyait tout, entendait tout même ses plus intimes pensées. Il voyait sans savoir, mais il voyait. Il sentait qu'elle était à bouts.
"Kikyo, je penses que..."
Il aurait suffit d'un rien pour que le miroir vole en éclats.
"Arrêtes, Akio. je sais ce que tu vas me dire. Que tout va bien, que le temps fera le reste, que rien n'est jamais parfait et que je suis constamment sous pression. Que c'est un ambitieux, un homme sans patience qui n'écoute que lui et que je dois seulement me montrer forte. Je ne suis pas comme toi, moi, je ne suis pas née d'une créature mortelle et d'un kami ! Je suis humaine ! et tu sais quoi ? Les humains sont ainsi, soit nous pensons avec orgueil que tout est parfait, soit nous poussons encore. "
Le tonnerre couvrait ses éclats de voix, et sa respiration saccadée. Le loups assis la fixait intensément malgré l'eau qui lui tombait dans les yeux.
"Tu n'es pas comme lui non plus.
- Bien sur que non, ce n'est pas non plus ce qu'il veut, il me l'a dit."
Elle se laissa tomber contre le rocher, la pluie lui balayait le visage.
"Entre ce qu'il dit, et ce qu'il dira de ce qu'il a dit trois jours après l'avoir dit, il y a un monde Kikyo et tu le sais.
- Je sais, mais je sais aussi ce que je fais.
- Vraiment tu le sais ? Parce que mis à part sa fortune et les deux vassaux qu'il te préfère, tout ce qu'il a c'est à toi qu'il le doit. Ce sont tes hommes qui lui ont sauvé la vie lorsque les siens étaient absents. C'est toi qui lui amène ses vassaux, toi qui fera toujours en sorte qu'il ai raison même s'il a tort. Sans tes manœuvres, le Serpent n'aurait jamais plié le genou hier. C'est toi, Kikyo, qui accepte d'être traitée comme une erreur. Toi qui sers la moindre ambition, le moindre caprice et le regarde en récolter les fruits mûrs qui lui tombent dans la main pendant qu'il te...
- ASSEZ !"
Le tonnerre gronda de nouveau, un éclair frappa le sol en contrebas, assourdissant le duo pendant de longues secondes. Quand le ciel redevint sombre, la lame de diamant était posée contre l'encolure du loup.
"Ne me demandes pas de te regarder tomber, toi que j'ai juré de défendre.
- Comment oses-tu..."
Sa voix vibrait de colère. Elle ne voulait pas entendre la suite qui n'était pas une crainte, même pas une douleur, mais une insulte à tout ce qu'elle était. Le loup émit un grognement sourd pour la réveiller, la faire sortir de cet état de rage incontrôlable. Réalisant son geste, Kikyo baissa son arme et son regard. Elle n'avait jamais levé la main sur lui, même dans les pires moments. Peu rancunier, comme le sont tant d'animaux fidèles, il se rapprocha d'elle, la poussant doucement du bout de sa truffe. Elle y posa sa main tremblante. Pendant plusieurs minutes, elle ne dit rien.
"Sanjuro...
- ...ne tardera pas à l'apprendre.
- Il ne te reprochera pas cet échec. Il partage ta clairvoyance, il sait ce que tu devras faire. Ce ne sera pas le cas de ses conseillers. Ta famille...
- Dira que ce mariage était une erreur, qu'ils ont vendu la sœur de leur seigneur à un monstre."
Le loup poussa un peu plus sur la poitrine de sa compagne, accusant le coup de la fracture qui venait de grandir un peu plus. Elle l'avait toujours accepté, elle affrontait la réalité avec dignité mais cette réalité commençait à vaciller. Si elle ne serait jamais une Kurusu aux yeux du clan, elle ne serait jamais non plus une vraie Kakita. Elle ne serait rien de plus que la moitié de rien du tout, une moitié de rien avec beaucoup d'impact, mais pour toujours reléguée au rang d'erreur, quelque chose qui n'aurait jamais dû exister.
"J'ai gagné ce droit...
- Tu devras le faire valoir toute ta vie, enfant. Jusqu'à ta dernière heure, tu lutteras pour exister."
Après une brève étreinte, le loup se détacha de Kikyo. Il s'avança vers le rebord de la falaise la plus proche et se retourna, lui lançant un dernier regard, l'esprit déjà loin.
"Pour ton honneur ?
- Pour mon serment" lui répondit-elle.
Le loup soupira.
"Par amour.
- Tu m'as appris que lorsque les deux vont de paire, c'est que ce choix était le bon. Qu'importent les conséquences."
Akio se résigna, il disparut derrière le rideau sombre et humide qui s'abattait sur la côte orientale, la laissant seule face à la tempête. Autour d'elle, les ténèbres semblaient lentement progresser, dévorer la plage et les rochers, la mer et le ciel. Les éléments déchainés, à son image en cet instant. Les fragments de sa vie projetés devant elle comme l'écume sur les rochers, toujours dans le noir.
La moitié de rien du tout
Une erreur
Un monstre
Ne me demande pas de te regarder chuter
Ce que vous redoutez finira par arriver
Vous pouvez disposer
l'Ambre appartient au Diamant
Je sais où est ma place
Bienvenue en ce monde, Kimiko Kurusu
Vous connaissez votre devoir, n'est ce pas chère sœur.
Vous êtes légitime, m'entendez-vous ? Qu'importe que vous ne puissiez l'appeler "mère"
Ouvre les yeux !
Je suis heureux de voir la femme que j'aime porter notre enfant.
j'ai fait mon choix, et toi ?
J'ai peur Kikyo !
Soyez mienne, où je brûlerai la Grue et ferais ramper votre seigneur, puis vous m'appartiendrez.
L'orage approche, si tu le laisses te prendre, il finira par te tuer.
"Il finira par me tuer."
La pluie cessa, mais les nuages s'alourdissaient au-dessus de la baie. Les lumières de Shirogane n'étaient pas si loin, et pourtant la ville paraissait noyée dans les ténèbres. Son kimono lui collait à la peau comme ses cheveux, elle n'avait ici rien d'une dame, d'une hime, d'une épouse, d'un samourai, d'un Haut-Commandeur, rien, la moitié de rien.
"Est-ce trop demander qu'une loyauté absolue ?" disait-il. Mensonges, ce n'est pas là tout ce qu'il demande. C'est ce qu'il demande au début mais plus le temps passe et plus il en demande plus, toujours plus. Elle avait servi, obéi, vouait une loyauté sans faille à son seigneur. Elle n'avait jamais échoué, mais ce n'était pas suffisant, ça ne l'était plus.
"La dernière heure..."
Celle de toutes les faiblesses, celle où tant de lames avaient failli. Elle y avait songé tant de fois.
"Ni à la régence, ni sur votre tombe."
Dans ses pires moments de rage, elle en était arrivée à préférer le suivre dans la mort plutôt que de faiblir sous ses yeux, avant que la raison ne la rattrape et qu'elle pense à sa fille. Kimiko avait besoin de son père, et le clan avait besoin d'Akira plus que de Kikyo, s'il fallait choisir elle n'hésiterait pas. Et pourtant...
"...Et je maudis le jour où je ne pourrais plus tomber sans me relever, car je ne serais alors plus capable de me battre pour vous."
Lentement, elle leva les yeux, défiant la foudre de son regard telle une statue de diamant étincelante dans les ténèbres. L'éclat de Shiroyume leur faisait face à ses côtés. Froide Kikyo, glaciale Kikyo, ni Kakita, ni Kurusu, ni Lotus ni Grue, une erreur née d'une faute devenue bien trop tôt ce qu'elle n'aurait jamais dû être. On lui avait forcé la main plus d'une fois et à raison. Elle n'était pas un tigre, elle n'était pas une grue, mais quoi qu'il en dise elle avait dépassé de loin toutes ses espérances, il avait besoin d'elle et qu'importe qu'il ne le reconnaisse jamais, elle avait choisi. Jusqu'à ce que la dernière heure vienne, que l'orage la dévore pour de bon.
"Debout, à la place qui me revient. Ses ambitions, ses rêves, son désir, tout cela m'appartient. Je suis Kikyo, celle qui doit renaître."
Le tonnerre gronda une dernière fois, plus faible. Ce ne serait pas pour ce soir.
"Kikyo, celle qui doit renaître. Puisse-tu affronter l'enfer et le défier."
Tels furent les mots de sa mère lorsqu'elle avait chois son nom au fond de sa cellule sans savoir à quel point ses rêves étaient flous sur ce qu'elle aurait à affronter. L'enfer ? Peut-être, pour certains il n'y avait aucun doute. Il voulait qu'ell soit une Kurusu, il la trouvait "trop Kakita", elle ? Elle qui n'était ni un tigre, ni une Grue. Elle n'avait pas à défier l'Enfer, elle avait épousé le démon.
La pluie cessa, mais les nuages s'alourdissaient au-dessus de la baie. Les lumières de Shirogane n'étaient pas si loin, et pourtant la ville paraissait noyée dans les ténèbres. Son kimono lui collait à la peau comme ses cheveux, elle n'avait ici rien d'une dame, d'une hime, d'une épouse, d'un samourai, d'un Haut-Commandeur, rien, la moitié de rien.
"Est-ce trop demander qu'une loyauté absolue ?" disait-il. Mensonges, ce n'est pas là tout ce qu'il demande. C'est ce qu'il demande au début mais plus le temps passe et plus il en demande plus, toujours plus. Elle avait servi, obéi, vouait une loyauté sans faille à son seigneur. Elle n'avait jamais échoué, mais ce n'était pas suffisant, ça ne l'était plus.
"La dernière heure..."
Celle de toutes les faiblesses, celle où tant de lames avaient failli. Elle y avait songé tant de fois.
"Ni à la régence, ni sur votre tombe."
Dans ses pires moments de rage, elle en était arrivée à préférer le suivre dans la mort plutôt que de faiblir sous ses yeux, avant que la raison ne la rattrape et qu'elle pense à sa fille. Kimiko avait besoin de son père, et le clan avait besoin d'Akira plus que de Kikyo, s'il fallait choisir elle n'hésiterait pas. Et pourtant...
"...Et je maudis le jour où je ne pourrais plus tomber sans me relever, car je ne serais alors plus capable de me battre pour vous."
Lentement, elle leva les yeux, défiant la foudre de son regard telle une statue de diamant étincelante dans les ténèbres. L'éclat de Shiroyume leur faisait face à ses côtés. Froide Kikyo, glaciale Kikyo, ni Kakita, ni Kurusu, ni Lotus ni Grue, une erreur née d'une faute devenue bien trop tôt ce qu'elle n'aurait jamais dû être. On lui avait forcé la main plus d'une fois et à raison. Elle n'était pas un tigre, elle n'était pas une grue, mais quoi qu'il en dise elle avait dépassé de loin toutes ses espérances, il avait besoin d'elle et qu'importe qu'il ne le reconnaisse jamais, elle avait choisi. Jusqu'à ce que la dernière heure vienne, que l'orage la dévore pour de bon.
"Debout, à la place qui me revient. Ses ambitions, ses rêves, son désir, tout cela m'appartient. Je suis Kikyo, celle qui doit renaître."
Le tonnerre gronda une dernière fois, plus faible. Ce ne serait pas pour ce soir.
"Kikyo, celle qui doit renaître. Puisse-tu affronter l'enfer et le défier."
Tels furent les mots de sa mère lorsqu'elle avait chois son nom au fond de sa cellule sans savoir à quel point ses rêves étaient flous sur ce qu'elle aurait à affronter. L'enfer ? Peut-être, pour certains il n'y avait aucun doute. Il voulait qu'ell soit une Kurusu, il la trouvait "trop Kakita", elle ? Elle qui n'était ni un tigre, ni une Grue. Elle n'avait pas à défier l'Enfer, elle avait épousé le démon.
... Souffrez que j'en devienne un à mon tour.
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
Comme la tempête qui s’efface après avoir malmené le bord de mer, l'orage passe à son tour. Un long orage, qui aura tourmenté bien des âmes, à commencer par la sienne. Jusqu'à hier soir, elle se serait attendu à tout et même au pire. D'une certaine façon, c'était le cas. Shinme avait une fois de plus été décevante.
"Si elle est incapable de tenir sa langue, elle n'en aura pas besoin pour me servir.
- On ne fait pas fondre un katana parce qu'il n'a pas réussi à trancher. On l'aiguise." Avait-il dit, alors que des jours plus tôt il l'accusait presque de laxisme.
Elle bouillait de rage, et s'ils n'avaient été trois membres du clan présents dans le jardin avec eux, elle aurait certainement haussé le ton malgré l'étonnant calme dont il faisait preuve.
"J'apprécie votre entrain, cela dit."
Un souffle amusé, il se moque en plus ? Elle devait prendre sur elle, ne pas froncer les sourcils, ne rien afficher de la colère qui grondait au creux de son ventre. il continuait de manger sa glace pilée à la menthe, debout sur le pont du jardin. N'importe qui n'aurait rien vu d'autre qu'un homme et son épouse sous un paisible ciel nocturne. Personne n'aurait pu entrevoir le véritable ouragan silencieux, ce n'était peut-être pas la brise estivale qui faisait bouger les branches du saule.
Pendant plusieurs minutes, le silence retomba. Il n'était plus question de parler de Shinme, de cette viéra, tout était dit. C'était le moment où il finissait toujours par dire :
"Avez vous quelque chose à dire ?"
Voilà.
- Non rien, je venais vous tenir informée mais je ne comptais pas troubler votre solitude si vous souhaitez que je vous laisse.
- Je vous l'aurais dit si je voulais rester seul."
Il n'ajouta rien, indifférent, comme s'il attendait qu'elle demande la permission de rester. Et puis quoi encore, quémander son regard pour se faire ensuite éconduire ? Elle ne lui ferait pas ce plaisir. Elle attendait, bouillant intérieurement, qu'il lui commande de disposer.
"Souhaitez-vous que je reste ?
- Oui."
Elle cligna des yeux. Avait-elle bien entendu ?
"... Alors je reste." Lâcha t-elle dans un souffle.
Qu'il le veuille vraiment ou non, quelle importance ? Elle était toujours en colère, mais le moindre changement méritait au moins qu'elle s'y accroche. Ils ne pouvaient pas non plus passer des mois à s'ignorer. Elle se rapprocha en silence avant de poser ses deux mains sur le pont, fixant le bassin à leurs pieds. Dans son reflet, elle voyait toujours ce regard sévère, indifférent.
"Cette sévérité et attente que vous avez envers votre suivante. Ne l'oubliez pas."
Elle soupira intérieurement et fit en sorte de ne pas croiser son regard tout en l'écoutant avec la plus grande attention.
"C'est ce qui est requis d'un seigneur du Lotus Blanc. Une justesse dans les récompenses et les punitions.
- Je l'ai toujours été avec elle. Jamais avec vos hommes, car cela vous appartient.
- Récompensez trop vos hommes, et ils deviennent oisif et arrogant, à l'image de ceux qui servaient le Serpent auparavant. Punissez les trop sévèrement, et ils se mutineront.
- Hai.
- Pour être respecté, il faut aussi être crains. Si vos hommes ne craignent pas la punition, ils n'obéiront pas. Prendrons des risques. Voilà pourquoi vous devez trouver un juste châtiment pour Shinme. Trouver ce qui infligera la plus grande crainte d'un nouvel échec, sans l'aliéner à votre cause."
A son tour il posa ses yeux sur le bassin.
"Vous la connaissez. Seule vous pouvez trouver votre réponse."
Bien sur qu'elle connaissait Shinme, mieux que personne. Elle voyait au-delà de ce que les autres, même Inelis qui partage pourtant sa vie, percevaient comme un culte de la soumission et du châtiment. Punir pour punir serait aussi inutile que ne pas la punir du tout, si elle se contentait de pardonner non seulement elle s’affaiblissait mais en plus Shinme, confuse et dans un élan de culpabilité, se punirait elle-même au centuple de ce qui aurait été une juste peine.
Elle aurait aimé saisir le col de son haori, le regarder droit dans les yeux et lui crier combien il pouvait être insupportable. Il était le seul à douter, le seul qui se refusait à la voir sous son visage de meneur tout ça parce qu'elle ne menait pas des soldats mais des aventuriers. Seule la présence de Misaki la retenait.
Akira posa le bol en équilibre sur la rambarde, puis posa sa main sur la sienne. Elle frémit, et se figea. Ce seul geste comme un electrochoc, la fit instantanément lever les yeux vers lui et croiser son regard, regard qui n'avait plus rien d'indifférent.
"Ai-je tort, d'en demander trop et vite, de vous, Kurusu Tsubone ?"
Ces mots comme un coup de tonnerre, s'incrustèrent dans sa chair si profondément qu'elle en remercia plus tard les feux d'artifice dans le ciel qui couvrirent le hoquet de surprise, presque de douleur, qui s'échappa de ses lèvres. Elle ne pouvait détacher son regard de lui. C'était à nouveau comme avant.
"Vous vous êtes montré injuste à mon égard à maintes reprises. Mais c'était pour le bien du Lotus Blanc.
- Je souhaite simplement que vous puissiez voir le même monde que moi."
L'ouragan ne soufflait plus sous le saule dans le jardin. Le rideau de feuille couvrait leur échange sous les premiers feux de l'été sans que personne ne puisse voir ni comprendre qu'ils venaient de se retrouver.
Les draps furent moins froid, et le lit moins grand cette nuit là. Une autre flamme renaissait, et se consuma encore longtemps après que les dernières fusées se soient tues. Et tandis que les affaires du matin les attendaient l'un et l'autre depuis quelques heures, Kikyo s'éveilla plus sereine, et juste à temps pour voir le tigre ouvrir les yeux à son tour, son visage si près qu'elle aurait pu en saisir ses lèvres, ce qu'elle fit, et sentit son étreinte se resserrer.
Était-ce l'été, sa chaleur contenue entre les rideaux de soie qui entouraient leur lit ? Elle ne voulait pas se lever. Pour la première fois, ce fut elle qui le retint, ce serait à cause d'elle s'il serait plus en retard encore qu'ils ne l'étaient déjà.
Midi sonna, et ce fut la seule personne au monde qui puisse encore les raisonner l'un et l'autre, qui se manifesta enfin : Kimiko. L'enfant ne pleurait jamais, mais on l'entendait à présent s'agiter, réclamant son repas aux servantes trop confuses pour oser frapper à la porte de la chambre du seigneur.
"Il le faut cette fois." Déclara presque solennellement le tigre en se redressant. Comme toute mère à l'appel de son enfant, Kikyo s'était levée avant de répondre, prête à bondir dans la chambre à côté, mais avant de saisir son peignoir elle fut interrompue par une main lui tendant le haori violet laissé au pied du lit la veille. Elle s'en saisit dans un vague sourire avant de s'en vêtir, et de quitter la chambre. A son retour, il n'était évidemment plus là, rappelé à l'ordre par son devoir, et c'est dans un soupir trop longtemps contenu que Kikyo se laissa tomber sur le lit, laissant sa peau satinée au soleil afin d'en conserver le plus longtemps possible cette chaleur qui marquait à nouveau son corps. Elle était à lui.
"Si elle est incapable de tenir sa langue, elle n'en aura pas besoin pour me servir.
- On ne fait pas fondre un katana parce qu'il n'a pas réussi à trancher. On l'aiguise." Avait-il dit, alors que des jours plus tôt il l'accusait presque de laxisme.
Elle bouillait de rage, et s'ils n'avaient été trois membres du clan présents dans le jardin avec eux, elle aurait certainement haussé le ton malgré l'étonnant calme dont il faisait preuve.
"J'apprécie votre entrain, cela dit."
Un souffle amusé, il se moque en plus ? Elle devait prendre sur elle, ne pas froncer les sourcils, ne rien afficher de la colère qui grondait au creux de son ventre. il continuait de manger sa glace pilée à la menthe, debout sur le pont du jardin. N'importe qui n'aurait rien vu d'autre qu'un homme et son épouse sous un paisible ciel nocturne. Personne n'aurait pu entrevoir le véritable ouragan silencieux, ce n'était peut-être pas la brise estivale qui faisait bouger les branches du saule.
Pendant plusieurs minutes, le silence retomba. Il n'était plus question de parler de Shinme, de cette viéra, tout était dit. C'était le moment où il finissait toujours par dire :
"Avez vous quelque chose à dire ?"
Voilà.
- Non rien, je venais vous tenir informée mais je ne comptais pas troubler votre solitude si vous souhaitez que je vous laisse.
- Je vous l'aurais dit si je voulais rester seul."
Il n'ajouta rien, indifférent, comme s'il attendait qu'elle demande la permission de rester. Et puis quoi encore, quémander son regard pour se faire ensuite éconduire ? Elle ne lui ferait pas ce plaisir. Elle attendait, bouillant intérieurement, qu'il lui commande de disposer.
"Souhaitez-vous que je reste ?
- Oui."
Elle cligna des yeux. Avait-elle bien entendu ?
"... Alors je reste." Lâcha t-elle dans un souffle.
Qu'il le veuille vraiment ou non, quelle importance ? Elle était toujours en colère, mais le moindre changement méritait au moins qu'elle s'y accroche. Ils ne pouvaient pas non plus passer des mois à s'ignorer. Elle se rapprocha en silence avant de poser ses deux mains sur le pont, fixant le bassin à leurs pieds. Dans son reflet, elle voyait toujours ce regard sévère, indifférent.
"Cette sévérité et attente que vous avez envers votre suivante. Ne l'oubliez pas."
Elle soupira intérieurement et fit en sorte de ne pas croiser son regard tout en l'écoutant avec la plus grande attention.
"C'est ce qui est requis d'un seigneur du Lotus Blanc. Une justesse dans les récompenses et les punitions.
- Je l'ai toujours été avec elle. Jamais avec vos hommes, car cela vous appartient.
- Récompensez trop vos hommes, et ils deviennent oisif et arrogant, à l'image de ceux qui servaient le Serpent auparavant. Punissez les trop sévèrement, et ils se mutineront.
- Hai.
- Pour être respecté, il faut aussi être crains. Si vos hommes ne craignent pas la punition, ils n'obéiront pas. Prendrons des risques. Voilà pourquoi vous devez trouver un juste châtiment pour Shinme. Trouver ce qui infligera la plus grande crainte d'un nouvel échec, sans l'aliéner à votre cause."
A son tour il posa ses yeux sur le bassin.
"Vous la connaissez. Seule vous pouvez trouver votre réponse."
Bien sur qu'elle connaissait Shinme, mieux que personne. Elle voyait au-delà de ce que les autres, même Inelis qui partage pourtant sa vie, percevaient comme un culte de la soumission et du châtiment. Punir pour punir serait aussi inutile que ne pas la punir du tout, si elle se contentait de pardonner non seulement elle s’affaiblissait mais en plus Shinme, confuse et dans un élan de culpabilité, se punirait elle-même au centuple de ce qui aurait été une juste peine.
Elle aurait aimé saisir le col de son haori, le regarder droit dans les yeux et lui crier combien il pouvait être insupportable. Il était le seul à douter, le seul qui se refusait à la voir sous son visage de meneur tout ça parce qu'elle ne menait pas des soldats mais des aventuriers. Seule la présence de Misaki la retenait.
Akira posa le bol en équilibre sur la rambarde, puis posa sa main sur la sienne. Elle frémit, et se figea. Ce seul geste comme un electrochoc, la fit instantanément lever les yeux vers lui et croiser son regard, regard qui n'avait plus rien d'indifférent.
"Ai-je tort, d'en demander trop et vite, de vous, Kurusu Tsubone ?"
Ces mots comme un coup de tonnerre, s'incrustèrent dans sa chair si profondément qu'elle en remercia plus tard les feux d'artifice dans le ciel qui couvrirent le hoquet de surprise, presque de douleur, qui s'échappa de ses lèvres. Elle ne pouvait détacher son regard de lui. C'était à nouveau comme avant.
"Vous vous êtes montré injuste à mon égard à maintes reprises. Mais c'était pour le bien du Lotus Blanc.
- Je souhaite simplement que vous puissiez voir le même monde que moi."
L'ouragan ne soufflait plus sous le saule dans le jardin. Le rideau de feuille couvrait leur échange sous les premiers feux de l'été sans que personne ne puisse voir ni comprendre qu'ils venaient de se retrouver.
Les draps furent moins froid, et le lit moins grand cette nuit là. Une autre flamme renaissait, et se consuma encore longtemps après que les dernières fusées se soient tues. Et tandis que les affaires du matin les attendaient l'un et l'autre depuis quelques heures, Kikyo s'éveilla plus sereine, et juste à temps pour voir le tigre ouvrir les yeux à son tour, son visage si près qu'elle aurait pu en saisir ses lèvres, ce qu'elle fit, et sentit son étreinte se resserrer.
Était-ce l'été, sa chaleur contenue entre les rideaux de soie qui entouraient leur lit ? Elle ne voulait pas se lever. Pour la première fois, ce fut elle qui le retint, ce serait à cause d'elle s'il serait plus en retard encore qu'ils ne l'étaient déjà.
Midi sonna, et ce fut la seule personne au monde qui puisse encore les raisonner l'un et l'autre, qui se manifesta enfin : Kimiko. L'enfant ne pleurait jamais, mais on l'entendait à présent s'agiter, réclamant son repas aux servantes trop confuses pour oser frapper à la porte de la chambre du seigneur.
"Il le faut cette fois." Déclara presque solennellement le tigre en se redressant. Comme toute mère à l'appel de son enfant, Kikyo s'était levée avant de répondre, prête à bondir dans la chambre à côté, mais avant de saisir son peignoir elle fut interrompue par une main lui tendant le haori violet laissé au pied du lit la veille. Elle s'en saisit dans un vague sourire avant de s'en vêtir, et de quitter la chambre. A son retour, il n'était évidemment plus là, rappelé à l'ordre par son devoir, et c'est dans un soupir trop longtemps contenu que Kikyo se laissa tomber sur le lit, laissant sa peau satinée au soleil afin d'en conserver le plus longtemps possible cette chaleur qui marquait à nouveau son corps. Elle était à lui.
...Et il n'appartenait qu'à elle.
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
Une bataille attendue, préparée, et pourtant les enjeux étaient tels que ses mains tremblaient toujours d'impatience. Elle voulait en être, depuis le début. Elle avait pris ses dispositions auprès de l'Ordre et laissé son testament posé bien en évidence sur son bureau au cas où. Elle n'aurait qu'à le ranger à son retour, si elle rentrait. Ce geste était devenu une habitude, afin de ne jamais être pris de court le moment venu. Elle était ensuite rentrée à Shirogane et passé de longues heures à préparer son armure, son katana, tout en parlant à Kimiko assise dans la pièce, à bonne distance de tout ce qui pouvait la blesser cependant.
Vive d'esprit à son huitième mois, la petite princesse se plaisant à ramper à quatre pattes partout où elle pouvait, cherchant à saisir tout objet à sa portée, si bien qu'on avait pris l'habitude de tout mettre en hauteur. Sachiko finit par la coucher.
"Voilà, tout est prêt."
La dernière servante était partie se coucher depuis plus d'une heure quand elle termina de nouer la dernière sangle de sa nouvelle armure, plus légère que celle qu'elle portait habituellement trop bruyante pour une mission comme celle de demain soir. Quelque chose d'ailleurs, une pensée fugace et imperceptible occupait son esprit à ce sujet, ces pensées que l'on a sur le bout de la langue sans pouvoir l'exprimer : quelque chose manquait à leur équipe, mais quoi ? Kikyo soupira. C'était sans doute la nervosité. Elle réfléchissait trop, alors qu'elle était pourtant rodée à ce genre d'exercice, pourquoi tout d'un coup faire preuve de faiblesse ?
Elle ne poussa pas plus loin sa pensée, la porte de Ten no Tsuki s'ouvrit. Il était bien tard. Les marches de l'escalier grincèrent puis elle entendit s'ouvrir le fusuma de la chambre de Kimiko. Sans y prêter guère attention Kikyo, méticuleuse au possible, finit de ranger ses affaires pour laisser sa coiffeuse propre. Le silence régna pendant plusieurs minutes, puis la chambre de Kimiko se referma et ce fut au tout de la porte derrière elle de s'ouvrir. Elle se retourna, croisant le regard du tigre qui à son tour posa ses armes avant de s'avancer vers elle.
Pas un mot, pas un "bonsoir". La porte se referma et elle ne vit que son bras puis son visage. Il avait le visage grave de celui qui part à la guerre prêt à mourir, le regard brûlant, et ses mains tremblaient autant que les siennes. Ce n'était pas juste l'impatience de la bataille finalement. Les mots ne sont pas nécessaire, les soupirs parlent. Cette nuit pourrait bien être la dernière.
Dans les draps froissés de longues heures plus tard elle posa son front contre le sien pour croiser son regard. Les fenêtres ouvertes laissaient entrer la brise d'été à travers les rideaux, elle frissonna. Un instant, elle fut tentée de lui dire ce qui occupait son esprit mais à quoi bon lui imposer plus de doutes à la veille de la bataille ? Il avait tout préparé, tout son plan pour protéger Kutsuki ne pouvait pas être remit en cause maintenant, encore moins par elle, surtout qu'elle était incapable de dire ce qui la tracassait avec précision. Les heures passèrent encore.
Le soleil levé depuis longtemps, ce fut la chaleur qui la réveilla, une chaleur lourde, estivale, et orientale. Elle transpirait avant même de quitter les draps où elle se trouvait seule. Quelques minutes après avoir émergé, elle l'entendit dans la pièce à côté qui entrait dans le bain. Kikyo se leva, ne prit même pas la peine d'enfiler un yukata pour le rejoindre. Cette bataille serait rude, et pas seulement à cause des ennemis si la chaleur persistait.
Juste avant de passer le fusuma, elle s'arrêta brusquement, le regard attiré par quelque chose. Elle bascula en arrière très légèrement, son regard se posa sur sa coiffeuse, les deux chakrams posés sur le bord près du mannequin.
"Vous devriez vous renseigner sur ces nouveaux combattants, vous qui aimez ce genre de choses avec votre cousin."
Elle avait suivi son conseil évidemment. Elle y était allé et plus que la danse, trop abstraite à ses yeux pour l'heure, elle avait apprécié le maniement de ces armes circulaires. Jusque là elle n'avait toujours connu que le kenjutsu et le iaijutsu, bien qu'elle possède un pistolet de petit calibre hérité de l'armée impériale. Mais ces armes lui avaient plu. A titre de distraction, curieuse, elle avait entreprit d'apprendre à les manier et s'en sortant assez bien. Mais pourquoi se sentir brusquement, ce matin, attirée par eux ?
Elle resta là, figée pendant plusieurs minutes, cherchant à débloquer cette porte fermée dans son propre esprit. Ce petit détail dans le combat à venir qui la dérange. Elle avait toutes les pièces du puzzle sous le nez pourtant.
Le zu. le nid. Les combattants bloqués en bas incapable d'agir tant que la bête restait hors de portée.
Les morts vivants, les attaques en nombre, les embuscades.
Le clan ne dispose de quasiment aucun combattant à distance.
Kikyo se mordit la lèvre. Songeait-elle sérieusement à...? Non. Le iaijutsu, c'était toute sa vie. Elle suivait les traces de son père, duelliste Kakita, sa lame était dévouée à Akira. C'était tout ce qu'elle connaissait, tout ce qu'elle avait toujours connu et ne voulait rien connaitre d'autre si ce n'est pas pure curiosité.
Vive d'esprit à son huitième mois, la petite princesse se plaisant à ramper à quatre pattes partout où elle pouvait, cherchant à saisir tout objet à sa portée, si bien qu'on avait pris l'habitude de tout mettre en hauteur. Sachiko finit par la coucher.
"Voilà, tout est prêt."
La dernière servante était partie se coucher depuis plus d'une heure quand elle termina de nouer la dernière sangle de sa nouvelle armure, plus légère que celle qu'elle portait habituellement trop bruyante pour une mission comme celle de demain soir. Quelque chose d'ailleurs, une pensée fugace et imperceptible occupait son esprit à ce sujet, ces pensées que l'on a sur le bout de la langue sans pouvoir l'exprimer : quelque chose manquait à leur équipe, mais quoi ? Kikyo soupira. C'était sans doute la nervosité. Elle réfléchissait trop, alors qu'elle était pourtant rodée à ce genre d'exercice, pourquoi tout d'un coup faire preuve de faiblesse ?
Elle ne poussa pas plus loin sa pensée, la porte de Ten no Tsuki s'ouvrit. Il était bien tard. Les marches de l'escalier grincèrent puis elle entendit s'ouvrir le fusuma de la chambre de Kimiko. Sans y prêter guère attention Kikyo, méticuleuse au possible, finit de ranger ses affaires pour laisser sa coiffeuse propre. Le silence régna pendant plusieurs minutes, puis la chambre de Kimiko se referma et ce fut au tout de la porte derrière elle de s'ouvrir. Elle se retourna, croisant le regard du tigre qui à son tour posa ses armes avant de s'avancer vers elle.
Pas un mot, pas un "bonsoir". La porte se referma et elle ne vit que son bras puis son visage. Il avait le visage grave de celui qui part à la guerre prêt à mourir, le regard brûlant, et ses mains tremblaient autant que les siennes. Ce n'était pas juste l'impatience de la bataille finalement. Les mots ne sont pas nécessaire, les soupirs parlent. Cette nuit pourrait bien être la dernière.
Dans les draps froissés de longues heures plus tard elle posa son front contre le sien pour croiser son regard. Les fenêtres ouvertes laissaient entrer la brise d'été à travers les rideaux, elle frissonna. Un instant, elle fut tentée de lui dire ce qui occupait son esprit mais à quoi bon lui imposer plus de doutes à la veille de la bataille ? Il avait tout préparé, tout son plan pour protéger Kutsuki ne pouvait pas être remit en cause maintenant, encore moins par elle, surtout qu'elle était incapable de dire ce qui la tracassait avec précision. Les heures passèrent encore.
Le soleil levé depuis longtemps, ce fut la chaleur qui la réveilla, une chaleur lourde, estivale, et orientale. Elle transpirait avant même de quitter les draps où elle se trouvait seule. Quelques minutes après avoir émergé, elle l'entendit dans la pièce à côté qui entrait dans le bain. Kikyo se leva, ne prit même pas la peine d'enfiler un yukata pour le rejoindre. Cette bataille serait rude, et pas seulement à cause des ennemis si la chaleur persistait.
Juste avant de passer le fusuma, elle s'arrêta brusquement, le regard attiré par quelque chose. Elle bascula en arrière très légèrement, son regard se posa sur sa coiffeuse, les deux chakrams posés sur le bord près du mannequin.
"Vous devriez vous renseigner sur ces nouveaux combattants, vous qui aimez ce genre de choses avec votre cousin."
Elle avait suivi son conseil évidemment. Elle y était allé et plus que la danse, trop abstraite à ses yeux pour l'heure, elle avait apprécié le maniement de ces armes circulaires. Jusque là elle n'avait toujours connu que le kenjutsu et le iaijutsu, bien qu'elle possède un pistolet de petit calibre hérité de l'armée impériale. Mais ces armes lui avaient plu. A titre de distraction, curieuse, elle avait entreprit d'apprendre à les manier et s'en sortant assez bien. Mais pourquoi se sentir brusquement, ce matin, attirée par eux ?
Elle resta là, figée pendant plusieurs minutes, cherchant à débloquer cette porte fermée dans son propre esprit. Ce petit détail dans le combat à venir qui la dérange. Elle avait toutes les pièces du puzzle sous le nez pourtant.
Le zu. le nid. Les combattants bloqués en bas incapable d'agir tant que la bête restait hors de portée.
Les morts vivants, les attaques en nombre, les embuscades.
Le clan ne dispose de quasiment aucun combattant à distance.
Kikyo se mordit la lèvre. Songeait-elle sérieusement à...? Non. Le iaijutsu, c'était toute sa vie. Elle suivait les traces de son père, duelliste Kakita, sa lame était dévouée à Akira. C'était tout ce qu'elle connaissait, tout ce qu'elle avait toujours connu et ne voulait rien connaitre d'autre si ce n'est pas pure curiosité.
D'un autre côté, cet orgueil de Grue ne lui servirait à rien si à cause de lui elle échouait dans sa mission.
La mission d'une première lame, d'une duelliste, est d'accompagner et de défendre le corps et l'honneur de son seigneur. Comment pourrait-elle prétendre honorer son serment si elle ne portait pas le sabre lors de cette bataille ?
Akira savait pourtant se défendre au corps à corps, elle ne lui serait d'aucune utilité sauf en de rares occasions, du moins, moins utile qu'avec une arme à distance capable de dévier l'ennemi ou de le couvrir.
C'est une honte, rien que d'y songer... elle possédait Shiroyume la lame de diamant. Comment pouvait-elle songer, oser songer à délaisser une telle arme, si efficace contre les créatures de l'ombre ?
Le sort d'une bataille dépend-il de la honte, ou de son efficacité ?
Il dépendra peut-être de sa capacité à surprendre, en tout cas.
Voilà un point sur lequel elle n'avait aucune hésitation.
Lorsque vint l'heure de quitter la demeure, elle descendit en dernier dans son armure, prête à le suivre sur le champ de bataille. Kutsuki avait déjà beaucoup perdu face à l'Araignée et ce village ne devait plus souffrir à cause de la maho. Plus aucune larme ne devait être versée en Yanxia, plus aucune mère ne devait perdre son enfant enlevé par les morts. Plus jamais le nom de Hunter ne devait être associé à la souffrance et aux morts par dizaines. Trop de crimes, trop d’infamie.
Pour la dernière fois, avant de pousser la porte et d'agir en seigneur et lame jusqu'à la mort de l'ennemi ou la leur, le tigre passa son bras autour de la taille de son épouse et l'embrassa longuement. C'est là qu'il s'aperçut de la présence de deux nouvelles armes à sa ceinture, les deux du même côté, en plus de son katana.
Pour la dernière fois, avant de pousser la porte et d'agir en seigneur et lame jusqu'à la mort de l'ennemi ou la leur, le tigre passa son bras autour de la taille de son épouse et l'embrassa longuement. C'est là qu'il s'aperçut de la présence de deux nouvelles armes à sa ceinture, les deux du même côté, en plus de son katana.
De cette bataille pourrait déterminer son choix, et inversement... qui sait ?
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
Quelle bonne idée ce fut, au final, que de prendre avec elle ces nouvelles armes "au cas où". Son intuition se révéla juste lorsque l'ennemi apparut. Un mage et un shinobi dans les gorges, trop étroit pour faire un détour et de toute façon cela aurait perdu du temps il incantait trop vite.
Elle n'eut qu'une ou deux secondes pour réfléchir, mais l'ordre de son seigneur était clair : "occupez-vous du mage". Elle saisit ses chakrams, sans hésitation. Shiroyume demeura à sa ceinture.
Elle n'était pas danseuse, elle ne maîtrisait aucune des techniques ethérées de cette discipline, elle ne connaissait encore que les bases des mouvements d'attaque physique qu'elle maîtrisait. Grâce à son entraînement au iaijutsu, elle parvenait même à combiner mouvement et lancer avec une vitesse surprenante. Mais elle n'avait jamais testé en véritable combat et fut la première surprise d'en constater la redoutable efficacité. En quelques coups, il tomba à terre sans avoir eu le temps d'incanter plus d'un sort. Le ninja fut vaincu à son tour moins de dix secondes plus tard. Mais elle n'eut pas le temps de se poser la moindre question entre la femme qui apparut au haut des gorges pour ouvrir le portail qui força le Sorcier à sortir, et Amélianne qui prit l'apparence d'un ange momentanément. Toute cette magie oppressante ne lui plaisait pas, pas plus que le Sorcier dont l'aura ténébreuse commençait à envahir les alentours.
Le désespoir, la peur, elle ne put résister à son influence comme si on la forçait à revoir les plus horribles moments de sa vie. La guerre, les exécutions, la prison... elle ne pouvait se défaire de ces pensées même en tentant de se ressaisir. Autour d'elle, les autres ne semblaient pas dans un meilleur état.
Je ne peux pas le laisser faire... pas ça...
Le vouloir est une chose, mais le pouvait-elle seulement, figée dans sa propre terreur ? Elle serrait fort le pommeau de son katana, cherchant à y puiser son courage. c'est alors qu'une vague de lumière l'envahit progressivement par derrière : Amélianne était en train de le repousser. Elle ne pouvait le vaincre à elle seule, mais l'elezenne parvint au moins à les extirper de ces ombres pour leur permettre de combattre. Le Sorcier, lui, était furieux et renforcé par le cauchemar. Il était quasiment invincible.
Je... je dois faire quelque chose...
Charger, la lame au clair, n'aurait servi à rien. Ils étaient suffisamment nombreux à l'attaquer de front et à se noyer dans les ombres. Avec Shiroyume elle avait le pouvoir de transpercer le cauchemar pour ses propres attaques, mais pas pour les autres. Elle n'y parviendrait pas seule. Les kamis semblaient avoir décidé qu'elle danserait ce soir, en fin de compte.
Elle recula d'un pas au lieu d'attaquer, et pris le temps d'inspirer profondément, de précieuses secondes.
Cela n'avait rien à avoir avec les danses thavnairoises, rien de comparables aux techniques qu'elle avait vu. Ce kata, elle l'avait déjà pratiqué contre le kami noir, contre l'araignée, elle l'avait même enseigné à Byakuya et Isarmaux bien avant d'entendre parler des danseurs. Elle l'avait toujours négligé, laissé de côté. Elle n'était en rien une miko, elle n'était que Kikyo Kurusu la dernière héritière de la lignée Tenshi qui avait choisi il y a bien longtemps la voie du bushi. Elle avait décidé de sa voie, de ne pas revendiquer son héritage, de ne pas devenir une miko comme sa mère. Mais ce soir, c'est de la Fille des Songes dont son clan avait besoin pour remporter cette bataille.
Son pendentif en diamant commença à se dissoudre, et les particules scintillantes se dispersèrent en un nuage clair qui vint harceler le sorcier tel une nuée de moucherons harceleurs. Elle voulait le gêner, l'affaiblir assez pour que ses alliés puissent l'atteindre plus facilement.
Le Sorcier s'en rendit compte le premier d'ailleurs, et tenta de les faire disparaitre elle et Amélianne. Le feu ethéré lui brûla la peau, lui arrachant un cri de douleur. Elle le fixa, fixa les ombres qui l'entouraient. Elle ne mourrait pas ce soir.
Les deux mains dans l'eau, elle se redressa péniblement, ouvrant les bras, sa voix résonna dans les gorges.
Elle n'eut qu'une ou deux secondes pour réfléchir, mais l'ordre de son seigneur était clair : "occupez-vous du mage". Elle saisit ses chakrams, sans hésitation. Shiroyume demeura à sa ceinture.
Elle n'était pas danseuse, elle ne maîtrisait aucune des techniques ethérées de cette discipline, elle ne connaissait encore que les bases des mouvements d'attaque physique qu'elle maîtrisait. Grâce à son entraînement au iaijutsu, elle parvenait même à combiner mouvement et lancer avec une vitesse surprenante. Mais elle n'avait jamais testé en véritable combat et fut la première surprise d'en constater la redoutable efficacité. En quelques coups, il tomba à terre sans avoir eu le temps d'incanter plus d'un sort. Le ninja fut vaincu à son tour moins de dix secondes plus tard. Mais elle n'eut pas le temps de se poser la moindre question entre la femme qui apparut au haut des gorges pour ouvrir le portail qui força le Sorcier à sortir, et Amélianne qui prit l'apparence d'un ange momentanément. Toute cette magie oppressante ne lui plaisait pas, pas plus que le Sorcier dont l'aura ténébreuse commençait à envahir les alentours.
Le désespoir, la peur, elle ne put résister à son influence comme si on la forçait à revoir les plus horribles moments de sa vie. La guerre, les exécutions, la prison... elle ne pouvait se défaire de ces pensées même en tentant de se ressaisir. Autour d'elle, les autres ne semblaient pas dans un meilleur état.
Je ne peux pas le laisser faire... pas ça...
Le vouloir est une chose, mais le pouvait-elle seulement, figée dans sa propre terreur ? Elle serrait fort le pommeau de son katana, cherchant à y puiser son courage. c'est alors qu'une vague de lumière l'envahit progressivement par derrière : Amélianne était en train de le repousser. Elle ne pouvait le vaincre à elle seule, mais l'elezenne parvint au moins à les extirper de ces ombres pour leur permettre de combattre. Le Sorcier, lui, était furieux et renforcé par le cauchemar. Il était quasiment invincible.
Je... je dois faire quelque chose...
Charger, la lame au clair, n'aurait servi à rien. Ils étaient suffisamment nombreux à l'attaquer de front et à se noyer dans les ombres. Avec Shiroyume elle avait le pouvoir de transpercer le cauchemar pour ses propres attaques, mais pas pour les autres. Elle n'y parviendrait pas seule. Les kamis semblaient avoir décidé qu'elle danserait ce soir, en fin de compte.
Elle recula d'un pas au lieu d'attaquer, et pris le temps d'inspirer profondément, de précieuses secondes.
Cela n'avait rien à avoir avec les danses thavnairoises, rien de comparables aux techniques qu'elle avait vu. Ce kata, elle l'avait déjà pratiqué contre le kami noir, contre l'araignée, elle l'avait même enseigné à Byakuya et Isarmaux bien avant d'entendre parler des danseurs. Elle l'avait toujours négligé, laissé de côté. Elle n'était en rien une miko, elle n'était que Kikyo Kurusu la dernière héritière de la lignée Tenshi qui avait choisi il y a bien longtemps la voie du bushi. Elle avait décidé de sa voie, de ne pas revendiquer son héritage, de ne pas devenir une miko comme sa mère. Mais ce soir, c'est de la Fille des Songes dont son clan avait besoin pour remporter cette bataille.
Son pendentif en diamant commença à se dissoudre, et les particules scintillantes se dispersèrent en un nuage clair qui vint harceler le sorcier tel une nuée de moucherons harceleurs. Elle voulait le gêner, l'affaiblir assez pour que ses alliés puissent l'atteindre plus facilement.
Le Sorcier s'en rendit compte le premier d'ailleurs, et tenta de les faire disparaitre elle et Amélianne. Le feu ethéré lui brûla la peau, lui arrachant un cri de douleur. Elle le fixa, fixa les ombres qui l'entouraient. Elle ne mourrait pas ce soir.
Les deux mains dans l'eau, elle se redressa péniblement, ouvrant les bras, sa voix résonna dans les gorges.
"Face au Cauchemar, les étoiles brillent plus fort. J'en appelle à la gardienne du Sanctuaire. OKAMI-SUTA !"
Les fines particules de diamant brillèrent plus encore tandis que dans le ciel, la constellation de la louve blanche en faisait de même, ressortant des myriades d'étoiles qui peuplent les cieux.
Je ne suis pas une prêtresse, mais je peux utiliser tous les outils à ma disposition pour te détruire. Je ne t'en prendras jamais plus aux enfants domiens.
Elle sentait le sorcier s'affaiblir, moins vite que si elle avait été une véritable miko, mais elle parvenait à le toucher. Les particules de diamant se collèrent à sa peau ainsi qu'aux armes de ses compagnons qui parvinrent à passer le nuage de ténèbres sans faillir. Le seigneur du Lotus et son ombre dans un duo parfaitement synchronisé lui portaient de lourds dégâts, Gualeb forçait comme un auroch jusqu'à percer ses défenses, Misaki voltigeait dans tous les sens sans perdre son énergie. Ils allaient y arriver. Elle ne pensa pas un instant à son rôle, à ce qu'une lame devait faire, à ce qu'elle devrait être avec eux en première ligne en ce moment et non derrière. Elle ne pensait qu'à une chose : tenir avant que toute son énergie ne soit brûlée par le rituel.
Et le sorcier tomba avant qu'elle ne tombe. Mort, il disparut et avec lui tout son Cercle s’effondra. Akira porta sa main à son oreille pendant que Murasaki et Misaki ramassaient une Amélianne inconsciente. Elle-même faisait tout pour ne pas s'écrouler.
"Les morts sont tombés. La bataille de Gansui a été gagnée et nos pertes sont limitées. C'est en ce qui me concerne, une victoire totale."
Elle écouta à peine les échanges qui suivirent, elle était même incapable de féliciter Gualeb qui avait pourtant démontré ce soir de sa capacité à obéir aux ordres et suivre un plan, pour une fois.
Ils repartirent, elle se fit rapidement distancer. Elle n'en pouvait plus. Mais elle en profita pour prévenir l'Ordre qu'elle allait bien. Personne ne lui posa de question sur le chemin du retour au moins, et même à son arrivée, aucun n'aborda le sujet des chakrams et de son katana qu'elle n'avait pas dégainé une seule fois durant la bataille. Elle était visiblement la seule personne tourmentée par cela.
Accueillie à Kutsuki cette nuit-là, elle ne prononça pas un mot jusqu'à sa chambre et s'y enferma sans donner d'explication. Elle ne chercha même pas à paraitre aux côtés de son époux et disparut simplement.
Je ne suis pas une prêtresse, mais je peux utiliser tous les outils à ma disposition pour te détruire. Je ne t'en prendras jamais plus aux enfants domiens.
Elle sentait le sorcier s'affaiblir, moins vite que si elle avait été une véritable miko, mais elle parvenait à le toucher. Les particules de diamant se collèrent à sa peau ainsi qu'aux armes de ses compagnons qui parvinrent à passer le nuage de ténèbres sans faillir. Le seigneur du Lotus et son ombre dans un duo parfaitement synchronisé lui portaient de lourds dégâts, Gualeb forçait comme un auroch jusqu'à percer ses défenses, Misaki voltigeait dans tous les sens sans perdre son énergie. Ils allaient y arriver. Elle ne pensa pas un instant à son rôle, à ce qu'une lame devait faire, à ce qu'elle devrait être avec eux en première ligne en ce moment et non derrière. Elle ne pensait qu'à une chose : tenir avant que toute son énergie ne soit brûlée par le rituel.
Et le sorcier tomba avant qu'elle ne tombe. Mort, il disparut et avec lui tout son Cercle s’effondra. Akira porta sa main à son oreille pendant que Murasaki et Misaki ramassaient une Amélianne inconsciente. Elle-même faisait tout pour ne pas s'écrouler.
"Les morts sont tombés. La bataille de Gansui a été gagnée et nos pertes sont limitées. C'est en ce qui me concerne, une victoire totale."
Elle écouta à peine les échanges qui suivirent, elle était même incapable de féliciter Gualeb qui avait pourtant démontré ce soir de sa capacité à obéir aux ordres et suivre un plan, pour une fois.
Ils repartirent, elle se fit rapidement distancer. Elle n'en pouvait plus. Mais elle en profita pour prévenir l'Ordre qu'elle allait bien. Personne ne lui posa de question sur le chemin du retour au moins, et même à son arrivée, aucun n'aborda le sujet des chakrams et de son katana qu'elle n'avait pas dégainé une seule fois durant la bataille. Elle était visiblement la seule personne tourmentée par cela.
Accueillie à Kutsuki cette nuit-là, elle ne prononça pas un mot jusqu'à sa chambre et s'y enferma sans donner d'explication. Elle ne chercha même pas à paraitre aux côtés de son époux et disparut simplement.
... Qu'ai-je fait ?
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
Les hommes tiraient sur les cordes avec la force du dernier effort, soulevant le mur de la toute première maison habitable dans ce champ de ruines. Combien de temps s'était écoulé depuis la mort du dernier prêtre Tenshi ? Sur les restes d'un temple solitaire naitrait bientôt un village. De sa tente, Kikyo observait d'un oeil distrait ces mineurs qui, pour une fois, travaillaient à la lumière du jour. Jour qui déclinait.
Le Tigre du Lotus Blanc avait accédé à leur demande. Puisque le trajet entre le pied et le sommet de la montagne était long, qu'ils fondent un village aux portes de la mine de diamants. Ainsi, Kikyo leur avait accordé une lune d'arrêt de la production afin qu'ils s'installent efficacement et puissent se préparer à l'hiver plutôt rude en montagne. Elle s'était assurée que la règle première, celle de ne pas emprunter la route du sanctuaire dans la forêt, soit comprise et respectée par tous dans chaque famille. Il n'y avait encore que des hommes ici mais très vite leurs familles chemineraient vers le sommet.
Dans un dernier cri d'effort, les quatre murs tant espérés se dressèrent face aux mineurs satisfaits. L'un deux apporta une bouteille de saké, assurant que demain ils en monteraient deux de plus. A ces murs il manquait pourtant un toit, que d'entrain pour ces domiens épuisés. Kikyo ferma les yeux.
"C'est mieux ainsi."
Elle referma sa tente, le thé était prêt.
Depuis sa première venue ici, elle n'avait pas une seule fois imaginé le voir habité. Ce n'étaient que des ruines, un vieux temple dont elle avait hérité et qu'elle n'occuperait jamais. Seule la mine de diamants avait un intérêt économique pour le clan et pour le pays. Quand ils avaient demandé à s'installer ici, elle n'avait pas refusé, mais se demandait pourquoi elle n'avait jamais songé à cette éventualité elle-même. Ce temple avait-il de la valeur à ses yeux ? Un lieu sacré certes, mais vide, peut-il justifier qu'on le laisse en l'état sans chercher à y toucher ?
"Kurusu-tsubone ?"
La voix rugueuse d'un mineur s'éleva derrière la toile, elle se tourna pour n'apercevoir que son ombre tenant encore le maillet à la main.
"Qu'y a t-il ? demanda t-elle en posant sa tasse encore fumante.
- C'est à propos de l'entrée principale du temple. Les gars voudraient la remettre en état. Avec les nouvelles galeries d'accès par dessous on pourrait retaper le bâtiment qui a appartenu à votre famille.
- ... Que les choses soient claires, le Lotus Blanc ne prendra pas la tête du village n'attendez pas qu'un prêtre Tenshi ou un membre du clan vienne vivre ici. Vous devrez choisir vous-même qui parlera en votre nom.
- Oui madame. Mais ça reste votre temple, et on voudrait vous faire plaisir..."
Elle souffla, se leva, et alla ouvrir sa tente. Son regard de glace se posa d'abord sur le hyurois avant de s'élever vers le portique du temple aux pierres blanches. La première chose qu'ils avaient fait en arrivant ici, bien avant de demander à s'y installer, avait été de le nettoyer intégralement et d'organiser un roulement afin que chaque mineur contribue à entretenir cette vieille ruine. Les domiens, pieux, croyaient encore qu'un kami vivait là. Elle ne leur avait jamais dit ce qui était arrivé à Okami-sama et à Kurokami.
"Madame, insista le mineur, que voulez-vous qu'on en fasse ? Dites-le nous. On vous doit bien ça."
Kikyo demeura silencieuse un petit moment. Elle hésitait. Elle ne voulait ni palais ni demeure de seigneur, elle ne voulait pas d'un temple vide, elle ne voulait pas non plus d'une vieille ruine dont l'espace pourrait servir aux futurs villageois.
Après un temps de réflexion durant lequel plusieurs mineurs s'étaient approchés, elle prit une profonde inspiration et déclara :
"Remettez le portique en état ainsi que le bassin aux diamants. Détruisez les murs mais pas l'autel ni les colonnes, et conservez les pierres. L'été prochain vous paverez le tout et installerez un toit pour former un pavillon. Cela devrait suffire."
Tous hochèrent la tête, Kikyo soupira de nouveau. Malgré eux ils attendaient qu'elle donne des ordres comme si le Lotus Blanc allait se proclamer maître de ces terres, mais la terre appartient aux domiens pas aux nobles.
Avant qu'elle ne remonte sur l'aeronef ils l'invitèrent à partager leur repas. Elle ne pouvait se permettre de rentrer tard mais accepta toutefois de retarder d'une heure son voyage. Assise au milieu de ces gens, elle retrouva un temps les sensations de son enfance sans la prison autour. Ces gens simple qui ne pensaient qu'à une vie paisible. Leur principal souci n'était plus Garlemald mais comment s'acclimater à ce nouveau lieu de vie, où installer leurs cultures, "il faudrait aménager l'un des versants", oui sans doute. Ils ne vivraient jamais riches ici mais ils vivraient heureux au moins et à l'abri. Ces ruines allaient permettre à d'autres de vivre un peu mieux. Du sommet de ces ruines ils verraient leur avenir et des jours moins sombres pour leurs enfants.
Elle posa une main sur son ventre, sereine.
Le Tigre du Lotus Blanc avait accédé à leur demande. Puisque le trajet entre le pied et le sommet de la montagne était long, qu'ils fondent un village aux portes de la mine de diamants. Ainsi, Kikyo leur avait accordé une lune d'arrêt de la production afin qu'ils s'installent efficacement et puissent se préparer à l'hiver plutôt rude en montagne. Elle s'était assurée que la règle première, celle de ne pas emprunter la route du sanctuaire dans la forêt, soit comprise et respectée par tous dans chaque famille. Il n'y avait encore que des hommes ici mais très vite leurs familles chemineraient vers le sommet.
Dans un dernier cri d'effort, les quatre murs tant espérés se dressèrent face aux mineurs satisfaits. L'un deux apporta une bouteille de saké, assurant que demain ils en monteraient deux de plus. A ces murs il manquait pourtant un toit, que d'entrain pour ces domiens épuisés. Kikyo ferma les yeux.
"C'est mieux ainsi."
Elle referma sa tente, le thé était prêt.
Depuis sa première venue ici, elle n'avait pas une seule fois imaginé le voir habité. Ce n'étaient que des ruines, un vieux temple dont elle avait hérité et qu'elle n'occuperait jamais. Seule la mine de diamants avait un intérêt économique pour le clan et pour le pays. Quand ils avaient demandé à s'installer ici, elle n'avait pas refusé, mais se demandait pourquoi elle n'avait jamais songé à cette éventualité elle-même. Ce temple avait-il de la valeur à ses yeux ? Un lieu sacré certes, mais vide, peut-il justifier qu'on le laisse en l'état sans chercher à y toucher ?
"Kurusu-tsubone ?"
La voix rugueuse d'un mineur s'éleva derrière la toile, elle se tourna pour n'apercevoir que son ombre tenant encore le maillet à la main.
"Qu'y a t-il ? demanda t-elle en posant sa tasse encore fumante.
- C'est à propos de l'entrée principale du temple. Les gars voudraient la remettre en état. Avec les nouvelles galeries d'accès par dessous on pourrait retaper le bâtiment qui a appartenu à votre famille.
- ... Que les choses soient claires, le Lotus Blanc ne prendra pas la tête du village n'attendez pas qu'un prêtre Tenshi ou un membre du clan vienne vivre ici. Vous devrez choisir vous-même qui parlera en votre nom.
- Oui madame. Mais ça reste votre temple, et on voudrait vous faire plaisir..."
Elle souffla, se leva, et alla ouvrir sa tente. Son regard de glace se posa d'abord sur le hyurois avant de s'élever vers le portique du temple aux pierres blanches. La première chose qu'ils avaient fait en arrivant ici, bien avant de demander à s'y installer, avait été de le nettoyer intégralement et d'organiser un roulement afin que chaque mineur contribue à entretenir cette vieille ruine. Les domiens, pieux, croyaient encore qu'un kami vivait là. Elle ne leur avait jamais dit ce qui était arrivé à Okami-sama et à Kurokami.
"Madame, insista le mineur, que voulez-vous qu'on en fasse ? Dites-le nous. On vous doit bien ça."
Kikyo demeura silencieuse un petit moment. Elle hésitait. Elle ne voulait ni palais ni demeure de seigneur, elle ne voulait pas d'un temple vide, elle ne voulait pas non plus d'une vieille ruine dont l'espace pourrait servir aux futurs villageois.
Après un temps de réflexion durant lequel plusieurs mineurs s'étaient approchés, elle prit une profonde inspiration et déclara :
"Remettez le portique en état ainsi que le bassin aux diamants. Détruisez les murs mais pas l'autel ni les colonnes, et conservez les pierres. L'été prochain vous paverez le tout et installerez un toit pour former un pavillon. Cela devrait suffire."
Tous hochèrent la tête, Kikyo soupira de nouveau. Malgré eux ils attendaient qu'elle donne des ordres comme si le Lotus Blanc allait se proclamer maître de ces terres, mais la terre appartient aux domiens pas aux nobles.
Avant qu'elle ne remonte sur l'aeronef ils l'invitèrent à partager leur repas. Elle ne pouvait se permettre de rentrer tard mais accepta toutefois de retarder d'une heure son voyage. Assise au milieu de ces gens, elle retrouva un temps les sensations de son enfance sans la prison autour. Ces gens simple qui ne pensaient qu'à une vie paisible. Leur principal souci n'était plus Garlemald mais comment s'acclimater à ce nouveau lieu de vie, où installer leurs cultures, "il faudrait aménager l'un des versants", oui sans doute. Ils ne vivraient jamais riches ici mais ils vivraient heureux au moins et à l'abri. Ces ruines allaient permettre à d'autres de vivre un peu mieux. Du sommet de ces ruines ils verraient leur avenir et des jours moins sombres pour leurs enfants.
Elle posa une main sur son ventre, sereine.
Le seigneur de la montagne blanche, hm ?
Lerith
Il y a 12 mois et 3 jours
C'est un sentiment difficile à décrire. A la fois intriguée et frustrée par la masse d'informations et les péripéties qu'un évènement pourtant bénin avait engendré. Tout ce qu'elle avait accompli, ce qu'elle pensait avoir créé, ne serait en réalité que la continuité du travail d'un autre ? Ses rêves n'avaient pas le pouvoir de prédire l'avenir, ni même de voir le passé, elle ne faisait que voir ce que d'autres voyaient... ou voulaient qu'elle voit.
Une fois la colère passée, isolée dans son bureau, Kikyo se décida enfin à sortir. L'Escale était vide, même les archives. Quelques livres et carnets éparpillés sur la grande carte du monde lui firent comprendre qu'elle n'était pas la seule à se poser tant de questions. Zaurak et Meleth continuaient de chercher des traces de ces symboles et visiblement ils en avaient trouvé la source : Nym. L'emplacement du palais du Vagabond sur la carte était marqué par une punaise, ainsi que plusieurs autres sites en Noscea qui pouvaient renfermer quelques vestiges de la cité.
La demi-renne posa une main sur la carte, avant de s'y asseoir, songeant à la suite des évènements. Que feraient-ils après cela ?
Que ce combat ai commencé il y a plus de 1600ans n'était, en soit, pas un réel problème. Mais qu'en était-il de son évolution, des raisons de sa disparition, ou même de sa légitimité ? Selon ce qu'ils découvriraient, la foi en leur cause pouvait s’amoindrir, voir disparaitre complètement. Quoi qu'on en dise, le passé a toujours un impact sur l'avenir même si on cherche à s'en détacher. Elle devait être réaliste, et anticiper les évènements à venir, les découvertes qui seraient rapportées car il n'y avait aucun doute là dessus : ils allaient chercher.
La plus inquiète était encore Shinme, dont le nom représentait plus qu'il n'y parait dans cette histoire millénaire. Là où Ishaya achevait son périple sur les traces de sa mère, sa suivante entamait le sien, parsemé d'ombres. Owleen n'avait pas seulement parlé de quatre, mais bien de cinq familles dont une qui avait trahi et manipulé les autres, cette tour du Chaos portait le nom de Takieiri. Ironie que leur descendante se retrouve maintenant si près du Haut-Commandeur.
Sa main caressait pensivement la mappemonde, son regard en parcourant les moindres traits. Tant de questions auxquelles il faudrait répondre, et dont chacune remettrait peut-être en cause tout ce pour quoi ils se sont battu jusqu'à maintenant. Néanmoins, ces révélations avaient des allures de bouteille jetée à la mer, un appel au secours à travers le temps pour les prochains défenseurs de l’Équilibre. Elle repensait à son rêve, à toutes ces fois où elle avait vu l'emplacement de quatre objets transmis à chaque commandeur qui n'étaient ni des clés, ni des artefacts. Tout ceci n'était pas sans but.
"Ils voulaient que l'Ordre renaisse, l'éveil de mes pouvoirs a dû attirer leur attention cela ne fait aucun doute, je n'étais que le messager. Mais ces objets, ils sont forcément un indice laissé à notre attention et je n'ai pas su le voir jusqu'à ce qu'Ishaya nous rapporte ce médaillon..."
La frustration, à nouveau. Non pas qu'elle n'ai jamais été intriguée par tout ça mais ils avaient tellement eu à faire depuis le premier jour qu'elle n'y avait finalement accordé que peu d'intérêt. Peut-être était-il temps de lancer la compagnie sur une nouvelle affaire interne.
Pour l'heure, c'était la fin du chapitre sur les mystères d'Owleen Myrtel, apprentie gardienne, qui avait fait de son mieux pour remplir la mission de son mentor tombé à Carteneau. Ishaya avait retrouvé tous les souvenirs de sa mère et Kikyo savait combien cela pouvait être important.
"Madame, il est tard et votre mari vient d'envoyer un messager, il veut savoir pourquoi vous n'êtes pas encore rentrée."
Elle soupira, quittant les archives.
"Merci Sunori, ne range pas ce qui se trouve ici je pense que Meleth et Zaurak ne tarderont pas à revenir travailler dessus.
- Bien madame."
Son manteau sur les épaules, Kikyo quitta l'Escale. Akira devenait de plus en plus autoritaire ces temps-ci ; elle ne pouvait pas lui en tenir rigueur. Cette histoire pesait sur son travail quotidien, à tel point qu'elle laissait Shinme s'occuper de tout, même de ses repas. Toutes ses pensées étaient maintenant tournées vers cette bouteille à la mer, toutes ses pensées ou presque...
"Où étiez-vous ? Demanda le Tigre, sévère.
- Je réfléchissais, je n'ai pas vu le temps passer."
Il n'ajouta rien et se contenta de monter les escaliers, elle le suivit docilement. Cela faisait plusieurs jours qu'elle n'avait pas repris l'entrainement, il faudrait remédier à cela...
Une fois la colère passée, isolée dans son bureau, Kikyo se décida enfin à sortir. L'Escale était vide, même les archives. Quelques livres et carnets éparpillés sur la grande carte du monde lui firent comprendre qu'elle n'était pas la seule à se poser tant de questions. Zaurak et Meleth continuaient de chercher des traces de ces symboles et visiblement ils en avaient trouvé la source : Nym. L'emplacement du palais du Vagabond sur la carte était marqué par une punaise, ainsi que plusieurs autres sites en Noscea qui pouvaient renfermer quelques vestiges de la cité.
La demi-renne posa une main sur la carte, avant de s'y asseoir, songeant à la suite des évènements. Que feraient-ils après cela ?
Que ce combat ai commencé il y a plus de 1600ans n'était, en soit, pas un réel problème. Mais qu'en était-il de son évolution, des raisons de sa disparition, ou même de sa légitimité ? Selon ce qu'ils découvriraient, la foi en leur cause pouvait s’amoindrir, voir disparaitre complètement. Quoi qu'on en dise, le passé a toujours un impact sur l'avenir même si on cherche à s'en détacher. Elle devait être réaliste, et anticiper les évènements à venir, les découvertes qui seraient rapportées car il n'y avait aucun doute là dessus : ils allaient chercher.
La plus inquiète était encore Shinme, dont le nom représentait plus qu'il n'y parait dans cette histoire millénaire. Là où Ishaya achevait son périple sur les traces de sa mère, sa suivante entamait le sien, parsemé d'ombres. Owleen n'avait pas seulement parlé de quatre, mais bien de cinq familles dont une qui avait trahi et manipulé les autres, cette tour du Chaos portait le nom de Takieiri. Ironie que leur descendante se retrouve maintenant si près du Haut-Commandeur.
Sa main caressait pensivement la mappemonde, son regard en parcourant les moindres traits. Tant de questions auxquelles il faudrait répondre, et dont chacune remettrait peut-être en cause tout ce pour quoi ils se sont battu jusqu'à maintenant. Néanmoins, ces révélations avaient des allures de bouteille jetée à la mer, un appel au secours à travers le temps pour les prochains défenseurs de l’Équilibre. Elle repensait à son rêve, à toutes ces fois où elle avait vu l'emplacement de quatre objets transmis à chaque commandeur qui n'étaient ni des clés, ni des artefacts. Tout ceci n'était pas sans but.
"Ils voulaient que l'Ordre renaisse, l'éveil de mes pouvoirs a dû attirer leur attention cela ne fait aucun doute, je n'étais que le messager. Mais ces objets, ils sont forcément un indice laissé à notre attention et je n'ai pas su le voir jusqu'à ce qu'Ishaya nous rapporte ce médaillon..."
La frustration, à nouveau. Non pas qu'elle n'ai jamais été intriguée par tout ça mais ils avaient tellement eu à faire depuis le premier jour qu'elle n'y avait finalement accordé que peu d'intérêt. Peut-être était-il temps de lancer la compagnie sur une nouvelle affaire interne.
Pour l'heure, c'était la fin du chapitre sur les mystères d'Owleen Myrtel, apprentie gardienne, qui avait fait de son mieux pour remplir la mission de son mentor tombé à Carteneau. Ishaya avait retrouvé tous les souvenirs de sa mère et Kikyo savait combien cela pouvait être important.
"Madame, il est tard et votre mari vient d'envoyer un messager, il veut savoir pourquoi vous n'êtes pas encore rentrée."
Elle soupira, quittant les archives.
"Merci Sunori, ne range pas ce qui se trouve ici je pense que Meleth et Zaurak ne tarderont pas à revenir travailler dessus.
- Bien madame."
Son manteau sur les épaules, Kikyo quitta l'Escale. Akira devenait de plus en plus autoritaire ces temps-ci ; elle ne pouvait pas lui en tenir rigueur. Cette histoire pesait sur son travail quotidien, à tel point qu'elle laissait Shinme s'occuper de tout, même de ses repas. Toutes ses pensées étaient maintenant tournées vers cette bouteille à la mer, toutes ses pensées ou presque...
"Où étiez-vous ? Demanda le Tigre, sévère.
- Je réfléchissais, je n'ai pas vu le temps passer."
Il n'ajouta rien et se contenta de monter les escaliers, elle le suivit docilement. Cela faisait plusieurs jours qu'elle n'avait pas repris l'entrainement, il faudrait remédier à cela...
...Tant qu'elle le pouvait encore.
Ce sujet est verrouillé, vous ne pouvez pas y répondre.