Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines

On lui avait parlé de cette nation aussi froide que fière, elle qui n'avait jamais vu la neige de sa vie endurait le froid d'un hiver éternel. Chose étrange, elle avait beau sentir l'eau ici omniprésente, c'était comme si elle était en sommeil. Cette inertie soudaine l’assommait un peu ; heureusement la rivière chantait non loin, une ballade glacée mais vivante.
"Bonjour mademoiselle, l'interpella un templier sur le grand pont qui séparait la cité des Portes du Jugement. Il est bien tôt pour sortir par un froid pareil.
- Je suis du genre matinale, lui répondit Meleth, un sourire discret au coin des lèvres.
- Soyez tout de même prudente, c'est dangereux de ce côté."
De ce côté, il parlait de Manteneige évidemment. Elle lui avait dit hier déjà où elle se rendait pour s'entraîner, parait-il qu'en ces lieux il y avait autrefois un groupe d'hérétiques dont leur chef était une femme au cœur plus froid que la glace. C'est précisément pour cela qu'elle s'y était rendue, pour ressentir toutes les émotions rassemblées en un tel lieu. Pourquoi ? parce qu'elle devait apprendre à ouvrir son cœur, ainsi avait parlé Moïra.


Les pieds enfoncés dans la neige, elle dansait, ses chakrams volaient dans les airs sans craindre de toucher le moindre passant malchanceux. La neige volait autour d'elle, soulevée par les courants d'air et par sa chorégraphie et pourtant Meleth se sentait plus lente, plus lourde ; tant d'eau et pourtant si peu de vie. Enfin... de la vie il y en a, là-dessous, en sommeil.
"J'ai l'impression de m'endormir..."
Le froid sans doute, ou alors c'était parce qu'elle tentait de ne faire qu'un avec le torrent immobile qu'elle avait l'impression de geler de l'intérieur. C'est bien cela, plus elle dansait, plus elle s'imprégnait de lui, plus elle se refroidissait au point que cela lui faisait mal à la poitrine. Elle avait pourtant, l'espace d'un instant, ressentit le flot de ce torrent lorsqu'il venait se jeter dans le lit de la rivière il y a bien longtemps, quand le Coerthas était encore une contrée verdoyante... Il s'était endormi, figé hors du temps, exactement comme sa mémoire.


Ne cherches pas à contrôler le torrent, laisse-le venir à toi.



Mais si j'échoue ici je vais mourir gelée.
Elle avait failli arrêter, mais ce n'était pas la solution. Elle n'avait que peu de temps pour apprendre sinon le torrent noir l'emporterait. Ce voyage serait peut-être sa seule chance, et il commençait par la glace d'un hiver éternel.
Elle continua inlassablement, malgré la douleur grandissante, se répétant intérieurement les paroles de Moïra : "donne, ne t'offre pas", "ouvres ton cœur", "laisse le torrent venir à toi" ; cette douleur ne ferait que passer. Elle avait peur pourtant, qui n'aurait pas peur de se faire percer l'un épieu de gel ? Elle le sentait, le froid mordant qui lui déchirait la chair.
"Laisse-le passer, laisse le te traverser..."
Et si c'était une erreur ?

Un craquement retentit sous ses pieds, une petite fraction du glacier venait de se fendre, elle pouvait sentir l'eau qui s'en échappait. C'est cela, la glace couvre en surface, parfois profonde, mais à certains endroits elle n'a pas gelé jusqu'au cœur de la rivière. Attiré par le phénomène, un croco baryton remarqua la viéra imprudente qui dansait les yeux fermés et se précipita vers elle. Dans une pirouette elle souleva la neige autour d'elle, l'eau qui s'écoulait du glacier suivit le mouvement de ses bras et remonta brusquement avant de toucher le sol.
Le templier, soucieux de ne pas voir l'aventurière aux longues oreilles réapparaitre et qui s'était rendu sur place, n'entendit que le sifflement métallique des chakrams avant que l'animal blessé ne tombe à ses pieds. Il sortit son arme par réflexe, mais voyant la bête prendre la fuite il leva les yeux sur les hauteurs. Meleth avait cessé de danser. On ne peut contrôler la nature, et après qu'elle ai emprunté sa force, l'eau était retourné à l'état solide, formant une sculpture naturelle autour de sa silhouette.
On entendit une corneille au-dessus d'elle, traversant le ciel.

"Merci"

Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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Depuis les monts brisés de l'écume des cieux de Dravania, les deux soeurs de lune s'étaient finalement établies à la Penne, à l'ombre des arbres et de la rocaille. C'est en remontant la rivière jusqu'à sa source au nord de la région que Meleth avait finalement trouvé ce qu'elle cherchait. Ici, aux chutes des Cent Râles, des dizaines de torrents dévalaient la montagne à vive allure, balayant au sommet les ruines d'un ancien bastion dravanien devenu un véritable temple des eaux. Ici elles avaient dansé, dans la brume qui cachait la lumière de la lune ; ici elles avaient communié avec la source d'une antique rivière.
Cela n'avait rien donné le premier soir, et malgré tous ses efforts et la présence des deux êtres les plus chers à son cœur, Meleth avait échoué dans sa tentative de ne faire plus qu'un avec le torrent. "On ne peut réussir du premier coup à chaque fois" c'est ce qu'elle se disait pour se consoler, mais après son premier essai sur le glacier de Mantenneige elle avait eu l'impudence de croire que l'eau d'un torrent serait plus simple.
"Quelque chose me retient encore..."

Le second soir, c'est seule qu'elle s'était rendue à l'Eurée Feste, pieds nus dans l'eau. Le brouillard s'était levé, elle n'avait pas voulu emmener Lune, Haya ou Valorius avec elle. Non pas qu'elle les évitait, mais elle devait prendre un moment pour elle et faire le vide.
Seule, elle dansait d'un rocher à un autre, passant sous les chutes comme un poisson volant. L'absence de Lune pesait sur sa force intérieure mais elle devait s'accomplir individuellement sans se reposer sur les autres. Bondissante comme l'eau joyeuse, elle envoyait autour d'elle de fines gouttelettes étincelantes semblables à ce flot d'étoiles dans le ciel. Enfin, elle apparut, la lune presque pleine. c'était pour bientôt, un jour, deux peut-être ?

Et le brouillard qui retombe encore... à peine levée, la lune se voile.

"Ne te laisse pas abattre, Meleth."
Ses jambes se tendirent, la viéra s'allongea les bras levés vers les hauteurs du torrent, sur la pointe des pieds. Elle sentait ses muscles se tendre, sa peau trempée de sueur et d'eau de source, elle ne ressentait pourtant aucune fatigue. Poussée par un élan inconnu, un souffle surnaturel, elle se mit à tourner sur elle-même. Pirouette après pirouette, semblable à l'une de ces ballerines eorzéennes, elle sentit l'eau tourbillonner à ses pieds et monter doucement. Elle la sentait, cette force qui ne demandait qu'à la traverser.
Fille du Torrent, danseuse de la rivière, retournes à la source, celle qui ne t'a jamais quitté.
L'eau jaillissait de partout, répondant à ses mouvements devenu soudain plus secs, du lever de jambe aux poing qui se ferme avant de lancer son bras à contre-courant pour le fendre en deux. Le torrent répond, le torrent lui parle. L'eau source de toute vie, l'eau mémoire de la nature, l'eau ruisselle inarrêtable et indomptable.

Elle la ressentait encore, cette présence masculine au cœur du torrent. Etait-ce son imagination ? Un esprit ? Cherchait-elle à personnifier le torrent lui-même ou bien encore une intrusion de cette entité qui l'avait touchée lors de sa première danse à la Fontaine d'Urth ?
Le brouillard s'épaississait. Elle ne voyait à présent plus que l'eau à proximité, même les murs effondrés de l'Eurée Feste disparaissaient dans le nuage blanc opaque. Meleth y envoya plusieurs traits aqueux sans succès, l'eau passait à travers. Aucune forme ne se trahissait, pas de silhouette cette fois, pas d'intrus. Les remous s'apaisèrent, Meleth stoppa sa danse, n'écoutant que le silence. Elle n'entendait plus les cascades.

Ploc... ploc...

Des gouttes qui tombent. Le vide, le froid, la couleur rouge, rouge comme le sang.

Ploc... ploc... ploc....

Une tristesse profonde, libératrice mais douloureuse. Pas de mort, pas de vie non plus.

... Ploc...

Un souffle sur sa nuque la fit tressaillir, une voix grave, masculine. Elle voulait se tourner pour lui faire face mais demeura figée comme..; gelée, hors du temps.
"Ne restes pas ici, pas ce soir."
Le temps de cligner des yeux, le brouillard avait disparu. Un sentiment de peur l'envahit alors que son regard azur se posait sur l'horizon de plus en plus clair. L'aube, déjà ? Elle avait vu la lune se lever il y a un instant à peine ! Sortie de sa transe, Meleth sauta dans l'eau et traversa les ruines dans une course folle, sans prendre la peine de remettre ses chaussures. Elle glissa sur le torrent comme si elle avait eu le Dévoreur à ses trousses. Dans son esprit, un seul nom, au bord des lèvres, ne demandant qu'à sortir en un cri.
"LUNE !!!"
Arrivée à la Penne, elle retrouva leur campement, vide. Valorius avait repris l'ethérite, mais les affaires de Lune n'étaient plus là, celles de Haya non plus. Sa sœur de lune ne l'aurait pas abandonné ici à moins qu'une chose grave ne se soit produite. Haletante, Meleth peinait à reprendre son souffle.


"Que s'est-il passé ici ?"
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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Elle se sentait prête, malgré le danger qui guette au fond de l'eau, elle sentait que l'heure était venue. C'est en revenant sur ses pas au plus profond de la forêt, là où son voyage vers le Nord avait pris tout son sens, qu'elle trouva le bassin à l'eau stagnante. Haut dans le ciel, la pleine lune s'était levée en ce huitième soir de la deuxième lune ombrale. perchée sur un rocher, non loin, une corneille aux trois yeux flamboyants l'attendait. Sa son approche, elle se métamorphosa en une silhouette féminine aux formes elezennes bien que la viéra ne put l'affirmer.
"Tu es prête, ma soeur ?"
Meleth acquiesça. La silhouette se pencha alors au-dessus du bassin, touchant du bout des doigts le reflet de la pleine lune ; celle-ci devint alors noire le parfait contraste de celle présente dans le ciel. Elle reprit :
"Plonge et souviens toi, ne lutte pas contre le courant, danse avec lui, joue avec lui. Je ne peux pas t'accompagner, je dois honorer la parole de ma mère."

Meleth s'avança dans l'eau, sure d'elle mais non dénuée d’appréhension. Ce soir, elle allait enfin comprendre, apprendre ce que sa mère n'avait pu lui enseigner. Ironie, que ce soit à l'autre bout d'une monde qu'elle réalise enfin ce qui s'était toujours trouvé sous son nez. Elle glissa lentement sur le dos, fixant le ciel une dernière fois avant de fermer les yeux et de se laisser couler.
Entrainée dans une chute interminable, très vite, elle commença à manquer d'air ; c'était la première fois depuis longtemps, elle qui avait toujours connu cette bénédiction des eaux. Cette eau n'était pas ordinaire, elle était épaisse, sombre comme, presque collante et plus elle coulait, plus la pression se faisait sentir. Meleth garda les yeux fermés, concentrée sur le courant. Elle se laissait aller, sans lutter, elle ne devait faire qu'un avec l'eau et bannir la peur qui la pousserait à lutter.
Je suis une partie de lui, il est une partie de moi...
Son second souffle lui vint avec brutalité, elle ouvrit les yeux dans le noir complet tandis que son corps continuait de sombrer doucement dans les eaux troubles ; elle ne le sentait plus d'ailleurs. Elle voyait autour d'elle voguer nombre de particules et d'images de personnes qu'elles connaissaient, d'autres lui étaient inconnues.
Où suis-je ?
Elle pris une profonde inspiration, tentant de rester focalisée son environnement.
Alors que les images glissaient sur elle, elle en toucha trois. Chacune lui offrant une vision différente de l'avenir. ses yeux s'écarquillèrent un peu plus, la laissant sans voix. La peur commença à monter, comme une boule d'angoisse au creux de son ventre, de plus en plus imposante.
Elle commençait à avoir froid, perdue dans cet abîme glacé. C'est alors qu'une voix masculine remonta des profondeurs.
"L'avenir n'est jamais tendre quand on le regarde de loin."

Meleth sursauta. Elle se sentit soudain cernée. Quelque chose bougeait autour d'elle, une seule entité occupait tout l'espace. Il lui sembla entrevoir plusieurs formes immense serpenter à proximité, quelques grondement sourds comme une masse qui se déplace, provoquant un courant très fort. Elle avait beau ne pas le voir, il était... gigantesque.
"Tu es venu réclamer mon pouvoir, jeune Esthariot. Qu'offre tu en échanges ? Mesure ta réponse, ou tu me serviras de repas."
Ainsi, l'avertissement était clair.
"Vous êtes... le Torrent Noir ?
- Je suis ce que je suis, j'ai bien des noms... Bien des formes... tout dépend de qui vient me voir"
A nouveau elle le sentit bouger, la pression sur sa gauche la repoussa légèrement. S'il lui venait l'envie de l'écraser comme une brindille elle n'aurait même pas le temps de voir venir le coup.
"Toutes les filles du torrent vous ont offert quelque chose de différent ?
- Toutes sans exceptions m'ont offert une chose différente , ta mère, ta grand mère, et les vingt-quatre autres avant elles."

Le silence revint, bien que Meleth sentait toujours la présence oppressante de l'entité. L'attente faisait grandir la peur, elle ne devait pas attendre, elle devait décider ici et maintenant de ce qu'elle offrirait, mais qu'avait-elle à offrir ? Elle n'était rien, juste une apatride, une exilée de Golmorre.

"Les Filles du Torrent ont été massacrées. Je n'ai plus de foyer, plus de sœurs, je n'ai même plus qu'un fragment de mes propres souvenirs. A offrir je n'ai qu'un corps, un cœur et une âme au travers de ma danse."

Ces mots prononcés, elle se mit à danser avec l'eau. Flottant dans les courant elle usa de ces courants qui la ballottaient de droite à gauche comme d'un appui faute d'avoir un sol sous ses pieds. Elle ne cherchait plus à lutter pour se stabiliser, l'eau noire devait être une partie d'elle.
Son ombre s'agrandit, ce n'était pas Una cette fois mais ses peurs, ses doutes, sa frustration, tous ses ressentiments refoulés, ses souvenirs oubliés qui prenaient corps dans le Torrent Noir. Dès qu'il fut sortit, Meleth ressentit une nouvelle force, un désir de vivre et de rentrer chez elle à Golmorre. Elle ressentit l'espoir, le besoin de fouler à nouveau les terres de sa naissance et d'un refonder un jour la tribu des Filles du Torrent, mais avec de nouveaux principes. Trouver les moyens, les forces pour y aller, participer au départ de l'empire et retrouver les racines de son peuple.. c'était là un espoir de fou, mais réel.
D'abord à l'unisson avec elle, l'ombre se plaça en opposition pour l'affronter. Meleth se cessa aucun de ses mouvements face à son double. Les rafales devenaient de plus en plus violentes mais elle les repoussait sans chercher à l'anéantir en retour.
Ils font partie de moi, je ne les nierai pas, je les accepte.
Malgré la difficulté, elle persévéra, parant chaque coup pour sa propre survie. Elle tenait bon mais peu à peu elle arrivait au bout de ses forces physique, peinant à s'harmoniser à nouveau. Un pas après l'autre, elle finit par se rapprocher de son ombre devenant plus claire alors qu'elle-même devenait plus sombre. Les rôles étaient inversés, mais pas pour longtemps. Elle prenait les deux, le tout, et au bout d'un long moment à se tourner autour, les deux silhouettes ne firent à nouveau plus qu'une.
Épuisée, elle se retrouva immobile, flottant dans les ombres du Torrent Noir.
"J'accepte cette danse, aucune avant toi n'avait accepté cela, mais sache que tant que tu avanceras devant ton ombre et non l'inverse mon pouvoir restera en toi. Comme tu as quitté la grand forêt je ne pourrais te toucher et t'offrir ce que tu désires car tu sais désormais où doit te mener ton destin. Lorsque tu auras posé la pierre de ton foyer, sur les terres libres de tes ancêtres , nous nous reverrons à nouveau.. et tu apprendras ce qui t'es du.. dans le creux d'un arbre ancien.. se trouve l’œuf d'un des mes échos.. il te faudra l'éveiller. Comprends tu cela jeune Esthariot ?
- Je le comprends."


Une onde violente, extérieure, vint alors perturber cet instant. Quelque chose venait de se produire, ailleurs, loin d'ici, et venait de faire vaciller l'ensemble. Une première douleur naquit au niveau de son ventre, le saphir dans son nombril devint glace et se brisa avant de se fondre dans le torrent comme un glaçon dans l'eau chaude. Une seconde douleur lui arracha un cri lorsque l'anneau à son annulaire se changea en pierre avant d'éclater, lui cassant le doigt. La voix des profondeurs s'éleva une nouvelle fois.

"Ainsi c'est fait... au moins nous nous serons rencontrés avant qu'il n'y soit plus. La Gardienne de la Tour Sombre vient d'annoncer aux puissances anciennes qu'elle reniait à sa descendance le Destin des Quatre Tours, elles ne renaitront jamais... et le Sceau des Anciens s'effacera...Je ne sais ce qu'il adviendra, car lorsqu'il sera rompu, tout ce qui était ne serait plus, tout ce qui aurait pu être ne fera plus qu'Un..."
Meleth se figea, mortifiée, elle ne comprenait pas. Alors qu'elle venait tout juste de s'harmoniser, elle avait réussi, tout venait de voler en éclats. Mais l'entité reprit :
"Mais je perdurerais à travers toi. Le Rituel ne sera bientôt plus rien, peut être est ce le Destin, même nous n'en savons rien.Nous n'avons tous que la connaissance lié à la limite de nos choix"
Meleth regarda alors vers le haut, sentant l'urgence de son départ, elle regarda une dernière fois en direction de cette voix.
"Je ne renoncerai pas, je vous retrouverai, dit-elle, avec détermination. N'abandonnez pas."
La voix se fit plus lointaine.
"Je suis en toi, tu es en moi, à jamais."
Elle répéta ces mots, alors que le flot sombre l'emportait au loin.
"A Jamais..."

Rouvrant les yeux après les avoir protégé du courant, elle se retrouva dans le bassin où elle était entrée, l'eau noire quittant son corps pour retourner à la lune sombre sur la surface de l'eau. Son son regard, au bord du bassin, le cadavre d'une corneille reposait sur le sol, inerte.
"Una !"
Meleth sortit du bassin pour saisir l'oiseau qui, avant qu'elle ne puisse la prendre dans ses mains, tomba en cendres soufflées par le vent. Devant elle, le soleil se levait entre les arbres. Aucune réponse ne vint à la viéra solitaire à genoux face à la brise tiède.


Chaque nouvelle force attise la braise d'un nouveau fléau.
Ce cycle sans fin doit être rompu.
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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De tout le relais, il n'y avait plus bel endroit à ses yeux que la serre à l'arrière du bâtiment. Elle trouvait ici le calme et la sérénité dont elle avait besoin tant qu'elle serait tenue sous la protection de l’Épée, loin de Sombrelinceuil, de ses rivières et surtout de sa chaumière qui lui manquait tant, surtout son jardin. Ici, elle occupait ses journées lorsqu'elle ne sortait pas, à l'étude et l'entretient de ce que les membres de l'Ordre lui rapportaient ; seule la plupart du temps. On l'entendait fredonner depuis le couloir au-dessus du hangar, elle tachait de prendre son mal en patience.

"Tu ne t'ennuies pas trop, ça va ?
- Tout va bien L'kihi, je te remercie. Et merci pour le repas."

La miqo'te lui sourit avant de quitter la serre avec son plateau vide, laissant Meleth penchée sur ses boutures odorantes. Le parfum de ces orchidées emplissait toute la verrière, une agréable fragrance dont elle seule allait profiter durant des heures ; de quoi lui monter à la tête. Elle de décida alors à grimper à l'escabeau pour ouvrir un des carreaux, faire un peu d'air.
"Je me demande ce que peuvent bien faire les autres en ce moment..."
Le bruit des vagues l'apaisait, et elle resta là assise en hauteur, au milieu des fleurs. Comment ce moment pouvait-il être si paisible alors que le danger les menaçait tous ? Khaidai disparu, Yul attaqué, l'Ordre de l'Oeil sur leurs talons... ils devaient constamment rester sur leurs gardes et même Valorius s'était installé dans son bureau pour ne pas rester seul à la maison, au cas où. Elle ne voulait pas causer plus de souci aux membres de l'Epée mobilisés pour protéger l'ensemble, elle limitait ses sorties et constamment sous escorte. Mais hier, tout avait basculé quand elle avait entendu l'appel d'Ana sur la linkperle. Elle n'avait pas réfléchi, de toute façon Itaru et Waka étaient avec elle, elle s'était précipitée à Port-aux-Ales pour guetter leur passage près du phare. Pour une fois, l'eau de mer lui avait répondu.
"Je n'en reviens toujours pas ; était-ce parce que je ne savais pas exactement quoi faire ?"
Elle se souvenait de l'anxiété, le sentiment d'impuissance le bateau à des dizaines yalms de la côte et elle avec les deux autres coincés sur la terre ferme. Meryl et Ana poursuivies par une sorte de tempête route mêlant l'eau et le sang, et cet homme sur une barque, celui qu'ils appellent "le lieur"... Elle avait voulu tenter, imploré l'océan de lui accorder sa force au moins une fois ; et c'est là qu'elle l'avait sentit.

La viéra baissa le regard sur ses deux mains, un frisson remonta le long de son dos.
"Cette magie est sale."
Elle avait touché l'ether résiduel des sorts de cet homme à travers l'eau, elle avait sentit la putréfaction, le sang, une forme de magie souillée, corrompue, mauvaise, elle ne savait pas quoi précisément. Son regard se porta sur l'outre bien fermée posée près de son sac.
"Il faut que j'analyse ça."
Pour une fois oublier les plantes et les champignons du Diadème, elle devait se rendre utile et tirer le plus d'éléments possibles de cette eau afin d'en informer les autres. Elle s'arrêta net devant la porte. Elle ne pouvait pas aller au laboratoire de Valorius. Elle ne pouvait pas sortir seule, surtout maintenant que le Lieur l'avait vue à l’œuvre. Déjà que Meryl lui avait opposé une farouche résistante, il s'était pris de plein fouet sa danse de l'eau avec toute la puissance prêtée par l'océan lui-même. Elle espérait d'ailleurs ne plus avoir à l'utiliser tant qu'elle n'aurait pas progressé dans sa technique ; les rivières sont une chose mais la mer... la mer est beaucoup plus sauvage et changeante, elle ne contrôle absolument rien une fois la puissance libérée. C'était différent, déstabilisant.
Elle soupira doucement, et appela sur la perle : "Quelqu'un pourrait-il m'escorter jusqu'à la Lavandière pour mon étude de l'eau résiduelle ?"
La réponse de Valorius ne se fit pas attendre.
"De quoi parles-tu ?"
Elle ne prit pas de gants et lui raconta toute la courte histoire de leur folle course au secours de Meryl et Ana. Difficile de dire au travers de la linkperle comme réagissait son père et mentor : inquiétude, soulagement, approbation et désapprobation tout à la fois. La seule chose certaine et prévisible était sa réponse :
"Je viens avec toi."




Sous la bonne surveillance de Frederick, elle trouva le temps d'une pause entre ses nombreuses analyses. Bien sur, Valorius lui ne quittait pas le laboratoire, fixant l'éprouvette comme on fixe l'eau en attendant qu'elle boue, comme si cela allait accélérer le processus. Assise près du cours d'eau elle fredonnait toujours sa chanson, couverte par le chant assourdissant des chutes d'eau. Elle était pourtant si bien ici. Elle repensait à cette présence masculine dans le torrent à Dravania, dans la forêt du Nord, puis en Noscea, cette même présence à la fois distante et rassurante, elle n'était pas folle puisque Alexois, Yul et Gualeb l'avaient vue eux aussi.
"Je me demande bien qui tu es, tout ce que je sais c'est que tu ne te montres que lorsque je danses et que tu n'apprécies pas que je reste proche de la mer trop longtemps. Pourtant je suis certaine que tu ne me veux pas de mal."


"Je veux seulement qu'elle reste en sécurité."



Que...?!
Cette voix, elle ne lui était pas inconnue, mais où l'avait-elle entendue ?
Dans la jungle, avant son amnésie ? Ou après, quand on l'a retrouvée ?
Est-ce un humain, un esprit, autre chose ?
Redressée sous la surprise, elle se prit la tête dans les mains, sujette à un violent mal de crâne. Sa mémoire, encore, refusait de lui donner le nom ou le visage de cet homme. Mais l'hypothèse commença à se dessiner devant elle, dans le reflet de l'eau, et si le torrent lui montrait ses souvenirs ? Si cette présence masculine qu'elle avait sentit n'était rie de plus que la manifestation par ses pouvoirs de ce qu'elle voulait voir ?
Non, il était bien réel, aussi réel que ses souvenirs enfouis, aussi réels que le Torrent Noir qu'elle avait rencontré. Tout est possible, rien n'est certain.



"Et si c'était toi que je cherchais ?"
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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Elle les voyait depuis les hauteurs ; ils étaient là, alignés face au groupe, la poitrine gonflée d’orgueil. Parce qu'ils détenaient Meryl et Ana, ils pensaient avoir le contrôle de la situation. Kazami avait été claire : "on fonce tout droit dans un piège", elle avait vu la trahison, mais eux aussi avaient plus d'un tour dans leur manche et ce soir ce tour s'appelait Meleth. Le Voile avait fait l'erreur de choisir cet endroit pour la rencontre : l'Eurée Feste, dans l'Avant-Pays Dravanien.
"Dès que tu entendra le son de cloche, déchaine le torrent."
Elle s'était entraînée ici pendant des jours et des jours, s'il y avait un endroit en Eorzéa où elle avait pu s'harmoniser parfaitement avec le torrent, c'était ici. Et ils venaient de faire le deuxième erreur.
"Entendu, alors au son de la cloche le combat commencera. Cela vous convient-il ?
- Soit."

Meleth n'attendit pas plus et commença à danser au cœur du torrent, loin de leur portée et de leur regard, ils ne verraient rien venir. Lentement le l'eau commença à s'agiter sous ses pas tandis qu'elle se concentrait.


"J'en appelle aux forces de la nature. Père, entendez mon cri, que la rivière se déchaîne sur ces intrus qui osent souiller ce sanctuaire de leurs intentions belliqueuses !"


Un grondement se fit entendre en contrebas, et le temps de lever les yeux après avoir engagé le combat, ils n'eurent pas le temps de réagir. Le torrent noir les balaya comme de l'écume, ils furent presque tous noyés, broyés contre les murs en ruines, excepté leur chef qui se releva. Néanmoins, le combat était à présent joué d'avance, ils avaient gagné. Meleth se fondit dans le torrent prête à les rejoindre tandis que Yul et Itaru prenaient le dessus sur leur dernier adversaire.
La victoire fut de courte durée, une voix qu'elle ne connaissait pas résonna dans le vaste monument.
"ASSEZ !"
En un instant, l'Eurée Feste toute entière était couverte de glace, et Meleth se retrouva piégée à l'intérieur du torrent. Plus rien ne lui répondait, l'eau s'était endormie. Elle n'avait jamais vu cette femme mais à la réaction de ses amis, eux la connaissaient. Visiblement, Morgane avait été l'un des otages du Schisme qu'ils avaient libéré et elle les avait aidé sur plusieurs mandats ; voici donc la fameuse trahison dont parler Kazami.
"Vous nous avez menti depuis le début, vous êtes l'Invocatrice !"
La colère se lisait dans le regard et la voix de Kasami, Shinme s'était muée dans le silence, concentrée sur la partition de son violon enchanté. Ils étaient tous bloqués, les pieds coincés dans une épaisse couche de glace. Tandis que Morgane se perdait en monologue, Meleth tenta de trouver une solution avant que les autres ne soient offerts en sacrifice pour le rituel qu'ils avaient prévu de mener ici.
"Aller, réveille-toi.. réveille toi !"
Rien n'y faisait, cette glace n'était pas normale, ce pouvoir n'était pas humain, ses pouvoirs étaient insuffisants ne serait-ce que pour affaiblir la glace aux pieds d'un seul de ses compagnons. Elle se sentait tellement impuissante, témoin de leur sort. Son seul avantage était que l'ennemi ne l'avait pas vue, elle. Elle était la seule encore libre mais ne pouvait rien faire. 


"Je vous implore Père, donnez-moi la force de contrer cette sorcière. Esprits de la nature, vous ne pouvez accepter qu'elle prenne ainsi le pouvoir sur vous par ses artifices corrompus !"


Alors qu'elle était sur le point de désespérer, elle sentit un regain d'énergie au creux de son ventre. Quelque chose venait de se libérer. Son corps était loin d'être assez fort pour déchaîner tous les pouvoirs du torrent noir, mais peut-être le serait-il assez pour briser la glace.
"Que...?!"
Coupée en plein dans ses déclarations, l'Invocatrice vit sa glace faiblir, l'eau en dessous tourbillonnait furieusement. Pendant un bref instant, les autres purent se libérer et tenter d'attaquer. Elle ne voyait pas tout ce qui se passait mais cet éphémère pouvoir ne lui permit pas de contenir la vague de glace qui suivit. Cette fois elle ne pouvait plus rien, et le rituel allait avoir lieu. A la surface elle les entendait crier et se débattre comme des lions pour l'en empêcher. Meleth, désespérée, se mit à cogner contre la glace en hurlant ; personne ne pouvait l'entendre. Si seulement cette glace pouvait céder ne serait-ce qu'un peu pour que l'eau noir jaillisse, mais elle était là, coincée en-dessous. A quoi bon être une Fille du Torrent si l'eau gelée ne répond plus à ses appels ? Elle maudit sa faiblesse, et ses amis étaient en danger.
"Je les entends..." Sanglota t-elle, ses larmes aussitôt emportées par les flots.

Et soudain, la glace céda. Qu'avaient-ils fait ? L'Invocatrice sonna la retraite, ils avaient réussi à la mettre en déroute. Les mages de l'Oeil et son escorte prirent la fuite, emportant avec eux Meryl et Ana. Le Lieur, lui, plongea ses mains dans l'eau, sans doute pour lancer un autre de ses sortilèges de sang.
"Oh non certainement pas !"
L'eau noire jaillit des flots et tenta d'emporter ce monstre dans les abysses. Meleth dansait avec le torrent, la rage au cœur. Ils ne purent pas empêcher leurs deux amies prisonnières d'être emmenées une fois de plus mais un tir puissant venu des hauteurs explosa le crâne du Lieur qui tentait de se libérer de l'eau noire, il mourut ainsi les bras dans l'eau. Meleth en sortit quelques instants plus tard, le corps engourdi par sa trop longue harmonisation. Elle ne suivit pas l'échange entre Itaru et les trois inconnus qui leur étaient venus en aide, elle laissa Shinme l'aider à se traîner jusqu'au bord où Ivanhault, Yul et Kazami gisaient en piteux état.
Ce soir, ils avaient déjoués les plans de l'Oeil, mais ils n'avaient pas pu récupérer leurs amies, et le prix à payer était douloureux. 




Elle avait prévenu Valorius par perle qu'elle rentrait directement à la chaumière depuis l'hopital, elle ne se sentait pas la force de rentrer à Brumée. Quand elle ouvrit la porte il n'était pas encore arrivé mais elle savait qu'il ne lui faudrait pas une demi-heure avant d'être là. Tout était silencieux dans la maison, et comme un appel, sa bibliothèque était là, devant la porte sur le mur d'en face. Elle avait bien retenu l'une des phrases de Morgane juste avant que la glace ne se brise la première fois : "Rien ne serait possible dans ces plantes yanxiennes".
Elle grimpa sur l'escabeau, en quête d'un ouvrage bien précis.
"Ah, voilà. Combinaisons plantes et magie, chapitre dix : invocations. Yanxia, Yanxia,... J'ai trouvé ! Bien, voyons quelles plantes sont associables à une convocation de flagelleur..."

Quand Valorius entra dans la chaumière moins d'une heure plus tard, il trouva Meleth profondément endormie sur le canapé du salon. La fatigue avait finalement eu raison de sa volonté et de sa colère. Sur ses genoux le livre était encore ouvert, et sur la table du salon de petits éclats de glace et d'eau scintillaient à la lumière des étoiles.


La prochaine fois, elle serait plus forte.
La prochaine fois, la glace cèdera.
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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Le soleil se couchait sur la mer noscéenne lorsqu'ils se rassemblèrent sur le navire qui partait pour le large, Kikuchi tenait dans ses mains l'urne funéraire des deux dernières victimes de cette guerre contre l'Oeil. Trop de morts, trop de funérailles ces derniers temps, plus que certains ne pouvaient en supporter. Meleth se tenait près de Valorius, en silence, la mort faisait partie de la vie et ils avaient tous accepté les risques lorsqu'ils s'étaient attaqué à pareil adversaire ; ce ne serait pas le dernier.
Tandis que, un à un, les membres de l'Ordre s'approchaient afin de prononcer quelques mots à la mémoire de Meryl et Ana, Meleth sentait la brise marine soulever les pointes de ses cheveux au-dessus de sa nuque. Ils avaient tous remarqué. Certains cherchaient déjà à en comprendre le sens.

La cérémonie s'acheva, et sans perdre de temps ils se réunirent dans la salle commune pour parler de leur dernier combat en tant que Quatre Tours. Trop de morts, trop de funérailles, mais ce combat était le leur, ce pourquoi ils avaient été rassemblés dès le départ. Elle n'était pas femme à croire au destin tracé surtout après l'épisode de la Trame, mais elle ne croyait pas non plus aux coïncidences et au hasard. Il y avait une raison à ce qu'ils soient tous ici, maintenant, appelés par un sortilège vieux de 1600ans et attendus par des âmes figées dans le temps.

"Dis, Valorius... Penses-tu que l'on puisse changer le passé ?
- Hm ?
- Hm... rien oublie. Bonne nuit."

Elle se contenta de lui sourire, laissant ses chaussures au bas de l'escalier avant de monter dans sa chambre. Elle préférait ne pas être là pour le voir repartir au cas où il découcherait à nouveau. Oh, elle était heureuse pour lui, à n'en pas douter, et ne voulait pas lui montrer son malaise dont il aurait été capable de culpabiliser. Une fois la porte refermée, ses pieds la conduirent d'instinct sur le lit.
Un an, presque un an qu'elle était ici avec eux, elle voyait sa vie d'avant s'éteindre, au crépuscule de ces douze lunes passées loin de Golmorre, loin de chez elle. C'était ici chez elle, à présent. Ce silence dans ses oreilles était devenu son quotidien, mais quand elle voyait autour d'elle tous ses amis et compagnons d'aventures s'unir et se lier, cela la ramenait à sa propre solitude, celle qui ne serait jamais brisée.
"Tu avais tort Corwin..." Souffla t-elle contre son oreiller.
Cette fracture, comme une fissure dans son coeur, grandissait de jour en jour et la rendait plus distante, comme un mur qui se construit entre elle et le monde. Elle avait remarqué cela chez certaines de ses congénères exilées, bien que la plupart manifestent des signes contraires en devenant presque plus humaines que les humains. Sans la jungle, sans la frontière avec le monde extérieur, elle façonnait elle-même sa propre barrière pour s'en préserver. Ce n'était pas une mauvaise chose au final, que Valorius ai rencontré quelqu'un qui lui apporte de nouveaux liens alors qu'elle-même devenait de plus en plus solitaire et marginale. Ce changement elle l'avait senti venir, elle le sentait s'installer, irrévocable...

En tournant la tête, il lui sembla apercevoir un corbeau perché sur la fenêtre. La lune qui avait commencé à décliner au-dessus de la cascade éclairait toute la lavandière et ses mille et unes fleurs. La Sylve était belle, elle sourit. Il y avait pire tout de même, que de se retrouver exilée en un lieu si paisible, et de voir tant de choses avec des personnes d'exception. Elle tendit la main en direction de sa fenêtre, celle-ci retomba mollement sur les draps quand la viéra se laissa emporter par le sommeil. Dehors, le corbeau s'envola jusqu'à un arbre de l'autre côté de la rivière, un arbre immense plus haut que les autres, au sommet duquel une silhouette masculine élancée l'attendait en lui tendant le bras.


"Tu n'es pas seule, Fille du Torrent."
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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"Bordez la brigantine !
- Meleth !
- J'y vais !"

La viéra bondit du grand mat jusqu'au martinet, sous un signe de main de Fjrn qui resta accrochée dans les haubans. Cela faisait quelques temps maintenant que les deux femmes voltigeaient dans le gréement sans difficulté, souples et agiles. Elles se coordonnaient sans mal avec les différents noeuds et monter au filet n'était pas un problème. Les autres associaient cette facilité avec leur ancienne vie dans la jungle, il y avait un peu de cela.
Les jambes nouées autour de la vergue, penchée en arrière la tête et les bras dans le vide, elle resserra le nœud avec force.
"Voilà, c'est bon ?
- c'est parfait, merci !"

Quelques tentatives furent nécessaires pour reprendre son élan et se remettre la tête à l'endroit. Son regard se perdit dans la mer de nuages avant de revenir à l'agitation sur le pont. L'Eternal apportait plus de joie dans les yeux de ses compagnons qu'aucun d'eux ne l'aurait pensé, ils le lui avaient confié pendant le voyage. Elle ne l'avait avoué qu'à demi-mot, mais elle le pensait aussi. Danser dans les cordages en chantant en choeur avec les autres gonflait son coeur autant que les voiles, et le vaisseau lui répondait comme il répondait à tous.

Je veux aller plus loin, beaucoup plus loin...

Fjrn semblait partager son état d'esprit. La viéra aux cheveux d'ivoire valsait dans les airs et parlait dans le vide comme si elle conversait avec un ami. Elle avait essayé maintes façons de communiquer pour finalement s'en remettre à la simplicité. Tout le monde avait trouvé sa place.Elle aperçut Valorius remonter vers la proue le nez dans un livre, et sourit voyant que malgré la houle il tenait parfaitement sur ses deux jambes ; on aurait dit qu'il avait passé sa vie en mer. Elle saisit la corde de l'étai et se laissa glisser jusqu'à lui. Il ne sursauta même pas et répondit à sa question avant qu'elle ne la pose :
"Toujours la biographie des trois oracles par Assahab Calheb, Meleth. Je pense en avoir pour un moment à éplucher cet ouvrage.
- Une chance que maitre Owl nous autorise à emprunter ces livres. Nazah est plongée dans son livre elle aussi."

Ils n'avaient passé que quatre jours sur cette île et pourtant ils rentraient avec des rêves et des projets plein la tête. Cela n'avait été qu'une mise en bouche qui leur donnait l'envie de repousser plus loin la ligne d'horizon.
En équilibre sur le bastingage, elle accompagna Valorius et son livre jusqu'à l'avant du navire en se tenant aux cordages. Il s'en trouvait toujours un à portée de main au cas où.
"Et pour ce qui est des Fils du Torrent, tu as emmené quelque chose de la Tour ?
- Mhm."
Elle secoua la tête. "Je sais qu'ils existent, mais aucun de ces textes ne les définit clairement si ce n'est que contrairement aux Filles du Torrent, ils vivent dans la rivière et non sur la terre ferme. Je finirais peut-être par en rencontrer un, un jour."
Valorius lui sourit, continuant jusqu'au beauprès. Elle le laissa là sachant qu'il rejoignait très probablement Ivanhault cloué à son sextant depuis leur départ. L'appel du capitaine suffit à lui refaire monter dans les haubans rejoindre Fjrn pour voir comment elles pouvaient donner un peu plus de vitesse dans ces voiles ; non pas qu'elles étaient pressées d'arriver, elles voulaient voir les limites de leur "ami".

Perchée sur ce grand mât, elle voyait le monde autrement. Ses pieds qui ne touchent pas le sol, elle se sentait pousser des ailes. Elle avait retenu le nom de chaque voile, chaque vergue, chaque carré de bois de ce navire avec pour ultime plaisir de ces voyages, allumer les lanternes quand le soleil s'est couché. C'était juste avant que Kyraniel ne sorte de la cambuse et que sa voix claire porte jusqu'à la vigie.
"Le repas est prêt !
- On arrive !"

Dans cet empire des cieux, il n'y avait pas de roi et pas de frontières, seulement eux et des rêves de voyage. Dans quelques heures ils seraient de retour à Brumée, et déjà elle voulait refaire son sac, partir pour le Diadème. Elle avait une quête d'une créature de légende qui n'avait que trop attendu.


"Je voudrais voler plus haut."
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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Il y a quelque chose d'épatant à camper à quelques centaines de yalms du sol, sur des îles entourées de nuages ; non pas qu'elle ne fut jamais consciente du danger que représentait son séjour dans les zones reculées du Diadème, mais la beauté du site valait à ses yeux tous les risques du monde. Une telle beauté méritait que l'on risque sa vie pour la contempler, et ce qu'elle cherchait dans ces contrées était plus rare et plus beau encore.
Allongée dans son sac de couchage, sous sa tente, Meleth souriait. Combien de lunes déjà, qu'elle en parlait ? Trois, peut-être, quelque chose comme ça. Depuis qu'elle avait vu, au détour d'un ilôt lors de sa récolte de plantes pour les savons d'Azurée, une de ces magnifiques créatures ailées à la grâce et à la légèreté du vent. Elle s'était par la suite renseignée sur ces animaux et avait découvert maintes histoires ; d'abord des légendes accompagnées de quelques reliques dans les plus nobles familles d'Ishgard, puis des traités scientifiques plus concrets et surtout plus récents. L'existence des animaux nommés "pégases" n'était avérée que depuis trois ou quatre ans, depuis que le Diadème était enfin exploré. Dès lors, elle avait nourrit le projet de s'aventurer plus loin encore, plus haut encore, et d'essayer de les voir de près.
Oh, bien sur entretemps il y avait eu la dernière mission des Quatre Tours et puis la création de la Ligue, autant de petites choses qui avaient retardé so voyage mais ce n'était pas rien grave, elle n'était pas pressée. Et finalement, son rêve s'était réalisé.

Une ombre passa derrière la toile de la tente, à contrejour, dessinant la silhouette d'un cheval ailé, Meleth sourit un peu plus. Elle se redressa et son regard se posa sur ses deux compagnons endormis à côté. Kyraniel avait le visage paisible, doux même lorsqu'un léger filet de bave coulait du coin de ses lèvres. Elle rit tout bas ; il était bel homme même ainsi. Hotaru de son côté, était emmitouflée dans un sac de couchage doublé d'une couverture, elle-même doublée de son manteau, le tout se soulevait doucement au rythme de sa respiration. Le froid de l'altitude mais surtout les courants d'air risquaient de la faire tomber malade et, connaissant sa santé fragile, elle avait décidé qu'il était absolument hors de question qu'un rhume vienne gâcher ce voyage. On ne voyait dépasser que sa chevelure couleur lavande qu'un jeune poulain qui s'était glissée discrètement par l'ouverture de la tente mâchoullait en silence pour ne pas la réveiller.
Ce n'était donc pas un rêve, songea Meleth en s'avançant vers l'entrée de la tente.

Dehors, le soleil se levait sur un ciel bleu tirant vers le rose. Elle se couvrit les yeux un instant avant que l'ombre d'un grand pégase ne vienne se poser sur son visage.
"Bonjour Fallon."
L'animal baissa le museau vers elle, elle tendit la main vers lui et le laissa venir. Elle n'était pas encore habituée et la blessure sur son flanc qu'ils avaient soigné la veille attirait son attention. Mais il semblait aller bien mieux, assez pour battre des ailes comme une invitation.
"Un peu de patience, mon ami. Nous devons encore ranger le camp et ensuite nous partirons. Je suis impatiente de te présenter aux autres, j'ai hâte de voir leur tête quand ils vont te voir..."




"Je vais mourir, je vais mourir ! je vais mouriiiiiiiiir !"
Hotaru ne cessait de crier cela, cramponnée à Meleth, elle-même cramponnée à la crinière de Fallon sous le regard à la fois curieux et rieur du petit poulain volant qui cabriolait dans les airs à leurs côtés. Kyraniel et son compagnon se chargeaient de transporter le matériel de camping.
"C'est encore loin Nid du Faucon ? Demanda Meleth.
- Encore une demi-heure de vol, répondit l'Elezen entre deux éclats de rire.
- Je vais mourir ! répéta Hotaru."
La raenne hurlait à chaque virage, mais son sourire grandissait en même temps. Elle pouvait bien mourir maintenant, elle mourrait heureuse après toutes ces aventures, cette rencontre avec le troupeau, et le fait de voler maintenant sur le dos d'une créature jusque là inconnue de ses yeux autrement que dans les livres. Meleth n'en menait pas plus large, à moitié couchée sur sa monture et les bras de son amie lui serrant la taille à l'en étouffer. Pourtant elle riait, savourant chaque seconde de ce voyage de retour tellement insensé, tellement au-delà de tout ce qu'elle avait imaginé.

Les premiers flocons de neige vinrent flotter autour d'eux, et Fallon piqua en suivant Kyraniel qui venait de passer devant, dans un nouveau cri de Hotaru semblable à celle d'une enfant sur une manège. On entendit leurs rires depuis le guet de Nid du Faucon bien avant qu'ils n'apparaissent.
"Tu sais Fallon, confia Meleth, c'est la première fois que je vole. Oh, avec l'Eternal on vole, mais avec toi j'ai le sentiment d'avoir des ailes à mon tour."
L'animal ferma les yeux un instant, comme s'il avait compris. Il ouvrit alors ses ailes un peu plus et ses sabots frôlèrent le toit d'un bâtiment avant de reprendre de l'altitude.

Elle se sentait plus proche de lui que des humains au final. Comme les viéras, les pégases vivaient en groupes loin des hommes et leur folie. Comme elle, il avait croisé la route de ces intrus par hasard et avait été curieux en plus d'être dans le besoin. Comme les viéras, les pégases avaient longtemps tenu plus dy mythe que du quotidien. Tout ce qu'elle espérait, ce que comme elle, il ne regrette pas son choix d'avoir quitté son troupeau pour voyager à ses côtés. Elle ne se faisait pas de souci pour le reste, pas même pour Grenat, son cher ami fauve, qui avait compris depuis quelques temps qu'il n'était pas nécessaire de manger ses compagnons de boxe.
Avec son compagnon tigre, elle arpentait les forêts et les territoires escapés où la puissance d'une monture solide et massive aux pattes griffues était nécessaire. Avec Fallon, elle explorerait les cieux.


Elle avait grand hâte de découvrir de nouveaux animaux fabuleux.
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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Elle se trouvait sous les arbres quand tout commença, ou plutôt quand la mission tourna mal, ce mandat sur l'escadron Carnivora. Elle dansait simplement les pieds dans l'eau près d'un petit étang en Forêt du Sud où elle aimait se rendre sans s'inquiéter des autres. C'est alors qu'un vent glacé se mit à souffler et qu'elle crut entendre ces murmures que les gridaniens se vantent souvent de percevoir dans la Sylve. Elle ne comprenait pas ce qu'ils disent mais ses grandes oreilles préssentaient le danger, pas pour elle mais pour un autre. Un mage blanc en mauvaise posture, quelqu'un qui était assez proche d'elle pour qu'elle le sente bien que la Sylve ne lui parle pas comme elle parle aux élémentalistes de Sombrelinceuil. Elle sentait la peur, et la mort.
"Alexois..."
Il était partit en mission loin d'ici, loin de la forêt et de toute portée, il était au Mor Dhona. Elle ne pouvait rien faire, rien de plus que prier. Prier qui, quoi ? Quel dieu, quel esprit irait au secours de son ami qu'elle sentait en train de couler profondément dans les abysses. Elle n'avait sur elle, pas même une monture volante pour l'emmener au plus près et même si c'était le cas elle ne serait jamais arrivée à temps.
Sa linkperle vibra dans son oreille, elle entendit l'appel pour des renforts sur le mandat. Ils se précipitèrent tous sans hésiter mais elle l'entendait dans les arbres, ils arriveraient trop tard.

Poussée par ses jambes qui réagirent toutes seules, elle se remit à danser, une danse frénétique et maladroite au début. Son corps déployait toute l'énergie dont elle était encore capable, comme si sa propre vie en dépendait, et tout en dansant elle implorait les esprits d'agir sans qu'il n'y ait aucune logique à ces appels désespérés.
"Faites qu'il vive, je vous en supplie, sauvez-le. Père, je vous implore, donnez-lui la force de tenir jusqu'à ce qu'ils le sauvent !"
L'eau claire devint plus agitée sous le remous provoqué par ses pas de danse, mais bientôt ils le furent plus encore. Le vent souffla dans les branches et un râle se fit entendre dans la forêt. Meleth n'y prêta que peu d'attention jusqu'à ce que l'air ambiant se fasse plus dense et que les couleurs du paysage changent et se figent dans un tableau surnaturel. La viéra cessa de danser, toujours les pieds dans l'eau. C'était toujours Sombrelinceuil, mais en différent.
"Où suis-je ?"
Elle avait déjà fait l'expérience de visions étranges lorsqu'elle entrait en transe, comme sa rencontre avec "le torrent noir", mais cette fois c'était différent; elle n'était pas seule. Elle entendait venant de partout les éclats de voix de ses compagnons autours d'Alexois, tentant tant bien que mal de le stabiliser. Elle comprit qu'il avait pris une balle en pleine poitrine et qu'il était en train de mourir, qu'il était peut-être déjà mort. Elle se tourna dans tous les sens, cherchant l'origine de ces voix et la silhouette de ses amis en vain. Ils étaient partout et nulle-part à la fois. Elle tenta de les appeler mais aucun ne l'entendait. Elle se mit alors à suivre le courant à l'aveugle, elle ne voyait rien au-delà de la rive. Plus elle avançait, plus l'eau devint sombre comme un ciel nocturne parsemé, et finalement la rivière vint se jeter dans le lit d'une mer d'étoiles où flottaient des centaines d'âmes voguant paisiblement vers une lueur trop loin pour qu'elle puisse la définir. Elle commença à comprendre où elle se trouvait et pourquoi elle était ici. Alexois venait d'apparaitre sous ses yeux, intangible, endormi comme attiré vers la lueur lointaine.
La question se posa un bref instant, avait-elle le droit de faire cela ? Elle avait été conduite ici alors peut-être que oui. Elle n'avait pas le temps de réfléchir davantage, et d'instinct usa de sa maitrise afin d'envoyer un courant happer l'âme de son ami et l'extirper de la mer d'étoiles. La douleur dans son corps fut intense et immédiate, elle hurla, suffoqua et s'écroula avant de savoir si on ami était sauvé...




A son réveil, Valorius et Ivanhault étaient présents. Ils la ramenèrent à la maison et lui dirent que plus de cinq jours avaient passé depuis le mandat. Elle était restée dans un état de sommeil profond tout ce temps au fond de l'étang, attirant les esprits locaux et, aux dires d'Ivanhaut, les morts qui hantent les bois.
"Vous avez mit un pied dans la Rivière des Âmes, cela aura des répercussions, on ne joue pas avec la mort."
Il avait raison. Elle avait agit de façon inconsidérée et ne devrait jamais recommencer cela. C'était à la fois intéressant de découvrir que les Filles du Torrent pouvaient accomplir ce genre de miracles, et en même temps terrifiant et lourd de conséquences. Par prudence, ils lui avaient demandé de ne plus utiliser ses pouvoirs jusqu'à ce qu'ils soient surs que cela n'irait pas aggraver la situation. Alexois était peut-être sauvé mais il avait été mort pendant un court instant, quant à Meleth, elle se promenait désormais avec une balise que les morts les plus avides sentiraient de loin. Elle repensait à ce que cet esprit avait dit dans les profondeurs de la rivière souterraine : l'eau, c'est la vie. Et les morts sont attirés par la vie. Elle avait songé à consulter Hotaru si jamais elle sentait qu'un défunt s'accrochait à elle... mais pour le moment, ça allait.

Assise sur son lit, elle ouvrit un nouveau livre : "bestiaire de Sombrelinceuil". Elle voulait peaufiner ses connaissances en zoologie eorzéenne. Demain, elle et Fallon feraient leur premier essai de vol en Noscea, il était presque remis. Elle avait encore de nombreuses plantes à entretenir dans son jardin et dans la serre du relais. Elle ne s'ennuierais pas.


"Essayons de garder une vie normale le plus possible, on verra bien ce qui arrivera."
Lerith Il y a 3 mois et 3 semaines
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"Bonjour Meleth ! Vous semblez en forme ce matin."
L'ouvrier sourit, voyant la jeune viéra passer non loin de lui en dansant sur le pavé, grâcieuse comme toujours malgré l'épais poncho qui couvrait ses épaules. elle tenait à la main ce panier rempli de savons qu'elle livrait régulièrement sur le chantier depuis son ouverture il y a des lunes de cela. Elle sourit, le saluant d'un signe de la main à la fois chaleureux et distant, elle ne s'approchait jamais trop près des humains de son propre chef.
Le soleil baignait de sa lumière les toits des maisons tout juste construites, ses rayons réfléchissaient sur l'ardoise, l'éblouissant jusque sur la rambarde de l'Estrade de Sainte Roelle.
"Bonjour Meleth." La salua une passante qui travaillait au comptoir des artisans, à nouveau la viéra répondit d'un signe de la main tout en poursuivant sa route.

Le bruit des conversations, le cri des oiseaux d'hiver dans les corniches, les outils au travail, tout ceci formait une mélodie que ses grandes oreilles pouvaient entendre, un rythme qui s'imposait à ses pieds. Ainsi, sans musique, elle dansait. Le froid ne l'avait jamais inspirée, la neige et la glace ne chantaient pas comme l'eau d'une rivière ou l'océan sauvage, cela était récent.
"Entends... ressens... pense..."
La déferlante n'avait plus court ici où l'inertie générée par le froid emprisonne l'eau sous forme solide. Plus elle tentait de s'harmoniser avec la glace comme elle le faisait avec l'eau, plus elle se sentait sombrer dans l'inertie elle aussi jusqu'à devenir glace elle-même ce qui lui serait fatal ; il lui fallait une autre approche. Mais la danse ne peut être inertie, la danse doit être mouvement, quel mouvement ressort de cette vie dans le froid ? Plus elle les observait, plus elle avait du mal à saisir la nuance. Ils étaient eux aussi joyeux, eux aussi bougeaient au gré de leur quotidien dans la Sainte-Cité. Les gens d'ici n'étaient pas différents des autres au premier regard, et portée par le rythme Meleth dansait encore et encore, espérant trouver les pas qui conviennent.




"Je suis rentrée !"
Le silence lui répondit. Valorius n'était pas encore rentré, sans doute dans son laboratoire ou auprès d'Amélianne. Meleth sourit pour elle-même, après tout il était humain lui aussi. Quant à Louah, il était encore sortit s'entrainer on ne sait où c'est à peine si elle le voyait depuis une semaine. Cette maison habitée par tant de monde était bien souvent vide, et toujours calme. Grenat dormait paisiblement dans le jardin, Fallon n'était plus là il devait se dégourdir les ailes. Les lunes passant, la chaumière se remplissait d'animaux en tous genres en plus de ses plantes exotiques.
Dans le seau d'eau froide posé près de son établi, les moules des savons finissaient de refroidir, d'ici quelques heures elle pourrait porter ses créations à Ivanhault, Kyraniel, Valorius et dame Kikyo.
"Un jour comme un autre. Pourquoi ai-je cette sensation de dormir debout alors que je suis bien réveillée ?"
Chaque jour la même chose, chaque jour le même quotidien imposé par les séquelles de sa mésaventure. Des mouvements qui se répètent, des saluts qui sont toujours les mêmes, Meleth s'ennuyait tout en se sermonnant intérieurement. Elle n'était pas à plaindre, combien de personnes peuvent se vanter de profiter d'une vie aussi tranquille ? Bien des humains luttent pour obtenir autant de paix.




"Bonjour Meleth, qu'apportez-vous aujourd'hui ?
- Comme chaque semaine Monsieur Brown."

Elle offrit de loin un sourire au marchand qui finissait de décharger ses caisses devant le comptoir de matériel à destination du Diadème. Non sans surprise, elle ne vit s'approcher d'elle tout en s'essuyant les mains dans son tablier.
"Vous tombez bien, j'ai quelque chose pour vous."
Elle haussa un sourcil, le regardant fouiller dans sa besace pour en sortir un livre, presque un cahier tant il était peu épais. Lorsqu'il le tendit vers elle, elle ne le prit pas tout de suite.
"Qu'est-ce que c'est ?
- Trois fois rien vraiment. Je n'avais pas eu l'occasion de vous remercier pour votre aide l'autre jour. Alors tenez, vous avez dit que vous aimiez les livres."

Indécise, elle le remercia toutefois et accepta le cadeau. L'ouvrage n'avait rien de spécial, c'était avant tout pour l'intention. Son regard s'attarda sur le titre : "aurores boréales". En le feuilletant elle constata que ce n'était qu'un recueil de plusieurs sites où l'on avait pu assister à ce genre de phénomènes dans le Coerthas, accompagné de belles aquarelles qui n'avaient rien d'exceptionnel. Il y avait même plus de dessins que de textes mais qu'importe, cela s'ajouterait à sa collection.
"Merci monsieur Brown. dit-elle, sincère.
- Je sais que nous ne sommes pas très chaleureux dans ce pays mais peut-être y trouverez-vous une forme de beauté pour vos prochaines représentations.
- Oh... Oh non, non n'allez pas croire que... la scène ce n'est pas pour m-..."

Il était déjà repartit vers sa charette, agitant une main par-dessus son épaule. Une personne bien aimable ce monsieur Brown, qu'elle regrettait parfois de ne pas mieux connaitre. Elle n'était pas prête à s'associer aux humains à ce point, pas encore.

Pourtant, ce livre ne cessa de la travailler durant tout le temps de ses livraisons et au retour, elle se plongea dans sa lecture durant tout le temps que dura le trajet en charrette depuis Gridania jusqu'à la Lavandière. Couchée sur les sacs de légumes à destination du ranch de Brancharquée, elle ne décrocha pas son regard des aquarelles et des notes.
"Particules ethérées chargées de lumière solaires qui reflètent une lueur dans le ciel, la neige et la glace jouent un rôle réfléchissant comme une prisme qui sépare les rayons et les renvoie..."
Elle cligna des yeux, s'attarda sur ce passage. L'illustration sur la page suivante représentait les couleurs de l'arc-en-ciel se reflétant dans un glacier puis dans le ciel au-dessus, simple mais vraiment joli. Visiblement ce genre de phénomène se produisait surtout l'hiver.
"J'ai tout faux depuis le début. Je me focalise sur l'eau qui constitue la glace, mais l'élément n'est plus le même, sa musique ne vient pas du même endroit !"
La charrette s'arrêta d'un coup, elle fut coupée dans ses pensée et manqué de basculer sur le côté.
"Nous sommes arrivés mademoiselle. Je m'arrête ici.
- Merci bien, je vais finir la route à pieds !"

Elle sauta sur ses deux jambes et s'en fut presque en courrant, sans oublier un dernier signe de la main à son cocher qui se gratta un sourcil sous sa casquette, perplexe.
"Elle est bien jolie cette demoiselle, mais elle n'a pas l'air très nette, eh...!"

Dans les bois qui bordent la Lavandière, Meleth courrait le long de la rivière, bondissant sur les rochers où ruissèle l'eau chantante. Ici était son élément, la vie qui s'écoule au rythme de ses pas.


Et avant la fin de l'hiver qui vient, elle aurait percé les secrets de la glace.

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